C’est avec beaucoup de peine (et, confessons-le, de colère) que j’ai appris la triste nouvelle du renvoi de la Fraternité Saint-Pierre du diocèse de Quimper. Il se dit que les autorités diocésaines ont profité de la publication de deux récents (et fort peu amènes) articles de Paix liturgique pour prendre cette décision brutale. J’ignore si c’est vrai, toutefois, si c’est le cas, c’est d’une mauvaise foi insigne. Mais peut-être est-ce aussi l’occasion de rappeler quelques vérités élémentaires qui, dans nos temps de barbarie post-moderne, semblent avoir été totalement occultées.
D’abord, la justice consiste à faire porter à chacun la responsabilité de ses fautes (comme de ses bienfaits) et certainement pas à pratiquer l’amalgame – si volontiers dénoncé par ailleurs par toute la caste jacassante. La Sainte Ecriture précise nettement (Dt 24,16) : « On ne fera pas mourir les pères pour les fils et l’on ne fera pas mourir les fils pour les pères ; on fera mourir chacun pour son péché. » Certes, il existe une solidarité des hommes dans le péché comme dans le salut, comme le manifestent les dogmes du péché originel et de la communion des saints, mais cette parole du Deutéronome est le commencement de la vraie justice – par opposition à la logique barbare des représailles, mêlant coupables et innocents.
Ensuite, il est possible de lire et même de relayer un texte (fût-ce un article de Paix liturgique !) sans en approuver l’intégralité, ni même l’essentiel. Faut-il donc que l’esprit de secte ait tout emporté pour que l’on ait aujourd’hui à rappeler de telles banalités ! Ce n’est pas parce que ces fameux articles ont été lus qu’ils ont été généralement approuvés par les fidèles de Quimper et ce n’est pas parce qu’ils ont été critiqués qu’ils étaient intégralement faux. Pour ce qui me concerne, je me garderais de parler d’une situation que je connais mal. Mais je peux bien dire à la fois que je ne suis pas toujours d’accord avec la stratégie éditoriale ou militante de Paix liturgique et que je suis reconnaissant à cette association pour ce qu’elle a obtenu naguère. Dans la situation postérieure à Traditionis custodes, je ne crois pas qu’il soit prudent (et je rappelle que la prudence est une vertu cardinale, également opposée à la pusillanimité et à la témérité) de taper comme des sourds sur tel ou tel évêque à l’occasion de la moindre rumeur : après le temps des manifestations qui ont servi à faire connaître la réalité et l’existence même du monde traditionnel à beaucoup d’évêques qui l’ignoraient ou voulaient l’ignorer, il me semble qu’est venu le temps des discussions discrètes. Mais cela ne me regarde pas : je ne suis rien dans Paix liturgique et pas davantage dans la négociation entre la Fraternité Saint-Pierre et le diocèse de Quimper. Ce qui me semble, en revanche, s’imposer, c’est que chacun soit tenu pour responsable de ce qu’il dit et fait, mais non de ce que disent et font les voisins plus ou moins proches.
Mais, surtout, il semble urgent de rappeler que clercs et laïcs n’ont pas les mêmes responsabilités. Il est très facile pour des laïcs de critiquer la pusillanimité des clercs. Mais ce n’est pas nous qui sommes en relation directe avec les évêques. Et il peut parfois être nécessaire de lâcher du lest quelque part pour sauver un apostolat (voir plusieurs apostolats dans le pays): j’ignore si, en acceptant le déménagement qui lui était proposé et qui a été si vivement dénoncé par Paix liturgique, la Fraternité Saint-Pierre aurait réussi à sauver l’apostolat finistérien, mais rien ne permet d’en douter a priori. Inversement, les laïcs peuvent parfois obtenir des résultats auxquels les clercs ne peuvent que rêver – puisque nous disposons d’une liberté sans commune mesure avec la leur. Cela implique le respect de nos vocations respectives et surtout la coordination entre nous. Raison pour laquelle je ne saurais trop conseiller à nos amis de rejoindre l’union Lex Orandi : il est fondamental que, dans tous les lieux où est célébrée régulièrement la messe traditionnelle, il existe une structure représentant les laïcs – à côté, devant ou derrière les clercs, selon les situations. Et des laïcs qui connaissent de près la situation. Des sites comme Riposte catholique peuvent relayer et donner de l’écho, mais certainement pas remplacer cette connaissance fine de la situation et cette coopération constante entre clercs et laïcs.
Rappelons enfin que la célébration de la messe traditionnelle nous dépasse tous infiniment : bien avant nous tous, c’est elle qui a des droits dans l’Eglise. Par conséquent, d’une part nous n’avons aucune raison de céder à l’arbitraire clérical et d’autre part nous n’avons pas davantage de raison de céder à des logiques de type marxiste (un évêque, dans l’Eglise, n’est pas le représentant des oppresseurs et nous ne sommes pas une classe opprimée : il est notre pasteur et nous sommes, sous sa conduite, le troupeau de l’unique Pasteur). Calmement, pacifiquement, fermement, nous réclamons d’être traités comme des brebis de Jésus-Christ et nous réclamons que la messe romaine traditionnelle, dont nous avons besoin pour notre sanctification, retrouve sa pleine et entière liberté, sa dignité éminente au cœur même de l’Eglise romaine.
