Dans un entretien donné à La Croix, Jean-Marc Sauvé, l’ancien président de la CIASE, était interrogé sur l’abbé Pierre. La CIASE a été récemment mise en cause pour ne pas avoir dévoilé des faits dont elle était au courant depuis 2019 au moins. Jean-Marc sauvé s’en explique en s’appuyant notamment sur la confidentialité des témoignages:
La Ciase était totalement indépendante de l’Église, ce qui lui a permis de nouer un pacte de confiance avec les victimes : ce qu’elles nous confiaient était destiné à la seule commission et à personne d’autre. Cette confidentialité absolue était la condition même pour que les victimes osent parler. C’est pour cette raison que nos archives ont été, à la fin de nos travaux, versées aux archives nationales et pas à l’Église catholique, au grand dam de certaines autorités comme le nonce apostolique, qui a clairement marqué son désaccord avec notre décision.
Il était donc exclu que nous communiquions des informations sur des agresseurs présumés ou des victimes à une exception près : celles que nous recevions sur un potentiel agresseur vivant. Dans ce cas, la règle de confidentialité était levée pour faire un signalement au parquet et aux autorités ecclésiastiques, afin de permettre des enquêtes et d’empêcher la réitération des faits.
Pas de divulgation publique des informations connues de la CIASE sur l’abbé Pierre
Pour Jean-Marc Sauvé, il n’était pas question de rendre public ce qu’elle savait sur l’abbé Pierre. Mais il revient aussi sur la présomption d’innocence, qui ne disparaît pas avec le décès du supposé abuseur:
Il était inconcevable de rendre public un témoignage unique, confié par une personne que nous n’avions pas pu entendre et qui nous disait n’avoir pas voulu en parler à ses enfants. Une telle révélation aurait été une transgression de notre mission : nous n’avions pas à désigner des coupables et des victimes. En outre, toute forme de présomption d’innocence ne disparaît pas avec la mort : nous avons toujours été conscients de nos devoirs éthiques et des risques juridiques en la matière.
Effectivement, avec le nombre incroyable de prêtres récemment suicidés, il apparaît important de respecter la présomption d’innocence…
Jean-Marc Sauvé s’étonne aussi du comportement du cabinet Egaé qui avait mené une enquête pour Emmaüs France, mais sans passer par la CIASE:
En revanche, je m’étonne que le cabinet Egaé, qui a mené l’enquête pour Emmaüs France, n’ait pas contacté la Ciase pour obtenir des informations, que nous aurions à ce moment-là pu donner dans le cadre de son enquête sur les accusations visant l’abbé Pierre. Je n’ai appris l’existence de cette enquête qu’en juillet, la veille de la publication du rapport d’Egaé.
“Jean-Marc Sauvé défend la présomption d’innocence” Pourtant son rapport ne l’a pas fait, jetant l’opprobre sur tous les prêtres avec des chiffres délirants et faisant croire que tout prêtre est un agresseur en puissance (recommandation N°24 “responsabilité systémique de l’Église”).
@Nicolas
Bien sûr, et vous le savez, dans le droit la présomption d’innocence concerne des personnes particulières non une analyse statistique ou une dérive systémique.
Pour ce qui concerne les statistiques réalisés par des sondages sérieux à la demande de la CIASE (je suis chargé d’étude marketing et maitrise ce sujet), peu importe qu’il y ait 10, 30 ou 50% de risque d’erreur, il reste que les personnes signalant avoir été abusées par un prêtre ou laïc missionné par l’Eglise sont extrêmement nombreuses, plus que dans les clubs de sport ou écoles et ces faits nous choquent et nous incitent à la réparation et à l’action. Nier cet état de fait, c’est se voiler la face.
Pour ce qui concerne la dérive systémique, il ne s’agit bien sûr pas d’accuser tous les prêtres, mais d’évaluer si les modes de fonctionnement d’une organisation, ses compromission ou ses silences ont pu faciliter des passages à l’acte. Je vous laisse l’apprécier. De mon côté face à la multiplication des cas avérés depuis 1950 (au moins…), et les erreurs de discernement faits par des évêques, des prêtres, des laïcs, impossible de ne pas le reconnaître et de chercher avec discernement des mesures correctives ajustées.