En France, d’après une décision du Conseil d’Etat le 2 février dernier, les diocèses peuvent s’opposer à la radiation d’une personne des registres des baptêmes, mais en Belgique, où les cultes disposent d’un financement public, la justice vient d’obliger le diocèse de Gand en Flandre à radier un fidèle du registre des baptêmes :
“La Chambre contentieuse de l’Autorité de protection des données (GBA) a décidé le 19 décembre 2023 que le diocèse de Gand devait radier une personne baptisée du registre des baptêmes. Le diocèse de Gand a reçu en 2021 une demande de radiation des archives paroissiales. Le plaignant a invoqué la législation sur la protection de la vie privée (RGPD). Le diocèse a rejeté la demande, affirmant que seule une note peut être ajoutée dans le registre des baptêmes concernant le souhait de quitter l’église. La GBA a maintenant statué contre le diocèse. Selon Hielke Hijmans , président de la Chambre du contentieux, l’Église a certes des intérêts légitimes à conserver les données, mais toutes les conditions ne sont pas réunies pour un traitement à vie des données”.
Dans sa décision, la GBA avait retenu l’intérêt légitime pour l’Eglise de tenir un registre des baptêmes, pour éviter les fraudes – le baptême ne peut avoir lieu qu’une fois, mais avait écarté cet intérêt légitime au profit de l’intérêt du plaignant :
- “D’une part, il n’est pas toujours possible de vérifier si le baptême a eu lieu ou non, car le registre n’est tenu sur papier qu’au sein d’une seule paroisse (où le baptême a eu lieu). Le traitement des données tel qu’il est réalisé aujourd’hui n’empêche donc en fait pas qu’une personne reçoive deux fois le même sacrement et n’est donc a priori pas adapté pour atteindre le but recherché.
- En revanche, la conservation à vie de toutes les données du plaignant – y compris celles qui ne sont pas strictement nécessaires pour déterminer si une personne a déjà été baptisée – est disproportionnée dès lors qu’il indique expressément qu’il souhaite se distancier de l’Église catholique. Selon le GBA, dans ce dossier, les intérêts du plaignant priment sur ceux de l’Église“.
Le diocèse de Gand a fait appel de cette décision mi-janvier 2024, l’affaire est portée devant une chambre spécifique à la cour d’Appel de Bruxelles. Dans son mémoire, le diocèse s’appuie sur une décision contraire prise par le même type d’autorité de protection des données privées en Irlande, en application de la RGPD européenne : “Nous avons été très surpris par cette décision, car le GBA d’Irlande avait pris la décision inverse il y a quelques mois dans une plainte contre l’archidiocèse de Dublin. Nous pensons donc qu’il existe suffisamment d’arguments pour défendre notre position devant les tribunaux. La protection des données est une loi européenne“.
L’église de Belgique constate depuis plusieurs années, sous la pression de divers lobbys laïcistes – mais aussi de l’effondrement total du catholicisme dans le pays, une forte augmentation des demandes de “débaptisation“, bref, de radiation des registres de baptême : “le dernier rapport annuel de l’Eglise de Belgique, publié le 30 novembre [2022] fait état de 5 237 demandes de ce type en 2021, contre 1 261 en 2020 et 1 800 en 2019“.
Dommage ! Mais il a quand même été baptisé, et la “Justice” n’y changera rien …