En conférence à la cathédrale de Blois pour les rendez vous de l’Histoire ce jeudi, devant une assistance très réduite – une trentaine de personnes seulement, membres du clergé y compris, sont venues l’entendre discourir sur “la cathédrale dans la ville”, bien qu’il soit précisé qu’il a été “chargé de mission par l’archevêché de Paris pour le réaménagement de Notre-Dame“, le père Gilles Drouin s’est laissé aller à quelques confidences, et notamment a revendiqué la paternité du “geste architectural” voulu par Emmanuel Macron – autrement dit sa tentative d’imposer le remplacement des grisailles de Violet le Duc, épargnées par l’incendie, par des vitraux contemporains.
Propos qui n’ont pas échappé à nos lecteurs qui les ont enregistrés. Vers la fin de son intervention, le père Drouin aborde le sujet des vitraux : “le président voulait laisser sa trace – c’est d’ailleurs moi qui lui ai proposé. […] Un président en France doit laisser sa trace dans le bois ou la pierre“, continue t’il, se rappelant que “la stratégie de Mgr Aupetit s’est heurtée à la décision ministérielle [de Roselyne Bachelot] contre les vitraux ; il voulait s’appuyer sur cette volonté de laisser sa trace pour avoir des vitraux ordonnés à la mission pastorale. C’était un deal gagnant gagnant“.
Questionné par un membre du public qui demandait pourquoi ne pas laisser les verrières de Viollet le Duc puisqu’elles avaient été épargnées par le feu, Gilles Drouin répondait : “je ne vais pas botter en touche vu que j’ai donné des verges pour me faire battre. Selon la Charte de Venise [sur la préservation et la restauration des monuments, que la France a adopté en 1965] on ne remplace les vitraux que s’ils sont blancs, là ce sont des grisailles qui font effectivement partie du projet de Viollet le Duc, le débat est important, et en même temps, et en même temps, Notre Dame s’est en permanence transformée au cours des siècles, non pas par adjonction d’éléments nouveaux, mais en demeurant parfaitement fidèle au projet initial qui demeure lisible […] Elle a connu des changements profonds en gardant l’économie liturgique du Moyen âge“.
Questionné encore sur les vitraux, celui qui affirme “ne plus être impliqué dans le dossier” et “pas dans la commission vitrail” a promis des “vitraux figuratifs contemporains qui représentent des saints parisiens“, citant “Saint Vincent de Paul ou Saint Thomas d’Aquin “.
Ce liturgiste a été de bien mauvais conseil. Sans doute Macron, à l’instar de François Mitterrand, veut-il imposer sa marque. Il n’en a pourtant ni le talent, ni surtout la carrure. Le risque est grand, si l’on en juge par les médiocrités dont on a déjà un avant-goût, de n’avoir que de piètres performances.
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La France n’a pas du tout “adopté” la Charte de Venise, pas plus que d’autres Etats. C’est pourtant ce qu’on entend et lit partout… En réalité la “Charte de Venise” est un ensemble d’orientations qui fournit un cadre international pour la préservation et la restauration des objets et des bâtiments anciens. Elle a été approuvée par le IIe Congrès international des architectes et des techniciens des monuments historiques, réuni à Venise du 25 au 31 mai 1964. La Charte de Venise n’est en aucun cas contraignante.
Toujours cette tentation de servir la soupe aux puissants…ah certes Mgr Aupetit avait à l’époque (et encore ?) besoin d’indulgence(s) ?
M. Deslandres, ce que vous écrivez est vrai pour le début, faux pour la fin. La Charte de Venise a été adoptée dès l’année suivante, en 1965, par le Conseil international des monuments et des sites (ICOMOS). Cette association mondiale se compose de comités nationaux. Le comité national français de l’ICOMOS a notamment pour membre le ministère de la Culture, à travers la Direction générale des Patrimoines et de l’Architecture. Donc, de fait, l’État français est tenu de respecter la Charte de Venise, comme d’autres engagements internationaux, à moins de la dénoncer officiellement et de quitter l’ICOMOS, ou de faire adopter une nouvelle charte avec des dispositions différentes.