Le coût très important lié à la visite du Pape – plus de 2 millions d’euros pour une journée à peine, d’après ka prese locale, met de nouveau en lumière la situation difficile de l’Eglise catholique en Corse : le diocèse d’Ajaccio est en effet le dernier de France pour la collecte du denier, et accuse un million d’euros de déficit structurel par an.
Comme l’indiquait le Point le 9 décembre dernier, “chaque année, la curie, qui assure le fonctionnement général du diocèse, accuse un lourd déficit de trésorerie de l’ordre d’un million d’euros. Ses dépenses se chiffrent en moyenne à trois millions, quand ses recettes représentent à peine deux millions d’euros.
La situation préoccupe la direction diocésaine depuis des années. Quelques mois après son installation dans l’île, en 2021, François-Xavier Bustillo avait sollicité une évaluation des finances. Cette initiative avait donné lieu à une visite dans l’île d’une équipe d’auditeurs de la Conférence des évêques de France.
Cet audit avait révélé un état économique très complexe : un écart entre les dépenses et les recettes qui s’accentue au fil des ans, mettant en péril la pérennité financière de l’association diocésaine. Notamment parce que le denier du culte, la première ressource de l’Église, qui couvre surtout le traitement des 11 salariés et des 70 prêtres, ne collecte pas suffisamment de fonds.
Selon l’économat, seuls 545 000 euros ont été récoltés dans l’île en 2023. Le diocèse d’Ajaccio est d’ailleurs le dernier de France pour la collecte du denier : en Corse, région la plus pauvre de métropole, le don moyen est de 162 euros en 2023, contre environ 250 euros pour la moyenne nationale”.
La presse locale confirme ces informations, notamment au sujet du déficit structurel récurrent; et c’est un problème ancien, comme l’écrivait Corse Net Infos en 2015, donnant la parole à l’économe diocésain : “la moyenne des dons a été d’un peu plus de 100 euros au lieu de 90 l’année dernière. Nous sommes les petits derniers par rapport au continent dont le don moyen est à 180 euros. Un peu plus de 1,30 euro par habitant là où la moyenne nationale est à 3 euros. Sans compter avec des diocèses qui sont à 7 ou 8 euros par habitant. On espère que tout catholique baptisé et en âge d’avoir des revenus donnera au denier. Il y a aussi tous les projets que l’église aimerait mener en Corse. Pour l’entretien des bâtiments, on devrait consacrer par an 1 à 1,5 millions d’euros ce dont on est incapable actuellement”.
3800 donateurs au denier dont 800 sur le continent
L’an dernier, le cardinal Bustillo lui-même s’inquiétait de la faiblesse du denier en 2022 : “la Corse est très majoritairement catholique, pour cela nous sommes sur le podium français. En revanche, pour ce qui concerne le denier, nous sommes parmi les derniers.” Malgré les “270 000 personnes” comptabilisées comme catholiques en Corse par l’Église, sur une population de 340 000 habitants, l’évêché comptabilise seulement 3 800 donateurs, “dont 800 sont installées sur le continent”. L’année dernière, le denier de l’Église a récolté un peu plus de 500 000 € en Corse. Un don moyen annuel de 147 € très loin des 243 € octroyés en moyenne sur le continent“.
Une amélioration financière fragile en 2023
Néanmoins les comptes 2023 du diocèse d’Ajaccio montrent une solide amélioration : 708.494 euros de bénéfice, contre un déficit de 374.262 euros en 2022 et 13.0002 euros de déficits en 2021. Il y a aussi des fonds propres assez faibles – en tout, 8 millions d’euros (page 27), dont 2.7 millions d’euros sans droit de reprises, 2.1 millions d’euros d’autres réserves, mais aussi 949.000 euros d’emprunts auprès d’établissements de crédit, 44.242 euros d’emprunts divers, 109.000 euros de dettes fournisseurs, 133.000 euros de dettes fiscales et sociales, 108.000 euros d’autres dettes…
Cette amélioration en 2023 est portée par la hausse des legs, donations et assurances-vie : 371.000 euros collectés… contre 1500 en 2022. Mais aussi, et toujours, par des “cessions d’actifs”, des ventes en clair, pour près d’un million d’euros – dont 532.700 euros de bénéfice exceptionnel net; en 2022, les charges sur le résultat exceptionnel étaient plus de deux fois supérieures (119.841 euros) aux cessions (46.260 euros).
Les charges d’exploitation, elles, ont cru de 2 millions d’euros en un an, et les produits d’exploitation, de 1.1 millions d’euros seulement. Il est indiqué page 42 que “la trésorerie de la Curie étant toujours très tendue, une gestion prévisionnelle a été mise en place par l’économat et le service comptable. La Curie a du de nouveau utiliser l’épargne des paroisses pour payer ses charges“.
