Le dernier numéro de Sedes Sapientiae (n°168, Juin 2024), revue de la Fraternité Saint-Vincent Ferrier, est paru en juin 2024.
Au sommaire ce trimestre plusieurs articles ont attiré notre attention notamment ceux sur le dossier ‘Débat sur un ordinariat traditionnel’ :
– Réflexions critiques sur un éventuel “ordinariat traditionnel” – Joseph Shaw
– Une solution canonique pour la diaspora des fidèles attachés à la Tradition – Contribution d’un laïc au débat sur un ordinariat traditionnel – Philippe Darantière
– Un “ordinariat traditionnel” : Précisions et réponses à quelques objections – RP Louis-Marie de Blignières
Dans sa contribution, Philippe Darantière évoque cet ordinariat et les questions qui doivent se poser (extrait ci-dessous)
Le motu proprio Traditionis custodes de 2021 a remis de nouveau entre les mains de l’évêque diocésain la mission d’encadrer l’accès des fidèles à la liturgie traditionnelle, mais dans un sens très restrictif et sous l’autorité du Dicastère pour le culte divin et la discipline des sacrements, qui a lui-même durci les dispositions déjà liberticides de Traditionis custodes. L’évêque doit ainsi « indiquer des lieux où les fidèles puissent se réunir pour la célébration eucharistique (mais pas dans les églises paroissiales et sans ériger de nouvelles paroisses personnelles) » et « établir les jours où les célébrations eucharistiques sont autorisées ». Enfin, il « doit veiller à ne pas autoriser la constitution de nouveaux groupes ». En dehors de la célébration eucharistique, l’accès aux autres sacrements est remis au bon vouloir des évêques, à qui le pape François enjoint de « travailler pour qu’on revienne à une forme de célébration unitaire » selon l’unique missel réformé par Paul VI.
Ce mouvement de balancier étalé sur trente-trois ans n’a pas découragé les fidèles laïcs, puisque l’attachement à la liturgie traditionnelle manifeste toujours plus sa vitalité. Toutefois, il est évident que ces différentes solutions ont toutes révélé leurs limites, y compris Traditionis custodes qui s’est révélé en bien des endroits inappliqué parce qu’inapplicable.
Il est donc nécessaire d’envisager aujourd’hui une réponse plus globale à ce problème qui persiste. L’« ordinariat traditionnel » constitue une réponse possible. Elle n’est pas proposée comme un système destiné à remplacer ni absorber ce qui existe actuellement (les instituts traditionnels, les conventions avec les évêques qui régissent leurs apostolats, les paroisses personnelles, etc.). Mais un tel ordinariat sera un outil de plus pour garantir l’accès des fidèles à tous les sacrements sous la forme traditionnelle qui convient au bien de leurs âmes.
Comme d’autres avant lui, M. Shaw objecte que l’établissement de cet ordinariat ne garantit pas nécessairement qu’il y aura davantage de prêtres et de lieux pour offrir ces sacrements. C’est vrai, mais du moins, dans tous les lieux déjà existants, les fidèles pourront-ils recevoir tous les sacrements. Actuellement, plusieurs diocèses français, pourtant dotés de lieux et de prêtres en suffisance, limitent ou interdisent l’accès à la confirmation et au mariage dans l’ancien rite. L’établissement d’un ordinariat traditionnel lèverait ces obstacles.
C’est aussi une garantie pour l’Eglise de bien intégrer ces fidèles, en les arrimant solidement à la hiérarchie. L’ordinariat proposé aiderait donc à réduire les tensions, il constituerait un facteur de paix et d’unité dans la diversité, tout en respectant les critères de la communion ecclésiale, puisque la structure s’intégrerait dans la hiérarchie de l’Eglise.