La Conférence des évêques de France (CEF) a demandé, par son président, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, l’ouverture d’un enquête sur l’abbé Pierre qui fait suite à de nouvelles allégations à son encontre. L’Église de France a en effet procédé à un signalement auprès du procureur de la République de Paris pour «non-dénonciation de viols et agressions sexuelles sur personnes vulnérables et mineurs».
En effet, comme l’indique le communiqué publié le 17 janvier dernier
C’est pourquoi le Président de la CEF a procédé à un signalement auprès du Procureur de la République de Paris, pour non-dénonciation de viols et agressions sexuelles sur personnes vulnérables et mineurs. Ce afin que le Parquet apprécie l’opportunité d’ouvrir une enquête pour déterminer les conditions dans lesquelles les faits mentionnés ont pu ne pas être signalés à la justice pendant toutes ces années.
Le droit pénal vise des personnes en vie
Le communiqué met cependant de côté une difficulté: le décès de l’intéressé, ce qui ne peut que fragiliser les chances d’une suite pénale.
Vatican News apporte une précision, mais qui est bien omise par le communiqué: la circonstance qu’elle vise les personnes qui se seraient tues – mais sans non plus préciser que les personnes en question doivent être encore de ce monde… Qui plus, elles ne semblent pas identifiées.
Par essence, la mise en œuvre d’une procédure pénale est certes relative à des faits, mais à des faits qui doivent être pénalement imputés à une personne en vie et pour laquelle on ne peut plaider une quelconque irresponsabilité pénale. Ce n’est pas une démarche platonique et abstraite, où l’on ne viserait que des faits, mais bien des personnes qui ont eu un rôle dans la commission de ces faits pénalement qualifiés et qui leur sont imputés. Il devient difficile d’envisager une procédure si l’on doit seulement se contenter de ne juger platoniquement que des faits et non des personnes… Il est impossible d’envisager un procès post mortem pour l’abbé Pierre, lequel est décédé en 2007. On ne saurait imiter le procès du pape Formose qui fut jugé, bien que mort, par l’un de ses successeurs dans le cadre d’un concile cadavérique qui se tint à la fin du 9ème siècle…
À moins de trouver des complices pour lesquels il y a de fortes suppositions ou relativement identifiables, on ne peut que craindre l’échec de cette démarche. Et quand bien même les personnes seraient identifiées, encore faudrait-ils que les faits ne soient pas prescrits.
Je ne sais pas à qui on doit faire la leçon, aux journalistes (toutes formes de presse confondues, y compris ceux qui se réclament du catholicisme) ou aux prélats. Il n’y a pas que la procédure pénale, il y a aussi certaines principes fondamentaux, dépassant la procédure pénale, qui s’appliquent aux personnes.
Il me semble qu’il y a des sujets que RC aborde très peu, et qui sont d’une particulière gravité, à savoir notre passivité de catholiques français face à la constitutionnalisation de la liberté de recourir à l’avortement.
La CEF se tire une balle dans le pied.
L’intéressé est mort, et il est fort à parier que la plupart des personnes ayant eu un quelconque lien avec sa surveillance ou ses sanctions, ou ayant d’une manière ou une autre ayant su ou pu deviner quelque chose le soi aussi…
Que pour les survivants, les faits soient de toute manière prescrits.
De plus, puisqu’il y a une enquête socio-historique qui est ouverte, pourquoi les témoins seraient convaincus de parler Pour qu’ils soient ensuite poursuivis en justice? Et même pourquoi les enquêteurs devraient les convaincre de parler? Sont-ils des chercheurs ou des agents de police? Tout ceci confère à l’abus de confiance et à la malhonnêteté .
C’est aussi nier que jusqu’à une certaine époque, et encore récente, on fonctionnait tous plus ou moins comme cela. Gérer les problèmes en interne et les couvrir. Taper dans la fourmilière avec le recul des années, c’est taper sur tout le monde. C’est bien beau de faire la morale quand on a soit même été partie active de ce système.
Si l’on veut vraiment chercher des responsables moraux au niveau pénal, ce seraient les présidents actuels et passés vivants d’Emmaüs, de la fondation abbé Pierre et de la CEF. Donc il faut que ces messieurs qui lancent cette enquête soit prêt à payer personnellement, avec de la prison, des amendes, l’opprobre publique et sans doute une interdiction d’exercer certaines fonctions. Sont-ils prêts à cela?
Je ne suis pas d’accord avec votre analyse, dans la mesure où le signalement de la CEF ne peut produire aucun effet sur l’abbé Pierre lui-même, puisque son décès entraîne l’extinction de l’action publique à son égard.
Par contre les faits de non-dénonciation invoqués, même s’il ne sont pas dirigés contre des personnes dénommées, peuvent parfaitement entraîner l’ouverture d’une enquête diligentée par le Parquet. le seul risque pour le CEF résiderait dans le faits que certains de ses membres, anciens ou actuels, ne se retrouve dans le collimateur de la Justice.
Ceci n’est qu’une précision procédurale qui me semblait indispensable et n’enlève rien aux propos de Monsieur COURIVAUD auxquels je m’associe entièrement.