Le diocèse de Bayeux-Lisieux, en Normandie, sait-il que faire de son patrimoine religieux ? Après la bibliothèque du séminaire dispersée en catimini et des objets religieux du XVIIIe vendus à vil prix par un (désormais ex-) salarié, voilà une des deux cathédrales du diocèse transformée en salle de spectacle…et ce, dans l’espace où se trouve l’autel.
Un de nos lecteurs a assisté à la répétition générale, et pris des photos, voici son témoignage :
“La répétition générale avait lieu sur l’estrade du maître autel de la messe nouvel ordo – les deux chandeliers et la croix y étaient et n’ont pas été retirés, et cela n’empêchait pas les artistes – qui viennent d’un conservatoire de Seine-et-Marne et dont c’est la première représentation dans cette cathédrale – de hurler, se trémousser, rire, voire manger à côté.
Le sacristain, qui décrit le grand ostensoir néo-gothique à émaux, posé sur un thabor, à droite en entrant dans la sacristie, comme un “tas de tôle” (sic) – n’était pas plus ému que ça de ce manque de respect flagrant de l’espace sacré.
Par ailleurs des artefacts de la pièce posés sur un linge consacré orné d’une belle croix brodée, la sono était sur les marches de l’autel et le synthetiseur juste au pied, la sacristie et le couloir à côté étaient transformés en débarras et vestiaires – sous le regard réprobateur d’une statue du saint curé d’Ars grandeur nature, et le tout en pleine connaissance de cause.
La feuille de route des artistes – qui indique scène par scène, tableau par tableau, que faire et où se placer mentionne bien le présence de l’autel, son emplacement y est défini comme une “estrade“.
La représentation aura lieu ce dimanche 7 avril à 15 heures“.
Certes – il s’agit d’une oeuvre d’inspiration religieuse – le Dialogue des Carmélites de Poulenc (1953-56) reprend un scénario posthume de Bernanos adapté à la scène en 1952.
Même d’inspiration religieuse, les manifestations culturelles dans des églises ne peuvent pas tout se permettre
Mais même dans ce cas, visiblement, le diocèse de Bayeux-Lisieux et les responsables de la paroisse de Lisieux ignorent la réglementation tant romaine que française sur les concerts dans les églises.
Le document romain intitulé “Éléments de réflexion et d’interprétation des normes canoniques” (5 novembre 1987), préparé par la Congrégation romaine pour le Culte divin, indique à ce sujet que même si la manifestation culturelle ou artistique est d’inspiration religieuse, “on n’occupera jamais le chœur de l’église et on respectera en toute circonstance l’autel, l’ambon et le siège du célébrant. Le Saint Sacrement aussi sera respecté voire transféré en un autre lieu”.
Il est complété, entre autres, par un document de l’archevêché de Paris du 29 avril 1988. Ce dernier précise “la mise en place d’équipements lourds (estrades, praticables, colonnes de sonorisation, dispositifs d’éclairage) demandant des jours d’installation, suffit à transformer une église en salle de spectacle : même pour l’exécution d’œuvres »religieuses« à des fins même très louables, ce détournement doit être, normalement, refusé. Car l’assimilation de l’édifice religieux à un simple équipement culturel est d’autant plus tentant que, pour beaucoup, le phénomène chrétien est en voie de liquidation. »
Plus récemment, le diocèse de Châlons en Champagne a publié un guide des concerts dans les églises qui a le mérite d’être clair et concis – deux pages – à destination des organisateurs de manifestations culturelles dans les édifices affectés au culte.
Il y reprend l’impératif romain de respecter l’espace sacré où l’on célèbre la messe et celui du tabernacle s’il est ailleurs : “le pupitre où l’on proclame les lectures (l’ambon), le tabernacle, le siège du prêtre, sont du mobilier liturgique, ils doivent être respectés et ne pas être utilisés lors des manifestations culturelles. Tout comme l’autel qui pour les chrétiens représente le Christ“.
Tout cela est on ne peut plus clair. Par ailleurs les dimensions imposantes de la cathédrale de Lisieux – 110 mètres de long, 30 de large – permettent aux artistes de se mettre ailleurs que dans le choeur. Et la ville compte une ancienne église, désaffectée, de grande taille, servant à diverses manifestations culturelles – un lieu qui semble nettement plus adapté à un opéra que l’autel d’une cathédrale.
Cela semble évident – mais peut être pas aux responsables de la cathédrale de Lisieux – nous avons donc sensibilisé Mgr Habert à ce sujet.
Photos issues de la feuille de route des artistes.
Qu’attendre de plus de ces fidèles – clercs y compris – qui désacralisent les sanctuaires et viennent ensuite se plaindre que les catholiques préfèrent rester chez eux plutôt qu’aller à l’église ? Les sanctuaires sont entre les mains d’idéologues qui refusent obstinément de voir que la chute de pratique dominicale n’est que l’écho des fadaises qu’ils imaginent en croyant qu’elles vont attirer des croyants.