La crise de l’Eglise, disait Mère Teresa, c’est d’abord vous et moi ; cette crise tient essentiellement au fait que nous sommes pécheurs. Or, c’est précisément parce que la liturgie traditionnelle nous semble un merveilleux chemin vers la sainteté que nous y sommes attachés. Alors commençons toutes nos activités de défense de ce magnifique héritage par la prière et la pénitence. Et demandons au Bon Dieu la floraison de saints qui sera la vraie réponse à cette crise qui dure depuis trop longtemps ! Comme le disait Jean Madiran, nous ne sortirons de la crise de l’Eglise que par voie de sainteté et par voie d’autorité. Gardons-le précieusement en mémoire.
Je suggère d’ailleurs qu’en plus de la traditionnelle demande : Mon Dieu, donnez-nous beaucoup de saints prêtres, nous ajoutions de part et d’autre : Mon Dieu, donnez-nous beaucoup de saints laïcs (et faites de moi l’un d’entre eux !) et Mon Dieu, donnez-nous beaucoup de saints évêques. Et prions pour nos frères de Quimper qui sont aujourd’hui dans l’incertitude sur leur sort.
Bonne et sainte fin d’Avent à tous : malgré ces temps affreux, la victoire est déjà acquise par l’Incarnation du Roi des rois !
Guillaume de Thieulloy
Directeur de la publication
Excellent article
Le diocèse de Quimper n’est pas connu pour être conservateur hormis la survivance de quelques manifestations folkloriques… Ce diocèse illustre parfaitement l’exchristianisation voulue par le clergé… .
Arrêtons d’être naïf : l’affaire des articles de paix liturgiques n’est qu’un prétexte pour virer la FSSP. C’est de la mauvaise foi à l’état pure.
J’espère que les fidèles vont se rebeller contre cette décision inique . C’est un vraie scandale.
Un prêtre de la paroisse de Morlaix sera chargé de venir a St sève pour donner une messe Dominicale selon le missel 1962..
Quelle triste époque.
Mais réjouissez vous toujours dans le Seigneur! (introit de ce Dimanche)
Un paroissien de st Sève .
Tout à fait d’accord avec Observateur. C’est un pur prétexte. L’évêque voulait virer la FSSP et c’est fait par conséquent. Quant aux diocésains chargés de prendre la suite, leur tour viendra. C’est la logique de Traditionis Custodes.
Puisse cela faire enfin la joie de la FSSPX, avec plus de 200 fidèles c’est un très beau nombre permettant de créer un nouveau prieuré Catholique.
Notre appartenance à une église diocésaine conciliaire et moderniste revêt-elle encore d’intérêt ? C’est la véritable question à se poser.
Il faut s’en tenir aux faits.
Est-il vrai que la FSSP devait être déplacée pour libérer une église pour deux messes par mois ?
Si oui, alors les lettres de Paix Liturgique si maladroites qu’elles aient pu être n’ont été qu’un prétexte et la provocation n’était pas de ce côté là. L’évêque a alors péché par abus d’autorité.
Si non d’où venait cette rumeur et quelle était son but ?
N’oublions pas Dijon, Grenoble et dans une moindre mesure Le Mans.
Compte tenu du mode de nomination des évêques en France, ce sont majoritairement de saints pétochards soumis et il faut savoir en jouer. Voir les interventions du président du CEF pour s’en convaincre.
Et ceux qui ne le sont pas ont droit à tous les tracas possibles, voir Fréjus-Toulon.
ll faut tout faire pour éviter la guerre (civilo-religieuse), mais si on nous la déclare, il faut se battre.
Si la FSSPX n’avait pas eu cette résistance, où en serions-nous aujourd’hui ?
La situation est aujourd’hui autrement plus favorable à la tradition car avec le recul, la plupart de ce qui reste de fidèles ne sont plus dupes des erreurs et tromperies modernistes cléricales et épiscopales.
Éfage : le problème de la FSSPX que je note depuis quelques temps, c’est qu’elle devient de plus en plus sectaire .
” hors de la Frat’ point de salut ”
J’ai l’exemple d’une jeune fille, entree au tiers ordre des sœurs de la Fraternité, qui a reçu interdiction de recevoir la communion en dehors des chapelles de la Fraternité.
Une autre personne s’est vertement faite reprendre par un prêtre en confession par un prêtre de la Fsspx car elle a dit assister à des messes de la Fraternité St Pierre.
@Joel
Permettez-moi de douter de votre témoignage: la FSSPX a toujours affirmé que le pape était le chef de l’Eglise, même si ses membres ne se gênent pas pour critiquer telle ou telle initiative venant du Vatican.
