L’on apprend de la presse catholique suisse que si plusieurs diocèses (notamment Sion, Lausanne-Genève-Fribourg, ou Bâle) sont engagés à lutter contre les abus et vont en partie suivre le chemin français – création d’un futur tribunal pénal canonique interdiocésain suisse, cellules d’écoute dans les diocèses, célébrations mémorielles, suspension des prêtres et prélats concernés… – les protestants, eux, continuent à nier le problème et à regarder ailleurs.
“L’Église évangélique réformée de Suisse (EERS) ne déboursera pas 1,6 million de francs pour mener une grande enquête sur les abus sexuels. Le Synode, réuni à Neuchâtel, a retoqué le 11 juin 2024 la proposition du Conseil d’effectuer une ‘enquête en population’ sous forme d’un sondage auprès de 20’000 personnes. Le Conseil de l’EERS aurait souhaité mener une «enquête en population», auprès de 20’000 personnes au sein de la société suisse. L’objectif de l’exécutif était d’obtenir des informations fiables pour cerner l’ampleur des abus. Cette étude aurait été menée par l’Université de Lucerne“.
La balle est renvoyée… à l’Etat : ‘‘Les membres du synode n’ont pas été convaincus par la nécessité de sonder la population au-delà des rangs protestants. Pour eux, une telle tâche d’envergure devrait plutôt revenir à l’État. Ils ont ainsi demandé au Conseil de l’EERS de se tourner vers la Confédération pour solliciter une telle enquête à large échelle“.
En revanche, un centre de contact national pour les victimes d’abus sera tout de même créé.
Peut-être les protestants suisses ont-ils peur de trouver en enquêtant des milliers de cas d’abus, comme leurs coreligionnaires en Allemagne : un rapport rendu public au début de l’année par l’EKD, organisation cadre de 20 églises régionales qui représente plus de 19 millions de fidèles, a mis au jour 1259 auteurs d’abus pour 2225 victimes ces dernières décennies, estimant le nombre total de victimes à plus de 9500 et d’auteurs à près de 3500. Comme quoi, l’argument éculé comme quoi il suffirait d’autoriser le mariage des prêtres pour que cessent les abus s’avère, une fois de plus, faux.
Sans connaître bien la situation propre aux protestants en Suisse, je suis d’accord que faire un sondage en population n’est probablement pas une bonne chose.
Les sondages sont ce qu’ils sont. Les enquêteurs qui doivent rester neutres, sont dépendant de la bonne foi de leur interlocuteur.
D’autre part, c’est d’une grande violence de poser ce genre de questions intimes par téléphone, et devoir y apporter une réponse en quelques secondes.
Comment obtenir une réponse fiable? Entre refus de réponse, déni, exagération… tout est possible.
Si c’est par internet, la fiabilité des profils et des réponses est encore plus douteuse…
Si c’est avec un enquêteur en face à face, comment pourras-t-il gérer les effondrements des personnes, sans formation ni temps dédié…