Comme Riposte catholique le pressentait, le décès de l’abbé Pierre ne pouvait que rendre vaine une action devant la justice française. Les évêques de France avaient en effet saisi le parquet pour qu’une enquête soit ouverte. Mais dans la mesure où le décès de l’abbé Pierre remonte à 2007 et que la possibilité de trouver des complices devenait hautement incertaine, l’ouverture d’une enquête se faisait elle aussi improbable.
La CEF se heurte au caractère bref du délai de prescription de non-dénonciation des faits
Le parquet de Paris a donc indiqué que “l’action publique était éteinte par le décès du mis en cause en 2007 en ce qui le concernait personnellement, et prescrite en ce qui aurait éventuellement pu concerner des non-dénonciations de faits”. Cette non-dénonciation des faits est soumise à un délai de prescription. Autrement dit, au bout d’un certain temps, la non-dénonciation ne peut plus être sanctionnée pénalement et entraîner des poursuites. Certes, le délai a été prolongé dans certains cas. Ainsi, pour la commission d’une agression sexuelle sur mineur, la non-dénonciation se prescrit en 10 ans. Et pour la commission d’un crime sexuel sur mineur, la non-dénonciation se prescrit en 20 ans. Sauf qu’à supposer même qu’il existe des infractions de ce genre, il est fort peu probable que les faits remontent aux dernières années de l’abbé Pierre quand il était en vie. Il faudrait remonter aux années 1980, voire au début des années 1990. Mais si on applique les délais de prescription, les non-dénonciations auraient été prescrites au cours des années 2000 ou au début des années 2010.
Comme le dit le parquet, “la non-dénonciation de faits est un délit distinct”, dont “l’objectif (est) de s’assurer que, tant que la victime est dans l’incapacité d’agir par elle-même, les personnes ayant connaissance des faits empêchent qu’ils se reproduisent, et permettent qu’ils soient jugés”.
La CEF ignore aussi certains aspects de l’affaire Barbarin
La Conférence des évêques de France (CEF) a indiqué “regretter” la décision du parquet de Paris. “Elle exprime sa proximité aux personnes victimes et redit sa détermination à agir pour que toute la vérité possible soit faite sur les actes commis par l’abbé Pierre”. Soit. Mais en 2021, la Cour de cassation avait aussi pris position dans une affaire en partie similaire en rappelant aussi qu’il existait un délai de prescription en cas de non-dénonciation, même si était aussi en cause le fait que les victimes, devenues majeures, pouvaient agir en justice. Il est en tout cas étonnant que la CEF ait oublié cette prescription qui s’applique aux infractions de non-dénonciation, oubliant manifestement que l’abbé Pierre sévissait il y a plus de trente ans.
Il serait plus que temps pour RC de faire un article de fond sur la manière dont les évêques conciliaires er post conciliaires ont considéré et considèrent toujours les questions juridiques (philosophie du droit, droit naturel et droit positif, principes de responsabilité pour faute, droits fondamentaux) comme secondaires.
Nous notons cette demande. Mais les évêques sont bien silencieux dans certains domaines qui exigent un investissement ecclésial.La question de la culture générale et juridique est posée dans la formation sacerdotale.