Mis en examen pour viols sur mineurs et incarcéré depuis le 12 juillet dernier, l’ex-abbé Mercier de Tarasteix, une fausse abbaye des Hautes-Pyrénées, renvoyé de l’état clérical et excommunié fin 2022, avait demandé sa remise en liberté à la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Pau.
Lors de son audition pour demander sa libération, l’ex-religieux a reconnu des “des anomalies” – il est question de viols sur mineurs. Comme l’indique France Bleu, “en garde à vue pourtant, Jean-Claude Mercier n’avait pas été très bavard. Quand les enquêteurs ont présenté des dizaines de témoignages de viols sur des jeunes hommes mais aussi sur des enfants qui avaient 9 ans, 11 ans pour certains, Jean-Claude Mercier a parlé de “plaisir charnel”, “d’activité charnelle”. Il a reconnu des “dérapages” et des relations avec quelques-uns, cinq et tous consentants, selon lui”.
L’audience a apporté d’autres précisions sur les faits reprochés à l’ex-religieux… qui a bénéficié des décennies durant de la mansuétude des autorités locales et ecclésiastiques : “il apparaît que les victimes se comptent par dizaines dans ce dossier. La juge a lu des témoignages devant le mis en cause. Les faits évoqués sont particulièrement graves, de nombreux viols sur des garçons qui à l’époque avaient 9 ans, 11 ans, 14 ans. Pour certains, les viols se sont produits alors qu’ils étaient en colonie à Tarasteix […] de l’argent était donné aux familles des victimes pour acheter leur silence” – les donateurs croyaient, eux, donner pour la restauration de l’abbaye dont les bâtiments tombaient déjà franchement en ruine en 2021.
Il a été finalement maintenu en détention pour éviter des pressions sur les témoins et victimes. Par ailleurs, le rectorat de Toulouse ne s’est pas expliqué sur la sortie des collégiens de Vic-en-Bigorre dans la fausse abbaye, deux fois à quelques jours d’intervalles, alors que l’ex-religieux était déjà, alors, l’objet d’une enquête pour viols sur mineurs. Nul doute pourtant qu’un établissement hors contrat aurait eu la même initiative, le traitement n’eût pas été le même.
Des faits de 2019 collectés par un enquêteur privé local
A ce jour, les faits les plus récents qui ont fait l’objet de plaintes – de deux plaintes même, datent de 2006. Mais nous avons écouté des enregistrements de proches de l’ex-abbé qui font état de faits beaucoup plus récent – en 2019. Ils ont été collectés par un enquêteur privé local, Bruno Gallet-Fourcade – qui nous donne l’autorisation de les reproduire.
Une personne dont la voix tremble encore d’émotion, confie, peu après les faits, fin 2019 : “ça c’est grave, ce que je vais raconter. J’en tremble et j’ai envie de vomir. Il y a une femme qui amène des gosses de 7-8 ans à l’abbaye [Tarasteix] et les laisse avec le curé [Mercier] puis vient les rechercher […] T. y a été avec eux, il est encore traumatisé, il ne veut pas en parler, c’est la famille P de je ne sais où, des gitans […] le gosse était dans la voiture, et il gueulait, ‘je ne veux pas y aller, je ne veux pas y aller!’ […] ils l’ont laissé [le gosse], et ils sont allés le rechercher […] ça s’est passé en plein jour, ce n’est pas la première fois que ça arrive“.
Selon nos informations, le vicaire général du diocèse de Lourdes, le père Jamet, a été prévenu dès 2019, preuves à l’appui, des sombres affaires de la fausse abbaye de Tarasteix. Mais il a fallu attendre octobre 2021, la Ciase et une question à la conférence de presse de la CEF pour que la justice, et avec elle l’Eglise, consentent à se réveiller.