Lundi 5 décembre, à 12h45, Monseigneur Éric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims, Président de la Conférence des évêques de France, installera officiellement le TPCN en la chapelle Saint-François-de-Sales de la Maison des évêques, 58 avenue de Breteuil à Paris (75007), à l’issue d’une messe qu’il célèbrera aux côtés des neuf évêques du Conseil permanent de la CEF.
Composé de clercs et de laïcs, ce tribunal pénal canonique inédit a été créé en application des résolutions votées par les évêques français lors de leur Assemblée plénière de mars 2021.
A cette occasion, les membres du tribunal se verront remettre leur décret de nomination par Monseigneur de Moulins-Beaufort, et prêteront serment.
L’Église, en tant que société, a élaboré un système juridique. Celui-ci comprend le droit de sanctionner les comportements de ses membres qui porteraient atteinte aux valeurs spirituelles et humaines de cette société (dont certaines ne sont pas prises en compte par l’État). C’est pourquoi l’Église a un système de justice interne et des tribunaux dits canoniques qui lui sont propres. Ce système propre s’apparente à celui des ordres professionnels (médecins, avocats, etc.), mais le droit de l’Église est plus qu’un simple droit disciplinaire : en effet, il ne concerne pas que les clercs, c’est- à-dire les “professionnels”, mais tous les fidèles. Ces procédures ecclésiales, mises de côté après l’enthousiasme post-conciliaire, ce Concile qui ne voulait plus condamner, ni le communisme ni les hérétiques, ni personne, sont propres à l’Église et à ses fins religieuses. Les principales particularités de la justice pénale de l’Église résident dans ce que :
- Certains délits lui sont propres : hérésie, apostasie, schisme, enseignement d’une doctrine condamnée par le magistère, simonie, sacrilège, délits dans l’administration des sacrements … ;
- Certaines peines lui sont propres : interdiction de célébrer ou de recevoir les sacrements, renvoi de l’état clérical. En plus des peines expiatoires comme dans la société civile, il y a des peines médicinales dont le but est d’obtenir l’amendement du coupable. Ces peines cessent si cet amendement est obtenu.
Si la plupart des peines doivent être infligées à l’issue d’un procès (comme dans la justice étatique), un certain nombre de peines spécifiques, pour certains délits graves ou occultes, s’appliquent immédiatement par le seul fait que le délit a été commis (peines “latae sententiae”) si l’auteur a agi librement, consciemment et en sachant qu’il serait frappé d’une telle peine. C’est le cas de l’avortement par exemple.
Une autre spécificité de la justice pénale de l’Église est le rôle central de l’évêque. L’évêque diocésain exerce la charge pastorale du peuple qui lui est confié. Pour cela, il dispose de l’autorité nécessaire, qu’il exerce par lui-même ou par d’autres. Ainsi, pour traiter des faits et comportements délictueux et des conflits au sein de la communauté des fidèles, il doit nommer un vicaire judiciaire et mettre en place un tribunal pour juger en son nom. Il doit veiller à ce qu’il y ait des juges qualifiés et en nombre suffisant pour rendre la justice. Enfin, le droit de l’Église vise la restauration de la justice, l’amendement du coupable et la réparation du scandale. Pour satisfaire à ces buts, l’évêque doit intenter un procès à l’issue de l’enquête préalable sauf si ceux-ci peuvent être atteints par des mesures administratives appelées “remèdes pénaux”. Ces dernières décennies, bon nombre d’évêques ont refusé de recourir aux tribunaux canoniques pour condamner certaines oppositions. C’est notamment la fameuse condamnation de prêtres et de fidèles qui ne sont pas totalement “en communion”. Se réfugier derrière cet arbitraire permet de condamner sans autre procès que le mépris et empêche le condamner de pouvoir faire appel. Car le propre du tribunal, c’est que toute décision est contestable et tout condamné, qui s’estime lésé injustement, a droit de faire appel.