La question des abus sexuels au sein de l’Église se pose aussi en Italie. Sur les 31 000 prêtres exerçant leur ministère, 1 106 seraient ainsi impliqués dans des affaires d’abus. C’est en effet ce que révèle un rapport remis aux médiateurs pour les enfants et les adolescents par le réseau Abuso. Ce rapport souligne aussi les insuffisances des dispositifs de la Conférence épiscopale italienne (CEI). Mais le texte dénonce aussi les incapacités de l’État italien.
Enfin, l’Église dénonce aussi la lenteur excessive dans le traitement des cas individuels: le pape Léon XIV considère que le sujet est sensible. « Sur les 2 414 victimes recensées, seules deux ont bénéficié d’un procès canonique, une a été indemnisée, et sous peine de silence », affirme l’un des responsables de Rete L’Abuso, l’association mise en place par Francesco Zanardi
Des procédures visiblement insuffisantes
La Conférence épiscopale italienne(CEI) a mis en place des permanences diocésaines pour recueillir les signalements d’abus, mais les victimes dénoncent la faible compétence des bénévoles. En effet
Lorsque, des années plus tard, alors qu’elles ont enfin la possibilité de parler des abus sexuels et de les signaler, elles tentent de saisir la justice, l’Église présente sa signature, attestant que la victime était déjà au courant. De toute évidence, il s’agit d’une affaire civile. Le crime est donc prescrit. C’est un système qui utilise les paroles des victimes contre elles.
Des chiffres sur les abus
Le rapport recense 1 106 prêtres impliqués dans des abus sur environ 31 000 en activité en Italie, ce qui représente plus de 3,57 % du clergé. On compterait 4 625 victimes, dont 4451 mineurs (majoritairement des garçons), 515 femmes, 11 personnes handicapées et 156 adultes vulnérables.
Concernant les démarches, sur les 76 procédures canoniques engagées, seules 17 ont abouti à la suspension des prêtres, 7 à une mutation et 18 à une réduction à à l’état laïc. Mais 5 prêtres se sont suicidés. Enfin, dans les 1 056 cas, aucune mesure n’a été prise.
Mais surtout, les diocèses n’ont pas pris le réflexe de transmettre les dossiers à la litigieux à la justice.
L’Église italienne est mise en cause pour un système qui manifeste une certaine inertie. Les diocèses seraient «autonomes», mais se défausseraient sur la CEI, laquelle renvoie au final à Rome…
Mais la difficulté est qu’en Italie, l’État n’agit pas, notamment à travers l’appareil judiciaire, ce qui est aussi révélateur où l’autorité civile a aussi une part de responsabilité dans l’inertie générale. La loi n’impose pas aux citoyens à signaler les abus dont ils auraient pris connaissance. Quant au certificat anti-pédophilie, il exclut de son champ d’application le bénévolat. « L’État est au courant et se tait. Les politiciens ferment les yeux », affirme ainsi Zanardi. Sur le plan judiciaire et pénal, il y aurait eu 155 condamnations définitives, 61 cas prescrits, 20 accords de plaidoyer, 8 non-lieux, 46 poursuites en cours, 6 cas d’avoués et 9 récidives. Le délai moyen avant qu’une victime de violence ne porte plainte serait de vingt-cinq à trente ans, mais cela et trop long par rapport au délai de prescription qui est de vingt ans: au-delà, on ne peut donc exercer une action devant les tribunaux. « Tant que l’État n’aura pas le courage de le dire, les victimes continueront de se heurter à un mur », indique également Zanardi.