Vous semblez n’avoir pas compris le sens de cette œuvre ni sa réalisation, qui commémore le sacrifice et le martyre des Carmélites de Compiègne lors de la Révolution Française.
L’autel est bien la pierre d’angle, le Christ sur lequel s’appuient ces sœurs, certes représentées par des personnes non consacrées mais portent avec respect et humilité les tenues authentiques de Carmélites.
L’estrade dont vous parlez n’est pas l’autel, qui n’est pas « utilisé » sinon comme présence permanente du Christ., mais bien l’estrade, mot d’ailleurs écrit en début de cet article. Cette estrade, rappelons-le, est une reprise de celle présente dans les synagogues. Notre Seigneur assurément ne doit que se réjouir d’y voir des personnes y prendre place pour chanter des cantiques (en latin) à Sa gloire, à celle de Sa mère ou de la santé Trinité.
Le matériel, minimaliste, a été conçu pour respecter les lieux sacrés.
Les hurlements dont vous parlez sont les vociférations de révolutionnaires, dont vous noterez le parallèle avec le « Crucifie-Le » de la lecture de la Passion.
Je passe sur le reste, le tissu brodé l’étant par les soins d’une choriste, etc. Vous êtes bien prompt à juger sans bien vous renseigner.
La pièce commence, je vous laisse, que l’Esprit généreux nous soutienne et vienne emplir le cœur de tous les présents à cette œuvre éminemment spirituelle.
Les intentions peuvent être les meilleures – l’enfer en est pavé. Par ailleurs une église n’est (normalement) pas un théâtre, et dans tous les cas comme le précisent les textes romains et français l’espace autour de l’autel est sacré et doit être respecté, les objets du culte retirés, le saint sacrement transféré.
Ce n’est pas votre présence qui est critiquée mais que des (ir)responsables d’Eglise locaux ne savent visiblement plus que faire de leurs églises et ont perdu tout sens du sacré…
Bonjour Pierre,
c’est sûrement une très belle pièce, qui serait très bien dans un auditorium ou un théâtre, ou même une salle paroissiale.
La liturgie vient initialement des visions de Moïse, qui a reçu pour instruction de refaire sur la Terre ce qu’il avait vu du Ciel (cf livre des Nombres et du Lévitique). Bien sûr le sacrifice du Christ remplace désormais tous les sacrifices. Il reste que la liturgie est un moment où le Ciel touche la Terre. Et l’eucharistie, c’est l’actualisation du Golgotha. Effectivement, si ça ne vous parle pas, on ne peut que donner raison à RC, et constater la perte du sens du sacré. Si vous avez des responsabilités dans le sanctuaire de Lisieux, il conviendrait peut-être de les rendre, ou qu’un supérieur vous les retire, le temps que vous vous renseignez sur l’histoire de l’Eglise et sa raison d’être.
Fondamentalement, une église, c’est un sanctuaire pour honorer Dieu, pour un coeur à coeur avec Dieu, pour communier au sacrifice du Christ. C’est un espace sacré. Donc, étymologiquement, “séparé”, “mis à part”.
Pour d’autres témoignages du sacré, on vous propose d’aller jouer une pièce de théâtre dans une mosquée. On peut parier que les responsables des lieux vous diront, plus ou moins poliment, que c’est très bien de faire des spectacles… à côté. Mais pas sur le lieu même. Même si vous chantez de très jolies choses.
Cela étant, ce serait normalement à l’évêque de Lisieux ou son représentant de vous expliquer ce genre de choses. Ca vaut peut-être le coup de les contacter, il n’est pas certain que vous en preniez l’initiative.
PS : au-delà de la rebuffade que vous ressentirez sûrement, prenez quand même le temps d’y réfléchir. Votre responsabilité dans cette affaire semble bien engagée. Parlez-en quand même à un responsable catholique qui a autorité sur le lieu. En tous cas je vous le souhaite, et je lui souhaite qu’il soit conscient de ses propres responsabilités.
2e PS aux lecteurs de RC : on n’est pas dans le cas de la soirée des handballeuses de Metz, mais c’est le début d’un même processus. Un chapelet public de réparation ? Qu’en pensez-vous ?
Il n’y a pas eu de profanation – ni en intention, ni en matière, puisqu’il s’agit d’une pièce religieuse. Donc il n’y a pas lieu à prière.
Néanmoins il est toujours bon de prier pour ces responsables d’églises normands (et autres) qui errent dans les ténèbres…
Il faut signaler malgré tout que chaque année début octobre la Fraternité St Pie X organise un pèlerinage à Lisieux qui se termine par la célébration de la mese dans la cathédrale de Lisieux.
La messe traditionnelle est célébrée dans la cathédrale de Lisieux une fois par an.