Le diocèse est aussi plombé par des affaires anciennes – ainsi, la créance de l’abbé Videau, ex-économe du diocèse de 1986 à 2004 condamné en 2010 à trois ans de prison ferme (huit mois ferme en appel en 2011) pour avoir détourné jusqu’à 2 millions d’euros au préjudice du diocèse et du legs de Mgr Arrighi, court toujours – en 2015, elle avoisinait le million d’euros, et on la retrouve dans les comptes 2023, rangée dans les créances pour un montant 1.009.080.67 euros, puis dans les provisions pour dépréciations (page 10).
On relève encore parmi les 28.722 euros de provisions pour risque une étonnante “provision John Doe” et une autre liée à un litige quant à la remise d’un état à Vico. On retrouve page 37 cette affaire orthographiée différemment (affaire John Doh) avec “6.4 kE d’honoraires liés à l’affaire John Doe contre 33 kE en 2022” et “20 kE de provisions pour risque et charges liées à l’affaire Serre, contre 51K en 2022 (affaire John Doh)“.
Dans les faits significatifs de l’exercice (page 26), le commissaire aux comptes relève aussi le décès de l’économe diocésain Patrick Bouis et l’embauche de Mme Rodeville-Pelletier pour le remplacer, l’audit général du diocèse début 2023, le redémarrage du projet de nouvelle église à Porticcio avec un nouvel architecte – le précédent, d’un coût de 2 millions d’euros, était hors de portée financière du diocèse, seuls 848.000 euros figurent actuellement dans le “fonds dédié Porticcio” (page 28).
Néanmoins les produits du diocèse augmentent peu à peu :
- les quêtes des paroisses ont doublé depuis 2020 : elles s’élevaient alors à 436.000 euros, contre 1.025.000 en 2023
- les dons aux paroisses ont augmenté de deux tiers sur trois ans, passant de 231.000 à 386.000 euros de dons – cependant 71.000 sont liés au remplacement de la statue de la Vierge à Calvi.
- en 2023 la Curie a reçu une aide exceptionnelle de 50.000 euros de la CEF pour les diocèses en difficulté
Entre 2021 et 2022 – deux années où le diocèse d’Ajaccio a creusé ses déficits, de 13.000 euros à 374.262 euros, les charges d’exploitation ont cru de 500.000 euros, et les produits ne suivaient pas à nouveau, avec 350.000 euros d’augmentation. Cette année, le coût de la rupture du contrat avec l’architecte de l’église de Porticcio a coûté (page 26) 44.000 euros au diocèse, alors que 22.000 euros avaient été collectés pour ce projet dans l’année (et 15.000 début 2023) et affectés à un fonds dédié.
Il est indiqué à la page 34 que la Curie a “emprunté” 419.000 euros sur le compte commun des paroisses – où elles avaient déposé 843.000 euros, pour “ajuster ses problèmes de trésorerie”. Il n’y a pas plus de précisions sur l’affaire “John Doe” sinon le montant des honoraires d’avocats versés.
Quand on n’a pas le sou, on n’organise pas à ses frais des fêtes somptuaires. A Vatican, qui n’est pas dans la misère, de payer ses frais de ses déplacement.
N’acceptant pas et rejetant tous les hypocrites, les nuisibles et les malfaisants … loin d’être naïfs, qu’ils aient accepté la visite du pape et dans de telles conditions est incompréhensible ! … Se faire berner n’est pas dans leur naturel, un moment d’égarement sans doute !
R P : 👍
Ce pape, à ce qu’il me semble, pratique la simonie. Et ça vient donner des leçons de morale. Comment voulez-vous que les gens donnent quand leurs contributions risquent d’atterrir dans des poches qui ne sont pas celles qui devraient l’être. Une anecdote pour les livrets A des paroisses : un prêtre de ma connaissance versait le denier du culte sur son livret personnel, le retirait la veille où il devait le reverser à l’évêché. Bricoles, me direz-vous, mais pour moi c’est de la malhonnêteté. Et ça se permettait de me faire la morale parce qu’une fois j’avais démarché une veuve qui désirait souscrire une assurance-vie pour mettre ses enfants à l’abri du besoin si elle disparaissait. Il m’avait reproché de détourner cette veuve de ses devoirs de chrétienne alors qu’étaient présents ce jour-là le père de la dame en question et ses deux enfants. Il faut vraiment être sacrément vicieux ou refoulé pour imaginer des turpitudes là où il n’y en a pas. Depuis je suis toujours croyant mais je me méfie des prêtres donneurs de leçons.