Dom Bernardus Peeters, élu le 11 février 2022 abbé général de l’Ordre des Cisterciens de la Stricte Observance (OSCO) ou Trappiste, a écrit une lettre circulaire parue au mois d’août. Cette circulaire reste lucide sur la grave crise que traverse l’OCSO (moyenne d’âge très élevée, très peu d’entrée, entrainant la fermeture de nombreux monastères).
Dans cette lettre circulaire, je souhaite que nous examinions ensemble l’importance des rêves comme moyen de sortir de la crise. Il ne s’agit pas des rêves eux-mêmes mais de ce qui se cache derrière ou en dessous d’eux. ” Le songe symbolise la vie spirituelle de chacun de nous, cet espace intérieur, que chacun est appelé à cultiver et à garder, où Dieu se manifeste et souvent nous parle. ” (Pape François, Audience Générale, 26 janvier 2022). Nous avons tous des rêves au milieu de la crise que traverse notre Ordre ; des rêves non seulement sur notre Ordre mais aussi sur l’Église et le monde dont nous faisons partie – des rêves même sur nous-mêmes ! N’oublions pas les paroles du prophète Joël : ” vos fils et vos filles prophétiseront, vos anciens seront instruits par des songes, et vos jeunes gens par des visions ” (Joël 2, 28 : 3,1). Lorsque nous ne savons plus rêver, c’est comme si l’espace intérieur où Dieu nous parle s’était tari. […]
Revenons un instant au rêve de saint Bernard et examinons de plus près ces trois mots. Ils peuvent nous aider, en tant qu’Ordre, en tant que communauté et en tant qu’individus, à trouver une réponse à la crise dans laquelle nous vivons aujourd’hui. Vous pensez peut-être que j’utilise trop souvent le mot “crise”, mais si nous examinons de près la situation dans l’Ordre, dans l’Église et dans le monde d’aujourd’hui, nous vivons certainement une crise, une époque où beaucoup de choses changent et sont sous pression. Les spécialistes parlent même aujourd’hui d’une situation unique d’accumulation de crises. Des systèmes entiers sont soumis à une forte pression et exigent des solutions. C’est le moment, non pas de nous fermer, mais de voir avec les yeux du cœur ce qui compte maintenant ; le moment de faire les bons choix et le moment d’agir. […]
Frères et sœurs, j’espère que si nous avons le courage de rêver aujourd’hui, au milieu de la crise de notre Ordre, nous découvrirons le Charisme Cistercien donné à chacun d’entre nous. Il est peut-être caché en nous, comme c’était le cas du jeune Bernard, ou bien il est déjà clairement visible à l’âge adulte. Ou peut-être s’est-il perdu, submergé dans la confusion et l’ignorance. Mais nous devons continuer à croire que le Charisme est présent en vertu du don de Dieu fait à chacun d’entre nous.
Une façon de sortir de la crise est la redécouverte, par le rêve, du Charisme : une redécouverte par la vue, le choix et l’action ; une redécouverte du fait que nous sommes vus, voulus et aimés par Dieu. Nous appartenons donc à Dieu, et non seulement à Dieu mais aussi les uns aux autres car le but de l’Incarnation n’est pas le salut d’un individu mais de tout le Peuple de Dieu. Ce temps d’action nous invite à retrouver notre sentiment d’appartenance, la conscience que nous faisons partie d’un peuple.