Il n’est pas inutile de s’intéresser à la personnalité du premier directeur laïc de Saint-Stanislas de 1976 à 1999, époque où ont lieu de nombreux abus dans l’établissement, y compris entre élèves, et ceux qui ont conduit au suicide d’un ancien élève en juillet 2024, après lequel une enquête a été ouverte par le parquet de Nantes – et ce bien que la conférence de presse du diocèse l’ait quelque peu oublié, au grand étonnement de nombreux anciens élèves victimes ou témoins d’abus dans l’établissement nantais. A son départ précipité au printemps 1999, dans des conditions que l’enseignement diocésain de Nantes n’a pas (encore) rendu publique, l’éphémère député Dominique Pervenche se replie sur ses entreprises de confection, dont certaines ont eu des activités étranges, documentées par des titres locaux aujourd’hui disparus.
Il a en effet constitué un groupe avec des sociétés entre les Deux-Sèvres, les Vosges et le Castelbriantais, arrière-pays industriel de Nantes, notamment :
- DEVIL MODE (sic), à Mauléon dans les Deux-Sèvres, créée en 1987, fermée au milieu des années 2000
- Confection Atlantic à Château d’Olonne en Vendée,
- Odegam88 à Saulxures sur Moselotte (88), radiée en 2017 et inactive bien avant
- Edwimode à Erbray, reprise en 2002 à son ancienne patronne, Edwige Michel (d’où le nom), bilan déposé en 2006.
Cette dernière entreprise avait été fondée en 1979 rue de la Trinité à Châteaubriant, sous des noms variables, Mondy Extension, SMC, IDF et Edwimode. En 1997 elle déménage sur la zone d’Erbray dans un bâtiment construit pour 2.1 millions de francs par la communauté de communes, dont 422.000 francs d’aides diverses – elle a alors 41 salariés. En 2001 Dominique Pervenche en devient directeur (et en 2003 pour Confection Atlantic). Avant lui, Edwimode fabrique des vêtements pour « de gros clients comme une grande enseigne sportive [Decathlon] ou des franchisés« . Mais cette production se retrouve délocalisée dans les pays de l’est puis en Asie, et l’ex-directeur de Saint-Stanislas la réoriente vers « des vêtements de collection destinés à être présentés dans des salons par des représentants« , ainsi que des vêtements pour l’hôtellerie-restauration.
Le 5 mai 2004, la Mée socialiste, un périodique disparu depuis 2021 qui paraissait dans le pays de Châteaubriant et consacrait ses pages à l’actualité locale politique et économique consacre un petit entrefilet à Edwimode, usine qui connaît déjà des difficultés, et révèle ce qu’elle produit vraiment : « quand on fait des nappes, ce n’est pas bon signe », disent les salariées de l’usine de confection Edwimode sur la zone industrielle du Bignon à Erbray. De fait, en ce moment il n’y a pas une importante charge de travail et les salariées sont occupées à faire des T-shirts de qualité inférieure pour mise en vente chez des soldeurs. Elles fabriquent aussi… des culottes à pression, semblables à celles des couches pour bébé, avec des coccinelles dessus et des petits mots doux. Elles sont destinées, paraît-il, à un bon client fournisseur de sex-shops« .
Dominique Pervenche et ses salariées : pour l’application de la doctrine sociale chrétienne, on repassera
Seulement, la fabrication de vêtements d’enfants pour sex-shops parisiens et autres éléments de ce qu’on appelait pas encore la fast fashion n’a pas suffi. En novembre 2005, Confection Atlantic est placée en redressement judiciaire, et en décembre les salaires ne sont pas versés à Erbray, où en janvier, Dominique Pervenche annonce un « dégraissage » (la Mée socialiste, 25 janvier 2006) ainsi que la délocalisation de ses entreprises en Chine. Dans la presse locale, les 1-2 avril 2006, Dominique Pervenche annonce »un quart de salariés en moins en Vendée et à Erbray », mais promet d’y maintenir 25 à 30 emplois.
Seulement, deux mois plus tard, le 21 juin 2006, la Mée socialiste aborde le cas d’Edwimode : « beau parleur également M. Pervenche de la société Edwimode à Erbray qui s’engage lors de la réunion à la communauté de communes (mi-mai) à verser les salaires des salariées licenciées [11, licenciées le 15 avril, et qui n’ont rien reçu depuis la paie de mars]. Et pourtant, à ce jour, une femme n’a toujours pas de salaire depuis 2 mois et se voit dire par M. PERVENCHE :«vous n’avez qu’à vous serrer la ceinture »
La CFDT s’inquiète du rôle des administrateurs judiciaires qui se paient sur la société alors qu’ils doivent faire respecter le droit des salariés. Comment se fait il que les licenciées d’Edwimode n’ont toujours pas leurs salaires de Mai ? Qui va faire cesser ces deux mascarades dont les seules victimes sont encore une fois les salariés ? »
En décembre 2006, la situation des entreprises d’Erbray et de Vendée ne s’améliore pas, constate la Mée socialiste : « La société Confection Atlantic, mise en redressement judiciaire en novembre 2005 a été liquidée par jugement du 20 octobre 2006. La société Edwimode mise en redressement judiciaire par jugement du 25 janvier 2006, attend d’être fixée sur son sort. En 2003, elle avait fait un chiffre d’affaires de 871 000 Euros avec un déficit de 91 000 Euros. Les choses ne se sont pas arrangées depuis. La SARL DEVIL n’est pas concernée actuellement. Elle est détenue à 51 % par M. Pervenche et à 49 % par la société « Le Personnel ».
Et en effet, les derniers salariés – 27 dont 26 femmes, « n’ont pas travaillé les 20-21 septembre 2007 et n’ont appris que le 25 septembre qu’elles étaient en chômage en attendant la décision du Tribunal de Commerce le lendemain. Celui-ci a prononcé la liquidation de l’entreprise, refusant la dernière manoeuvre du patron qui voulait retirer du boulot à une autre de ses entreprises pour en donner à Edwimode [Les salariés] ont quitté l’entreprise le 4 octobre 2007″.
En fin de compte son petit groupe textile s’est effondré dans la seconde moitié des années 2010 – selon nos informations, ses autres investissements dans l’hôtellerie-restauration n’ont guère été plus heureux. Ce qui n’a pas empêché l’ex-directeur de saint Stanislas de gérer une maison de retraite associative dans Nantes, à peu près jusqu’aux tags sur son ancien établissement, et d’être, en 2021-22, président, puis aujourd’hui secrétaire, du Rotary Club de Châteaubriant, organisateur de conférences, vide-greniers, salons et autres manifestations dans la sous-préfecture industrielle du nord de la Loire-Atlantique.