Erigée en abbaye en 2021, l’abbaye Sainte Marie de la Garde (Saint Pierre de Clairac) a été fondée par l’abbaye Sainte Madeleine du Barroux en 2002. Les moines entreprennent la construction de leur chapelle.
Dans la dernière lettre aux Amis de l’abbaye, le Père Abbé, Dom Marc Guyot, publie le discours qu’il a donné Lors de l’inauguration du chantier en août dernier :
Bien chers amis,
Quelle joie ! Vous voir venus si nombreux !
La communauté en est comblée de gratitude. Plus encore, le Seigneur lui-même s’en réjouit. À cette heure, il nous donne de vivre tous ensemble un moment unique, des instants de grâce. Oui ! en ce début du xxie siècle, il s’agit pour nous de poursuivre humblement mais sûrement l’œuvre multiséculaire des moines bâtisseurs. Nous voulons nous inscrire dans l’enthousiasme de nos anciens, et dans leur sillage, faire sortir de terre et élever en ce lieu – en cet écrin de verdure, en ce jardin de lumière et de paix bénédictine – une Abbaye nouvelle. Quelle merveilleuse aventure, quel défi et quelle mission, quelle responsabilité aussi ! Voilà pourquoi, d’ici quelques minutes, unis par l’amitié et le cœur gonflé d’espérance, nous allons tous demander à Dieu de bénir le chantier de Sainte-Marie de la Garde afin qu’il le mène à bonne fin et selon ses vues à Lui.
Mais avant cela, j’aimerais vous confier les trois grandes directions qui vont accompagner ce chantier un peu hors du commun, les trois fortes convictions qui aujourd’hui habitent et palpitent au cœur de notre communauté.
La première, c’est que nous voulons bâtir cette Abbaye sur le roc. Et de fait, notre entreprise de terrassements est parvenue en un temps records à atteindre la roche dure. Quant aux fondations, elles seront tout en granit. Mais au-delà de ces aspects techniques, une signification spirituelle ne doit surtout pas nous échapper. En ce début de millénaire, le sol de notre monde contemporain semble ici et là se fissurer. Il y a aujourd’hui comme une tectonique des plaques qui fragilise les soubassements de notre société, qui ébranle les intelligences, les consciences et les cœurs. À tel point que beaucoup de jeunes générations sont comme tiraillées : d’un côté, on leur propose le bien-être matériel et la consommation sans frein, et dans le même temps, les jeunes ressentent de plus en plus dans leurs âmes une angoissante quête de sens, un besoin d’intériorité – autant dire, le besoin de Dieu et de sa paix. Face à ce malaise, l’Évangile, mais aussi la Règle de saint Benoît nous le rappellent avec une actualité déconcertante : seul Jésus peut être le roc de notre vie, seul Jésus mène à la rencontre de Dieu et à la découverte du vrai sens de l’existence, seul Jésus nous conduit à la joie de la vérité et au bonheur intérieur véritable. Chers amis, vous comprenez mieux maintenant pourquoi il nous tient tant à cœur de bâtir ce monastère solidement, sur le roc qu’est Jésus-Christ, notre Dieu et notre ami.La deuxième conviction qui habite notre communauté, c’est que nous devons bâtir une Abbaye qui soit belle ! Cela vous explique pourquoi Sainte-Marie de la Garde sera intégralement bâtie en pierre massive ; cela vous laisse aussi deviner ce qui va bientôt se vivre ici : des arrivages de blocs de granit et de calcaire ; des tailleurs de pierre locaux taillant, polissant, justant, marquant chaque pierre posée de leur talent, de leur passion, de leur amour du travail bien fait. Et puis, il faudra aussi que la lumière du ciel coule à flots dans les espaces du cloître, du réfectoire, du chapitre, de l’habitat monastique ; il faudra qu’il y ait un peu des couleurs du paradis qui passent à travers des vitraux sortis des mains d’un maître-verrier lot-et-garonnais. Mais direz-vous, pourquoi tout cet effort artistique ? Comme nous l’a souvent enseigné notre bien-aimé Fondateur, Dom Gérard, les moines bénédictins doivent être des amoureux d’une architecture qui chante et rayonne la beauté, l’harmonie, l’équilibre, la noblesse presque paysanne, la grandeur simple… Fort de cela, chers amis, j’en suis absolument convaincu : seule la beauté subsiste, seule la beauté peut rendre hommage à Dieu qui est lumière et splendeur si attirante. Certes, le beau enrichit le patrimoine, mais il redonne surtout l’espérance. Et justement, notre monde actuel, notre jeunesse, les futures vocations monastiques elles-mêmes, ont besoin du beau pour cheminer vers le Seigneur. Voilà pourquoi l’esthétique de notre Abbaye aura pour mission de témoigner que le beau, avec le vrai et le bien, apporte à tous la joie, apporte la paix.
Enfin, la dernière conviction qui vit dans notre cœur à tous, c’est que la nouvelle Abbaye devra être visible de très loin. Oh bien sûr ! elle le sera, par ses toitures, par son clocher. Mais ce n’est pas seulement de cette visibilité-là dont il s’agit. Non. Je pense ici à ce que les gens du premier siècle après Jésus-Christ voyaient et disaient des tout premiers chrétiens : « Voyez comme ils s’aiment ! » Eh bien ! Il faudrait que toute personne venant à l’Abbaye, entendant parler de l’Abbaye, désirant faire plus ample connaissance avec elle, s’intéressant même à ce magnifique projet de construction, puisse dire à son tour : « Voyez comme cette communauté s’aime ! Voyez comme rayonne ici la charité. Voyez comme l’amour de Dieu et une unité profonde sont le trésor et le secret des moines qui habitent et prient ici ! » Et de fait, c’est précisément ce à quoi saint Benoît nous invite dans sa Règle : apprendre jour après jour à nous aimer les uns les autres, comme le Christ lui-même nous aime. Et si nous faisons cela, si à Sainte-Marie de la Garde l’accueil, l’attention, la compassion, la bonté, la compréhension ne sont pas de vains mots, alors l’Abbaye sera toujours plus honorée d’amitiés solides et pour ainsi dire indestructibles. Mieux encore, l’Abbaye sera vraiment dans l’élan missionnaire et aura une place de choix dans l’évangélisation du monde.
Chers amis, et ce sera le mot de la fin : en entrant vous-mêmes dans cette aventure, aidez-nous à bâtir sur le roc de la foi, aidez-nous à faire étinceler le beau de l’espérance, aidez-nous à faire de ce lieu, un lieu où Dieu soit aimé et prié, un lieu où l’on puisse apprendre toujours de nouveau ce que signifie aimer en vérité.
Dans sa chronique, l’abbaye a indiqué avoir eu la joie deux jeunes entrés au noviciat en octobre dernier : Charles et Ricardo.