L’ex abbé Mercier, renvoyé de l’état clérical en 2022, va être jugé ce vendredi 17 et ce lundi 20 octobre pour abus sur mineur vulnérable devant la cour correctionnelle de Tarbes. La très épaisse ordonnance de renvoi (44 pages) publiée en octobre 2024 fait état de nombreux faits plus anciens, accablants mais prescrits, ainsi que des enquêtes des autorités religieuses et civiles à son sujet, et des auditions. Sept victimes avaient porté plainte contre lui, mais pour la plupart, la prescription de 30 ans a stoppé la procédure.
Il a aussi fallu un quart de siècle – du premier signalement adressé à Mgr Sahuquet alors évêque de Tarbes en 1992 – à 2021 pour que les autorités religieuses réagissent, et encore trois ans aux autorités civiles, un premier signalement ayant été classé en 2018, et un deuxième trainait dans les limbes jusqu’à ce qu’un journaliste pose la question en pleine conférence de presse de la CEF consacrée à la CIASE, en octobre 2021, pour que la justice se réveille.
Ensuite il a aussi fallu trente ans à l’Eglise pour renvoyer de l’état clérical l’ex-abbé Mercier, et quatre ans de plus à la justice des hommes pour qu’il passe en jugement – il a néanmoins été placé en garde à vue puis incarcéré en juillet 2023 pour éviter des pressions sur les victimes – Marianne, dans son enquête, a détaillé comment il achetait le silence avec les dons que certains croyaient faire pour la restauration de la fausse abbaye de Tarasteix, qui tombe en ruines – comme nous avons pu le constater en 2021. Et des faits relativement récents (2019), concernant un enfant placé par les services sociaux (ASE) sont restés dans l’ombre…
Olivier Savignac, vice-président de l’association Parler et Revivre, estimait en juillet 2023 que l’Eglise était au courant – ce que confirme l’ordonnance de renvoi, qui date précisément courriers et signalements : « « Je ne peux pas imaginer un seul instant que les évêques qui se sont succédé au diocèse de Tarbes et Lourdes n’étaient pas au courant ». « Jean-Claude Mercier a été sanctionné par un renvoi de l’état clérical, c’est la sentence maximum. Pour moi, l’Église connaissait tout ça depuis un moment. »
L’abbé Mercier a reconnu des « activités charnelles » avec des enfants de 9 à 11 ans
Pendant sa garde à vue, l’ex abbé Mercier a parlé « d’activité charnelle » et reconnu des « dérapages« , ainsi que des relations sexuelles, avec quatre à cinq enfants de 9 à 11 ans, tous consentants selon lui : « l apparaît que les victimes se comptent par dizaines dans ce dossier. La juge a lu des témoignages devant le mis en cause. Les faits évoqués sont particulièrement graves, de nombreux viols sur des garçons qui à l’époque avaient 9 ans, 11 ans, 14 ans. Pour certains, les viols se sont produits alors qu’ils étaient en colonie à Tarasteix […] de l’argent était donné aux familles des victimes pour acheter leur silence »
L’avocat général regrette le silence de l’Eglise
La République des Pyrénées fixe le cadre du procès : « deux jours d’audience à Tarbes pour faire la lumière sur les accusations qui concernent l’homme d’Église. Abbé autoproclamé de Tarasteix, il est mis en examen pour viols sur un mineur de plus de 15 ans et incarcéré à Tarbes depuis juillet 2023. Plus exactement, l’homme est soupçonné d’avoir abusé et violé des dizaines d’enfants qui ont fréquenté l’abbaye depuis les années 70 et d’avoir acheté le silence des victimes et leur entourage en versant des sommes d’argent. Mais l’homme devra répondre seulement d’un viol présumé commis sur un mineur, les autres faits ayant été prescrits« .
Le journal tarbais cite aussi l’avocat général Eric Tuffery qui « regrette le silence de l’Église qui a tardé jusqu’en 2017 pour se rapprocher du procureur de la République de Tarbes, alors qu’elle était en possession de plusieurs signalements concernant l’abbé Mercier ».