En complément de ses nominations, le diocèse de Montpellier publie une courte lettre de son archevêque Norbert Turini qui constate être “à flux tendu” pour trouver des prêtres. Le diocèse pâtit cette année du départ en congé pour raisons familiales d’un de ses prêtres, du départ de deux autres prêtres des missions africaines et d’un prêtre de la communauté saint Jean, tandis que deux autres prêtres sont en année sabbatique pour formation. Il bénéficie en revanche de l’arrivée d’un ancien vicaire général du diocèse de Narbonne, en froid avec son évêque, et de l’arrivée d’un autre ancien vicaire général, à Toulon cette fois, ainsi que de deux ordinations.
“Comme vous l’avez constaté, les nominations que je comptais publier pour la Messe Chrismale paraissent avec beaucoup de retard. Cela nous appelle tous à une prise de conscience urgente :
▪ Nous sommes à « flux tendu » pour trouver les prêtres appelés à servir nos paroisses.
▪ Nous mesurons les difficultés de plus en plus grandissantes à couvrir la géographie paroissiale.
Ce constat manifeste que nous n’échapperons pas à cette conversion spirituelles, pastorale etcommunautaire dont je vous parle dans ma lettre pastorale. N’en ayons pas peur et restons sereins pour y voir, pas seulement une situation à subir, mais l’appel de l’Esprit Saint qui nous fait toujours avancer dans le sens du bien, qui nous mobilise, éclaire notre foi et nos esprits, renouvelle la vie de notre Eglise.
Si L’Eglise naît du côté ouvert du Christ sur la Croix, L’Esprit Saint la rend missionnaire au jour de la Pentecôte. Ne perdons pas cela de vue. Elle naît du Christ, et sa mission dans l’Esprit Saint la fait grandir au fur et à mesure qu’elle annonce la joie de la Bonne Nouvelle à toutes les nations.
Souvenons-nous des paroles du Pape St Paul VI dans son exhortation apostolique Evangelii nuntiandi (Annoncer l’Evangile). Il est bon de les relire :
« Evangéliser est, en effet, la grâce et la vocation propre de l’Eglise, son identité la plus profonde. Elle existe pour évangéliser, c’est-à-dire pour prêcher et enseigner, être le canal du don de la grâce, réconcilier les pécheurs avec Dieu, perpétuer le sacrifice du Christ dans la sainte messe, qui est le mémorial de sa mort et de sa résurrection glorieuse » E.N 14.
La mission dans l’Eglise est toujours positive parce qu’elle porte en elle l’élan que lui donne le Christ Ressuscité.
C’est ce dynamisme de l’Espérance chrétienne qui fait avancer nos communautés et c’est dans cet élan que l’Esprit Saint appelle aux changements à venir, qui ne pourront se faire sans une nécessaire inventivité dans la vie paroissiale (partage des rôles, créativité des laïcs, esprit synodal, ouverture missionnaire, …). Nos communautés ne pourront se renouveler qu’au regard de la mission qui a son origine dans celle du Christ. Ne pas comprendre cela, c’est s’enfermer dans une pastorale du « fonctionnement », de la survie, alors que l’Esprit de Pentecôte nous appelle sans cesse à emprunter une multitude de chemins pour rejoindre l’humanité d’aujourd’hui, même « par des chemins qui ne sont pas nos chemins ». Is 55/7. Une Eglise de Pentecôte est une Eglise de l’Espérance où chacun de ses membres témoigne que ce qui est premier, c’est l’amour prévenant d’un Dieu en quête de l’homme. « Un Dieu qui vient à la rencontre, demande l’hospitalité, engage la conversation » Dieu a tant aimé le monde. Petite théologie de la mission. Cardinal Jean-Marc Aveline.
En terminant, je remercie les frères prêtres qui ont accepté un changement de ministère et qui ont répondu OUI pour une nouvelle mission. Quitter une paroisse, c’est toujours un arrachement, en raison des liens spirituels, fraternels, communautaires, personnels noués avec les paroissiens et tant de personnes en dehors du circuit paroissial, mais avec lesquelles une amitié est née. Nous créons des liens affectifs et pas qu’effectifs, avec ceux qui nous sont confiés et l’amour du Christ passe aussi par ces liens.
Merci pour votre disponibilité qui manifeste que nous ne sommes pas propriétaire de la charge pastorale, qu’elle nous a été confiée comme à des « serviteurs » pour un temps et que le moment venu, le Seigneur nous appelle à passer sur une autre rive, découvrir d’autres visages, créer de nouveaux liens, servir et aimer au nom du Christ. Tout déracinement est difficile, mais il nous associe au mystère pascal du Christ qui nous fait avancer toujours dans le sens de la VIE.
Montpellier le 26 avril 2024
+ Norbert Turini, Archevêque de Montpellier
Notons la nomination d’un prêtre farouche opposant au père René Luc Giran ( qui prend une année sabbatique suite à la fermeture de Cap missio) à la tête de la paroisse Ste Bernadette ( paroisse étudiante conduite par le père René Luc )
D’une part, les hommes du Concile ont fait Vatican II, le Concile Vatican II, avant tout pour rénover l’Eglise et non avant tout pour transmettre la foi. Paul VI a été à la fois l’un des premiers acteurs, l’un des premiers témoins et l’une des premières victimes de cette priorisation de la rénovation de l’Eglise au préjudice du renforcement de la foi, d’où le déficit de fécondité de son année de la foi, en 1967-1968, et de sa réforme de la liturgie, depuis 1969-1970. Et aujourd’hui encore, nous subissons les conséquences de cette priorisation du renouveau du contenant au détriment de la transmission du contenu.
D’autre part, presque soixante ans après l’ouverture de l’après-Concile, les évêques rénovateurs, s’ils sont réalistes, ne peuvent pas réfléchir et réagir comme s’ils ignoraient et ne comprenaient pas que le renouveau de l’Eglise est durablement et profondément dysfonctionnel, sous les angles de la fidélité doctrinale et de la fécondité spirituelle, en raison et non en dépit du Concile.
Or, ils persistent à faire comme si le Concile n’avait pas une part de responsabilité non négligeable sur l’après-Concile, ou ils persistent à faire comme s’il était nécessaire et méritoire de continuer à subir l’effet de surplomb ou l’ombre portée, ou encore le sac de sable du renouveau sur les épaules de la transmission, qui découle du Concile.
C’est un peu comme si des acteurs et des observateurs de la politique étaient dans le déni le plus complet sur l’influence de la Constitution de 1958 sur la structuration et le déroulement de la vie politique française, depuis 1958-1959…
Enfin, de même que nous vivons dans un monde dans lequel les mots sont souvent piégés, de même nous vivons dans une Eglise dans laquelle les mots sont souvent piégés : ainsi, depuis que la consensualisation en direction des religions non chrétiennes et de l’humanisme agnostique, notamment onusien, est à l’ordre du jour de la prise en compte et de la mise en oeuvre des intuitions prophétiques du Concile, les hommes d’Eglise ont-ils bien conscience du fait que le mot évangélisation n’a plus du tout le même sens que jusqu’à la mort de Pie XII ?
De même, depuis qu’un principe général de sécularisation interne du regard et du discours des clercs catholiques sur les hommes, les femmes, l’esprit et la vie du monde de ce temps, s’applique dans l’Eglise catholique, sous la conduite et dans le sillage de Gaudium et spes, les hommes d’Eglise ont-ils bien conscience du fait que l’évangélisation est fragilisée par son exposition à des tendances immanentistes ?