Resté en dehors des grandes querelles du pontificat précédent et plutôt avare en déclarations fracassantes ou même en prises de paroles – ainsi, ses tweets cités jusqu’à plus soif ne sont pour l’essentiel que des retweets, où il relaye des positions prises par d’autres, le cardinal Prevost, devenu Léon XIV, est une personnalité discrète. Néanmoins à travers les sources hispanophones et anglophones pour l’essentiel, il est décrit par des proches ou des collaborateurs, ce qui permet d’établir les grands traits de sa personnalité et les aspects importants à ses yeux.
Décrit par John L Allen Junior sur Cruxnow le 1er mai comme une « personnalité modérée et équilibrée, connue pour son jugement solide et sa grande capacité d’écoute, quelqu’un qui n’a pas besoin de se frapper la poitrine pour se faire entendre », joueur de tennis amateur, sensible à l’humour, d’une grande capacité d’analyse, le cardinal Prevost a su aussi rester discret dans les grandes batailles du pontificat précédent, tellement que sa position n’est pas connue au sujet de Fiducia Supplicans, Amoris Laetitia, Traditionis Custodes – même si la présence de la messe tridentine au Pérou, au Macchu Picchu et à Lima pour l’essentiel, est marginale – ou encore les accords avec la Chine.
Comme le note The Pillar le 2 mai dernier, « l’attitude de Prévost fut façonnée par le vœu d’obéissance qu’il fit lors de son engagement dans l’ordre des Augustins. Il en avait saisi l’importance alors que séminariste, un prêtre âgé lui dit : »jeune homme, il te sera plus difficile de vivre le célibat. Mais plus tard tu verras que vivre l’obéissance est la chose la plus difficile » ».
Citant largement une interview du 4 mai 2023 où Mgr Prevost, nouvellement nommé préfet du Dicastère pour les évêques, affirme qu’un évêque « est un pasteur, pas un gestionnaire », Life Site News déduit qu’il serait opposé à la doctrine, mais ce n’est pas son propos : « les divisions et les polémiques dans l’Eglise ne servent à rien. Nous, évêques, devons surtout accélérer ce mouvement vers l’unité, vers la communion dans l’Eglise. Nous sommes souvent préoccupés par l’enseignement de la doctrine, la manière de vivre notre foi, mais nous risquons d’oublier que notre première tâche est d’enseigner ce que signifie connaître Jésus Christ et de témoigner de notre proximité avec le Seigneur. Il s’agit avant tout de communiquer par la beauté de la foi, la beauté et la joie de connaître Jésus ».
Autre idée importante pour le cardinal Prevost – le service. Il revient sur le sujet dans une vidéo où il affirme qu’un « évêque est appelé à servir. Son autorité est le service […] L’évêque n’est pas censé être un petit prince assis dans son royaume, mais plutôt appelé de manière authentique à être humble, à être proche des gens qu’il sert, à marcher avec eux, à souffrir avec eux, et à chercher des moyens de mieux vivre le message de l’Evangile au milieu de son peuple ».
Dans Religion Digital ce 8 mai la théologienne argentine Emilce Cuda, qui travaille avec lui au Dicastère des Evêques, le décrit comme « l’élu de François » qui le recevait chaque samedi à la résidence Sainte-Marthe. Prevost est aussi « peu loquace et peu expressif, comme tous les Américains [du Nord]. Mais il existe une distinction entre les Latino-Américains et les Nord-Américains : certains soutiennent par la parole, d’autres par les actes. Le cardinal Prevost a la vertu de le faire par les deux ».
Elle revient sur le manque de charisme qui peut lui être reproché : « le charisme ne se résume pas à la capacité de se produire devant un public ; [c’est] la capacité de mobiliser les gens dans une direction et vers l’action sans pression, mais plutôt en parvenant à cette conversion, en s’assemblant ». Elle le décrit aussi comme « une personne courageuse, qui n’avait pas peur de prendre des décisions et d’assumer la responsabilité des conséquences qui pourraient en découler ».
Au Washington Post, le curé William Lego, augustin lui aussi, qui a fait ses études secondaires et universitaires avec le futur Léon XIV, déclare : « je sais une chose à propos de Bob. Il est très perspicace. Il écoute beaucoup de gens. Il ne juge pas trop vite ».
Sur Twitter : migrants, défense de la vie et opposition à l’idéologie du genre
El Comercio, au Pérou, a compilé ses tweets sur le compte @DrPrevost, où il a beaucoup retweeté des messages du pape François et des médias catholiques, ce qui « indique les intérêts qui l’ont animé au fil des ans, notamment une grande préoccupation pour les incidents tels que la mort de Georges Floyd des mains de la police [à l’origine du mouvement social BLM aux Etats-Unis], ainsi qu’un refus catégorique de la peine de mort, des mauvais traitements infligés aux migrants et des reproches directs aux membres de l’administration Trump ».
Il relaye ainsi le 3 février 2025 un article du NCR dont il reprend le titre dans son tweet : « JD Vance a tort : Jésus ne nus demande pas de classer les degrés de notre amour pour les autres », après que le vice-président américain affirme sur Fox News le 29 janvier qu’il « existe un concept chrétien selon lequel il faut aimer sa famille, puis son prochain, sa communauté, ses concitoyens, et ensuite le reste du monde. Une grande partie de l’extrême-gauche a complètement inversé cette idée ». D’autres tweets concernent le changement climatique – El Commercio rappelle qu’il avait affirmé quand il était évêque de Chiclayo que « la domination sur la nature que le Dieu chrétien a conféré à l’homme ne devait pas être tyrannique, mais une relation de réciprocité ».
Le 20 juin 2018, lors du premier mandat de Trump, il a retweeté le tweet du cardinal Cupich selon lequel « il n’y a rien de chrétien, d’américain ou de moralement défendable dans une politique qui arrache des enfants à leurs parents et les enferme. Que cela soit fait en notre nom est une honte pour nous tous ». En 2020, rappelle Commercio dans un autre papier, il était sorti en ville à Chiclayo pendant la pandémie du Covid, avec une croix et d’autres prêtres, pour en bénir les rues.
Dans d’autres messages, « ses tweets donnent également un aperçu de sa position sur des questions épineuses comme l’avortement, quand il partage le 28 décembre 2017 un message du pape François dans lequel il demande de »prier pour tous les enfants qui ne sont pas autorisés à naïtre », ou sur des questions comme l’idéologie du genre, quand il reposte […] une interview de l’archevêque de Trujillo de l’époque qui déclare que cette idéologie déforme les hommes et les femmes »
Go go go Léon ! Make Eglise Great Again !