La seule question qui vaille d’être posée est “quelle est la destination d’une église” ? Et la seule réponse qu’on peut donner est : “à célébrer la liturgie de l’Eglise.” Et il faudrait juste rappeler que l’accès au sanctuaire (habituellement appelé “choeur”) n’est réservé qu’aux ministres de l’autel : prêtres, diacres, servants. On déplore la perte du sacré et de la transcendance. Comment pourrait-il en être autrement quand les édifices exclusivement réservés à Dieu (il faut relire dans le missel les prières de la messe de la dédicace) servent de salles de concerts ou de scènes de théâtre ? Les théologiens, les historiens et les sociologues ont écrit à ce sujet des ouvrages qu’il faudrait prendre le temps de lire et de méditer. Bien entendu, il ne s’agit pas de “juger” les intentions des metteurs en scène ; il s’agit simplement de rappeler qu’un lieu de culte – fait pour abriter la présence réelle de Dieu – n’est pas une salle de spectacle.
« Fondamentalement, une église, c’est un sanctuaire pour honorer Dieu, pour un coeur à coeur avec Dieu, pour communier au sacrifice du Christ. C’est un espace sacré. Donc, étymologiquement, “séparé”, “mis à part”. »
Mises à part, c’est bien la vocation de ces religieuses Carmélites, dont le martyre a été actualisé hier.
Rassurez-vous je n’ai pas de responsabilité ecclésiale, bien que rappelant parfois aux liturgies que l’anamnèze doit s’adresser au Christ et non parler de lui, que le Gloria n’est pas un chant mais une hymne, etc. et aux organistes (souvent païens) de respecter les silences liturgiques plutôt que de (se) ruer sur leurs claviers et pédalier.
Quant à la perte du sacré, je la déplore depuis que j’ai l’âge de raison. Mais de là à comparer la maison de Dieu avec une mosquée, il y a de la marge, entre un dieu qui prône le mensonge et un Dieu qui n’a jamais menti. Je suis au courant de la différence de traitement et du laxisme de nos chers compatriotes face aux trois religions du Livre notamment. Le Christian bashing n’est pas nouveau !
Un chapelet en public ? Rappelons-nous de la parole de notre Seigneur au mercredi des Cendres. La prière n’est pas une provocation. Mais se mettre à genoux et prier en réparation, c’est exactement ce que la jeune Sœur Constance propose dans cette œuvre.
Le Ssint-Sacrement a été respecté, rassurez-vous, même s’Il en voit bien d’autres chaque jour ailleurs.
Enfin, cette pièce dans un gymnase ou autre lieu purement laïque serait une erreur de jugement. Ce serait entrer dans la démarche de ceux qui faisaient des églises en béton brut de décoffrage pour que les gens s’y sentent comme chez eux. Ou en colonne tronquée pour y attirer, qui sait, les FM?
En France il est rare qu’une œuvre liturgique soit à sa place. Un Requiem ou une Messe en Si devrait être utilisée au service de la liturgie plutôt qu’en pièce maîtresse d’un concert. Cependant cela permet parfois à des gentils de découvrir la (beauté de la) spiritualité chrétienne.
Ne soyons pas plus royaliste que le roi. C’était hier le dimanche de la Miséricorde, cette pièce y a contribué je pense. Tandis que le lecteur à l’origine de l’écriture de cet article a enfreint des interdictions pourtant bien exposées en entrant dans l’espace de la sacristie et y prenant et publiant des photos au risque de mettre en péril, par la convoitise de certains, son contenu. Que Dieu accorde qu’il n’y ait aucune conséquence fâcheuse à cet acte qui trouvera bien sa place dans le pavage que vous citez plus haut.
Fraternellement en Christ,
Pierre
PS merci pour la proposition de réflexion qui n’engendre de rebuffade qu’à ceux qui tiennent plus à leur conviction qu’à la recherche de la vérité (qui rencontre l’amour quand justice et paix s’embrassent). Le discernement est une grâce à demander chaque jour.
@Denis, vous voilà bien défaitiste et généralisant. Levons la tête, le monde est déjà sauvé. Il y a heureusement des milliers de sites religieux où laïcs et consacrés œuvrent dans le bon sens. Mais qui sommes-nous pour en juger, en fait?
Bonjour. pour info les mystères du Moyen Age au debut etaient joués sur l’autel et dans le choeur. Mais oui. Je pense que les Dialogues de Bernanos et Poulenc sont l’équivalent d’un Mystère du Moyen Age et comprends très bien qu’ils aient leur place dans l’église.
Depuis le nouvel ordo : le prêtre qui arrive dans l’église en patin à roulette, la messe rock and roll avec la sono à fond, les défilés de mannequins qui confinent au ridicule, les concerts sataniques, la récitation des sourates de mahomet, la farandole autour de la grosse caisse, les mimes d’un combat d’escrime par le prêtre au moment de l’eucharistie comme je l’ai vu, les hurlements des sans culottes républicains, etc … ces exhibitions autorisées et banalisées dans le chœur ne sont rien d’autre que des concélébrations qui vont avec la messe conciliaire Paul6.
Le sacré, le respect du Christ, du chœur de nos églises avec la messe catholiques traditionnelle, des sacrements, du catéchisme, de la morale, ils n’en ont même plus la notion. Ils ne pensent pas non plus aux enfants qui les observent et aux fidèles qui ont gardé la Foi.