La Nouvelle-Zélande a aussi eu son équivalent de la CIASE qui vient de rendre un rapport après six ans de travaux sur les abus commis de 1950 à 1999. Le bilan, toutes églises chrétiennes confondues, est particulièrement lourd – les auteurs, sur la base des 3000 témoignages reçus, des archives, des auditions et de leurs travaux, concluent que 200 000 enfants ont été abusés sur cette période.
“«L’autorité morale et la fiabilité présumées du clergé et des chefs religieux ont permis aux abuseurs des institutions confessionnelles de commettre des abus et des négligences en toute impunité», affirme le rapport de la commission royale d’enquête sur les abus. La démarche indépendante a été lancée en 2018 pour révéler l’étendue et l’impact continu des abus au sein des institutions destinées à protéger les enfants. Elle a porté principalement sur la période allant de 1950 à 1999, mais des personnes ayant subi des abus après 1999 ont également témoigné.
Le rapport final, qui pèse 14 kg, a été rendu public le 24 juillet 2024, au Parlement de Wellington, où sont venues de nombreuses victimes. Il est le résultat de plus de 100 jours d’auditions publiques, de près de 3000 témoignages et de plus d’un million de documents reçus à titre de preuve. Il a été fait état de «honte nationale» après que le rapport ait déterminé qu’environ 200’000 personnes ont subi des abus sexuels ou corporels dans les institutions, rapporte The Guardian.
«La maltraitance et la négligence dans le cadre de la prise en charge ont eu des répercussions à vie sur les victimes, a déclaré Arrun Soma, conseiller de la commission. De nombreuses victimes sont décédées alors qu’elles étaient prises en charge ou se sont suicidées par la suite. Pour d’autres, les conséquences des abus se poursuivent et s’aggravent, rendant difficiles les activités et les choix quotidiens.»
Dans ce cadre, les institutions religieuses et particulièrement catholiques sont montrées du doigt. Le rapport indique que 42% des personnes prises en charge par des organisations confessionnelles, toutes confessions confondues, ont été victimes d’abus. L’Église catholique en Nouvelle-Zélande avait relevé, lors d’une réunion d’information organisée en 2020 à l’intention de la commission, que des accusations avaient été portées contre 14 % de son clergé au cours de la période couverte par l’enquête [ soit un clerc sur 7, un taux anormalement haut, si l’on compare avec les indicateurs dans divers pays européens où des commissions ont été menées sur les abus]
«Les croyances religieuses ont souvent été utilisées pour justifier les abus et la négligence, et pour réduire les survivants au silence, a souligné la commission. Des processus décisionnels hiérarchiques et opaques ont empêché les enquêtes et les plaintes». Dans de nombreux cas, il était demandé aux survivants qu’ils pardonnent et les abuseurs faisaient uniquement face à l’exigence de se repentir. De nombreux agresseurs ont en outre été déplacés et ont continué à commettre leurs forfaits dans d’autres institutions.
Arrun Soma a demandé que les institutions confessionnelles se retirent du domaine de la prise en charge et adoptent, au niveau de la pastorale, les normes nationales et des procédures de plainte transparentes“.