Extrait de l’audience du Pape Léon XIV donnée ce mercredi 14 mai à l’occasion du Jubilé des Eglises orientales
Vous êtes précieux. En vous regardant, je pense à la diversité de vos origines, à l’histoire glorieuse et aux dures souffrances que beaucoup de vos communautés ont endurées ou endurent encore. Et je voudrais répéter ce que le Pape François a dit à propos des Églises orientales: «Ce sont des Églises qu’il faut aimer: elles préservent des traditions spirituelles et sapientielles uniques, et ont beaucoup à nous dire sur la vie chrétienne, la synodalité, la liturgie; pensons aux Pères anciens, aux conciles, au monachisme: ce sont des trésors inestimables pour l’Église» (Discours aux participants à l’Assemblée de la ROACO, 27 juin 2024).
Je voudrais également citer le Pape Léon XIII qui fut le premier à consacrer un document spécifique à la dignité de vos Églises, en raison du fait que “l’œuvre de la rédemption humaine a commencé en Orient” (cf. Lett. ap. Orientalium dignitas, 30 novembre 1894). Oui, vous avez «un rôle unique et privilégié, dans la mesure où il constitue le cadre originel de l’Église naissante» (S. Jean-Paul II, Lett. ap. Orientale lumen, n. 5). Il est significatif que certaines de vos liturgies – que vous célébrez solennellement ces jours-ci à Rome selon les différentes traditions – utilisent encore la langue du Seigneur Jésus. Mais le Pape Léon XIII lança un appel émouvant afin que «la légitime diversité de la liturgie et de la discipline orientales […] redonne […] une grande dignité et une grande valeur à l’Église» (Lett. ap. Orientalium dignitas). Sa préoccupation d’alors est très actuelle, car aujourd’hui, beaucoup de nos frères et sœurs orientaux, dont plusieurs d’entre vous, contraints de fuir leur terre d’origine à cause de la guerre et des persécutions, de l’instabilité et de la pauvreté, risquent, en arrivant en Occident, de perdre, outre leur patrie, leur identité religieuse. C’est ainsi qu’au fil des générations, le patrimoine inestimable des Églises Orientales se perd.
Il y a plus d’un siècle, Léon XIII remarquait que «la conservation des rites orientaux est plus importante qu’on ne le croit» et, à cette fin, il prescrivait même que «tout missionnaire latin, du clergé séculier ou régulier, qui, par ses conseils ou son aide, attirait un Oriental vers le rite latin» serait «destitué et exclu de sa charge» (ibid.). Nous accueillons l’appel à préserver et à promouvoir l’Orient chrétien, en particulier dans la diaspora, où il y est nécessaire de sensibiliser les Latins; en plus de la création, lorsque cela est possible et opportun, de circonscriptions orientales. En ce sens, je demande au Dicastère pour les Églises Orientales, que je remercie pour son travail, de m’aider à définir des principes, des normes, des lignes directrices grâce auxquels les Pasteurs latins pourront concrètement soutenir les catholiques orientaux de la diaspora afin de préserver leurs traditions vivantes et d’enrichir par leur spécificité le contexte dans lequel ils vivent.
L’Église a besoin de vous. Quelle contribution importante peut nous apporter aujourd’hui l’Orient chrétien! Combien nous avons besoin de retrouver le sens du mystère, si vivant dans vos liturgies qui impliquent la personne humaine dans sa totalité, chantent la beauté du salut et suscitent l’émerveillement devant la grandeur divine qui embrasse la petitesse humaine! Et combien il est important de redécouvrir, même dans l’Occident chrétien, le sens de la primauté de Dieu, la valeur de la mystagogie, de l’intercession incessante, de la pénitence, du jeûne, des larmes pour ses propres péchés et pour ceux de toute l’humanité (penthos), si typiques des spiritualités orientales! Il est donc fondamental de préserver vos traditions sans les édulcorer ne serait-ce que par commodité, afin qu’elles ne soient pas corrompues par un esprit consumériste et utilitariste.
Vos spiritualités, anciennes et toujours nouvelles, sont un remède. Le sens dramatique de la misère humaine s’y confond avec l’émerveillement devant la miséricorde divine, de sorte que nos bassesses ne provoquent pas le désespoir mais invitent à accueillir la grâce d’être des créatures guéries, divinisées et élevées aux hauteurs célestes. Nous devons louer et remercier sans cesse le Seigneur pour cela. Avec vous, nous pouvons prier avec les paroles de saint Éphrem le Syrien et dire à Jésus: «Gloire à toi qui as fait de ta croix un pont sur la mort. […] Gloire à toi qui t’es revêtu du corps de l’homme mortel et l’as transformé en source de vie pour tous les mortels» (Discours sur le Seigneur, 9). C’est un don à demander que de voir la certitude de Pâques dans chaque épreuve de la vie et de ne pas perdre courage en se rappelant, comme l’écrivait un autre Père oriental, que «le plus grand péché est de ne pas croire aux énergies de la Résurrection» (Saint Isaac De Ninive, Sermons ascétiques, I, 5).
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On pourrait y voir quelques parallèles avec d’autres spiritualités et liturgies anciennes !
Votre conclusion signifie que, si l’Eglise admet des liturgies particulières chez les chrétiens orientaux, il devrait en être de même pour la messe tradi. Mais il ne faut pas oublier que, dans ces Eglises, une seule liturgie est autorisée et qu’elle est célébrée par tous les prêtres de cette confession. En France, la liturgie tradi est utilisée pour s’opposer à l’évolution de l’Eglise et pour être au service d’une idéologie contre Vatican II et contre l’adaptation nécessaire à la vie d’aujourd’hui. Il ne faut donc pas utiliser les diverses liturgies orientales pour mettre en avant la liturgie d’avant la réforme.