En conséquence, les prêtres de la FSSPX n’ont jamais remis en question la validité du sacrement de l’Eucharistie donné par un prêtre diocésain, fût-il le plus progressiste.
La FSSPX est intransigeante envers les dissidents comme ce prêtre que vous évoquez.
@ FG : j’atteste solennellement de la véracité de mon témoignage.
Je peux également témoigner que deux amis , étant passés d’une paroisse ecclesia des à une chapelle de FSSPX tiennent aujourd’hui à table des propos ” crypto sedevacanstistes”.
Je peux également certifier que le prêtre qui a reprit la dame en confession , car celle ci se rend parfois dans une église de la FSSP, est connu pour être ( secrètement) sedevacantiste .
@Joel :
Argument irrecevable. Merci à FG pour son argumentaire.
Mais soyez pas au demeurant inquiet, il restera les « assemblées » relativistes modernistes pour se consoler. Avec « l’attrait » de pouvoir expérimenter en s’ouvrant et de surcroit « s’enrichir » au contact des hérésies des contraires….
voici le message de Mgr Dognin aux fidèles des messes de l’ancien missel à Quimper et Sainte Sève :
Frères et Sœurs,
Lors de la visite pastorale que j’avais effectuée dans votre communauté au printemps 2022, j’avais constaté votre joie de participer à la messe célébrée avec le Missel de 1962 et la nourriture spirituelle que cela vous apportait. J’ai pu en mesurer l’importance dans les réponses au questionnaire que je vous avais adressé. À la suite de cette visite, j’avais pris la décision de permettre aux prêtres de la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre de continuer à célébrer ces messes comme m’y autorise le Motu Proprio Traditionis Custodes promulgué par le Pape François le 16 juillet 2021. En ce sens, le 11 juin 2023, j’ai promulgué une ordonnance pour notre diocèse, afin d’en préciser les modalités de mise en œuvre.
Cependant, il y a deux semaines, un article très offensant paru sur un blog traditionaliste à propos de la paroisse Quimper – Saint-Corentin a suscité un grand émoi dans le diocèse, chez les prêtres et beaucoup de fidèles, et a exacerbé les tensions qui s’étaient développées depuis plusieurs années.
En effet, au fil des ans, j’ai constaté que cette messe dominicale s’est transformée de facto en la création de deux paroisses personnelles (non canoniques) avec toutes les activités afférentes, en parallèle des activités paroissiales. Je ne le souhaitais pas, car je savais que compte tenu de l’histoire de notre diocèse, cela aurait des conséquences sur la communion ecclésiale, autant pour le clergé diocésain que pour les fidèles. Nous en voyons les conséquences aujourd’hui. Ma décision n’est pas un blâme adressé aux abbés Courtois et Télisson, qui sont des pasteurs zélés, mais le constat de tensions irréversibles mettant à mal l’unité du diocèse.
Les tensions générées par la situation que je viens de décrire m’imposent de réagir pour préserver l’unité de l’Église catholique dans le Finistère ainsi que la communion du presbyterium autour de son évêque. Aussi, après avoir consulté mes Conseils, j’ai décidé de maintenir cette messe dominicale avec l’ancien Missel pour le bien des fidèles, mais en demandant à des prêtres diocésains de l’assurer. J’ai également décidé de mettre fin à la convention qui lie le diocèse avec la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre. Les activités pastorales (catéchisme, pastorale des jeunes, etc.) ainsi que la préparation et la célébration des sacrements (baptême, mariage, etc.) continueront d’être assurées par les paroisses Quimper – Saint-Corentin et Saint-Yves en Pays de Morlaix. Les prêtres de la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre poursuivront leur mission jusqu’à une échéance qui sera décidée prochainement. Ils nous ont assuré de leur collaboration pour assurer la transition.
J’ai conscience que cette décision suscitera des réactions, voire des interrogations et des inquiétudes pour l’avenir. Je m’en remets à votre discernement et votre volonté de construire ensemble notre Église.
À l’approche de la fête de Noël, soyons unis dans la prière et dans l’amour du Christ. Je suis confiant que, en tant que communauté diocésaine, nous pourrons permettre cette transition dans la paix, surmonter les défis qui s’annoncent et continuer à grandir dans la foi.
Je vous assure de ma prière, et que la paix du Seigneur soit toujours avec vous.
X Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon
@Joel, FG, Efage : autant de prêtres FSSPX, autant de points de vue différents. A ma connaissance, il n’y a pas de consignes générales venant de Suresnes ou de Menzingen et concernant l’assistance à la messe ou la réception des sacrements ailleurs qu’à la FSSPX. Chaque fidèle se fixe sa règle à lui-même en toute conscience, en s’entourant s’il le souhaite d’avis de tiers. Personnellement, j’ai appris à me méfier des Savonarole jusqu’au boutistes qui finissent souvent par retourner leur veste. Maintenant je vous donne mon point de vue : la FSSPX c’est mieux et cela suffit à mon bonheur.