Suite à la note de l’évêque de Belley-Ars, un lecteur nous fait part de sa lettre ouverte :
Monseigneur,
Il est des matins heureux et des matins funestes.
Hier je lisais l’entretien de monseigneur Schneider, votre frère dans l’épiscopat, qui, avec sa douceur coutumière, exhortait les fidèles dont je suis, afin de les éclairer sur la conduite à tenir dans cette crise effroyable que vit l’Église sans péché mais pas sans pécheurs :
« Vous devez écrire, mais faites-le, avec insistance bien sûr, clairement, sans peur, mais toujours, s’il vous plaît, en trouvant des formes de respect ; comme l’a dit saint Paul : pratiquez la vérité dans la charité. Il est plus facile pour l’être humain de choisir l’un des extrêmes. Le premier extrême, c’est la charité seulement : ou bien je ne parlerai pas parce que je ne suis qu’un subordonné le pape et les évêques se chargeront de tout dans l’Eglise ; ou bien je dois simplement obéir, aveuglément. Telle n’est pas la véritable attitude d’un catholique. Et l’autre extrême, c’est seulement la vérité, sans charité : cela va nuire, cela ne convaincra personne, et donc ce n’est pas la voie de Dieu : la voie de Dieu est la synthèse, et elle est plus difficile. Il est plus facile de vociférer et de les maudire, et ainsi de suite : ce n’est pas la voie de Dieu, jamais. Nous devons unir les deux choses. »
Matin heureux.
Et ce matin sur Riposte catholique je prenais connaissance de votre directive d’application de Traditionis custodes.
Matin funeste.
Et il me faut bien relire les mots de Mgr Schneider avant de tremper ma plume dans mon encrier car la souffrance vécue en lisant vos lignes m’engagerait bien facilement à dire des choses qu’il ne faut pas s’écrire entre catholiques. Cependant, je ne peux ni ne dois me taire.
Souffrez, Monseigneur, que je vous livre le fond de mon cœur sur quelques aspects de votre texte ; quelques aspects seulement, il y aurait tant à écrire…
L’Église croit comme elle prie écrivez-vous en tête de la « Note d’information destinée aux prêtres et aux diacres sur la mise en application de la réforme liturgique dans le diocèse de Belley-Ars » publiée le 11 octobre (il n’est d’ailleurs pas évident de se la procurer), et c’est visiblement l’argument central de votre note.
Avez-vous conscience de ce que vous insinuez ? L’Église prie aujourd’hui n’importe comment, quelle est donc sa foi ? Reste-t-il seulement une foi ? Mais cela signifie en outre que la foi d’hier ne serait plus la foi d’aujourd’hui ? Mais de qui donc Monseigneur êtes-vous l’héritier, le simple héritier à qui il appartient de transmettre ? Ce que vous dites est effroyable, il y aurait donc selon vous une nouvelle foi qui daterait précisément de 1969 lorsque le nouveau missel a été promulgué ? Non Monseigneur, non, nous ne pouvons pas vous suivre sur ce chemin.
Pour nous voyez-vous, il n’existe qu’une seule foi, comme il n’existe qu’un seul baptême. Et si nous critiquons bien volontiers la liturgie réformée, nous ne disons pas qu’en tant que telle, elle ne transmet pas la foi ; nous disons qu’elle présente des difficultés, qu’elle est équivoque, plus précisément selon une formule que je trouve très juste :
« On est fondé à craindre que, ne mettant plus en évidence le Sacrifice de Jésus, l’ordo Missæ ne le voue en fait à l’oubli ; car ce Sacrifice est une réalité trop surnaturelle pour que l’homme puisse, sans signe, s’en souvenir et en vivre. » (Un groupe de théologiens, La pensée Catholique n°122, 1969).
Vous écrivez plus loin que
« Ces dernières années, nous avons connu une situation atypique. Habituellement lorsqu’est promulgué un rite rénové, l’ancienne forme disparaît automatiquement (comme cela a été le cas pour le rite dit de saint Pie V). »
Mais vous répétez, sans savoir, je veux le croire, une ineptie monumentale ! Saint Pie V a supprimé les rits de moins de 200 ans qui, précisément pour leur nouveauté, présentaient des difficultés. Le pape Pie V n’a fait que codifier l’usage romain qui lui était très largement antérieur. Jamais, JAMAIS, JAMAIS dans toute l’histoire de notre sainte mère l’Église n’a été fabriquée de toutes pièces et dans tous ses aspects, jusqu’aux plus petits détails une liturgie comme cela a été le cas avec la réforme liturgique initiée par le concile de Vatican II et promulguée par Paul VI. Et tout le mal vient probablement de cela. Ne reprenez pas cet argument fallacieux déjà utilisé par d’autres, il ne vous grandit vraiment pas.
Puis vous prétendez que
« Jean-Paul II, Benoît XVI et François ont exceptionnellement toléré une coexistence temporaire des deux formes, afin de faciliter la transition de l’une à l’autre. »
Mais vous plaisantez Monseigneur ? En dehors de ce qui concerne le pape François qui, je le concède bien tristement, souhaite ardemment l’éradication de la liturgie traditionnelle célébrée par l’immense majorité de ses prédécesseurs, comment pouvez-vous attribuer cette idée à Jean-Paul II et plus encore à Benoît XVI ! Les deux citations qui suivent vous parlent-elles ?
« On devra partout respecter les dispositions intérieures de tous ceux qui se sentent liés à la tradition liturgique latine, et cela par une application large et généreuse des directives données en leur temps par le Siège apostolique (…) » Jean-Paul II, Ecclesia Dei, 2 juillet 2018.
« Ce qui a été sacré pour les générations précédentes ne peut à l’improviste se retrouver totalement interdit, voire considéré comme néfaste. » Benoît XVI, lettre aux évêques 7 juillet 2007.
Puis vous poursuivez avec un grand luxe de détails en expliquant tout ce qui est désormais interdit, supprimé, caduc, limité, toléré, banni, condamné dans le diocèse du saint curé d’Ars. Dans le diocèse du saint curé d’Ars !
Monseigneur, je n’écrirais pas d’avantage. Je vous en conjure, au nom du sacrement que vous avez reçu et qui vous donne la triple mission d’enseigner la foi, de conduire le culte et de paître le troupeau dans votre beau diocèse, dans le beau diocèse du saint curé d’Ars, reprenez votre texte. Nous feindrons de notre côté de ne l’avoir pas lu.
In Christo semper Monseigneur, in Christo semper.
Cyril Farret d’Astiès
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