L’émission Affaires Sensibles du 23 novembre dernier a publié un reportage sur les filles placées au sein de la congrégation du Bon Pasteur par la protection judiciaire de la jeunesse de l’après-guerre aux années 1980, où elles ont été maltraitées voire bien pire.
« Pour les filles du Bon Pasteur, il aura fallu des décennies de silence avant d’oser briser l’omerta. C’est en découvrant le film The Magdalene Sisters, qui dénonce l’enfermement de jeunes Irlandaises dans un couvent, que les langues se délient. “J’ai eu un choc en voyant le film. C’était mon histoire ! Je suis tombée sur des forums où des anciennes discutaient de ce qu’elles avaient vécu au Bon Pasteur. J’ai passé ma nuit à lire leurs témoignages. J’ai compris que ce n’était pas normal, qu’il fallait parler”, raconte Marie-Christine.
Regroupées dans l’association Les filles du Bon Pasteur, 300 femmes demandent aujourd’hui des excuses officielles à la congrégation religieuse et la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat dans leur placement abusif. À près de 80 ans, elles entendent bien mener le combat jusqu’au bout.
Pour l’heure, si la Congrégation du Bon Pasteur n’accueille plus de mineures placées par la justice et a pris ses distances avec certaines pratiques, aucune excuse n’a encore été officiellement formulée ».
L’Etat était visiblement conscient du problème, puisque des années 1950 aux années 1970 des dizaines de rapports d’inspection ont souligné la dureté des conditions dans les maisons du Bon Pasteur qui n’ont pourtant été nullement réformées, à l‘exception notable du Bon Pasteur de Bourges vendu à l’Etat en 1968 et qui devient la pierre angulaire de la reprise du placement des mineures par les laïcs.
A ce jour, sur près de 32.000 filles placées, l’association des Filles du Bon Pasteur a recueilli plus de 300 témoignages de victimes; la congrégation de son côté limite l’accès aux archives, même si une discrète plaque a été placée sur ses murs. Une commission indépendante avait été annoncée par la congrégation fin 2022 avec un mandat de 10 mois, elle devait rendre un rapport courant 2023, mais rien ne semble avoir été publié.
Le 4 juin dernier, des victimes de la congrégation se sont rendues à la porte de la maison mère exiger la dissolution de cette congrégation vieillissante (qui a fusionné en 2014 avec l’Ordre de Notre-Dame de Charité du Refuge fondé par saint Jean Eudes) et qu’on renomme le boulevard du Bon Pasteur à Angers; leurs demandes sont restées lettre morte.
