Paix Liturgique s’est intéressée à la situation à Saint-André de Grenoble et répond en somme qu’il ne reste pas grand chose de la guerre lancée par Mgr de Kerimel contre les fidèles tridentins :
“La situation à Saint-André de Grenoble, un an après l’expulsion de la Fraternité Saint Pierre par l’ex-évêque de Grenoble, maintenant archevêque de Toulouse, Mgr de Kerimel, illustre à elle seule à merveille l’échec de Traditionis Custodes.
Un climat d’apaisement ?
En effet, les grenoblois de Saint-André, après quelques actions coups de poing par un petit groupe (grève de la quête, occupation du clocher de Saint-André, de la cathédrale située à 500 mètres, etc.) ont fini par discuter avec le diocèse, sous l’égide de notables locaux.
Le nouveau curé, l’abbé Faure – qui a fêté en 2021 ses 30 ans de sacerdoce, à cette occasion un livret retraçant l’histoire de la cathédrale est sorti – a été déplacé de la cathédrale à Saint-André. Entre 30 à 50 de ses anciens fidèles l’ont suivi ; C’est un prêtre d’une sensibilité classique qui a participé au pèlerinage de Chartres 2023, comme l’indique la feuille paroissiale qui annonce la messe traditionnelle les 29 et 30 mai ; une sorte d’essai de rétablir des liens normaux et charitables après la tentative (échouée) de blitzkrieg de Mgr de Kerimel à l’encontre de la paix liturgique qui régnait depuis de nombreuses années dans le diocèse de Grenoble.
Il assure une messe tridentine tous les jours en semaine et deux le dimanche – une à 8h30, toujours en rite tridentin – et une à 10h30, en rite tridentin sauf le premier dimanche du mois, ainsi que des vêpres le dimanche soir 17h30. Ces horaires sont annoncés aussi sur le bulletin de la paroisse centre-ville de Grenoble Notre-Dame de l’Espérance, dont Saint-André est l’une des églises.
L’application de la règle de Chicago voulue par Mgr de Kerimel ( CAD d’imposer, au moins au début, au moins une fois par mois aux fidèles attachées à la liturgie traditionnelle d’assister à une messe célébrée selon le Novus Ordo Missae ) est réduite ainsi à sa plus simple expression la majeure partie des fidèles de Saint-André glissant le premier dimanche du mois sur la messe la plus matutinale. Ces arrangements locaux sont protégés par la grande discrétion des fidèles de Saint-André – et surtout des notables – qui, après avoir sonné le tocsin fin 2022 dans la presse nationale et locale, ainsi que dans les médias catholiques, sont passés en mode « plus de son ni d’image ».
Néanmoins ce 4 juin à 10h30, il y avait un peu plus de monde que d’habitude – 75 fidèles – pour assister à la messe NOM de 10h30 – un NOM d’apparence très traditionnelle, avec enfants de chœur en surplis et grégorien – présidée par l’évêque, Mgr Eychenne.
Viens ensuite le sermon ou l’évêque lia la Trinité et l’unité de l’Eglise, « Que nous soyons entre nous d’une semblable unité que celle qui règne entre le Père, le Fils et le Saint Esprit (…) L’église est le prolongement dans l’humanité de la communauté d’amour trinitaire » «Nous sommes appelés comme chrétiens à refléter ce mystère d’amour. Au point de départ de la tradition latine…”
Le nouvel évêque a rappelé qu’il avait découvert le grégorien à Solesmes en tant que scout, pour délivrer un message qui se voulait de pacification : « Je suis venu célébrer le jour du Seigneur avec des frères et sœurs dans la foi […] certains m’ont demandé quelles étaient mes intentions, les échéances. Si certains ont besoin d’entendre ça, je dirais que les échéances, il n’y en a aucune. Il n’y a pas d’épée de Damoclès. Il est très heureux de voir votre communauté présente dans cette ville et qu’elle puisse durer ». Il a poursuivi : « le chant grégorien, le latin ce sont des richesses que la Tradition nous transmet. Il est bon que des lieux comme le vôtre gardent cette richesse ». “A chaque fois que nous portons atteinte à l’unité de l’Église nous rendons inaccessible la foi à nos contemporains – si les chrétiens se divisent entre eux pour toutes sortes de raisons. La responsabilité de porter atteinte à l’unité nous la renvoyons aux autres. Tout en étant légitimement attachés à ce qui est notre héritage, ce qui nourrit notre foi (…) Nous ne nous sommes pas dans des guerres de religion, mais nous pouvons nous entretuer avec des mots. Je le dis aussi pour moi, entendons cet appel à l’unité pour la gloire de Dieu”.
Alors, beaucoup de bruits pour rien, comme eût dit Shakespeare ?
Dans l’église règne un silence de mort seule une petite fille se met à crier alors que les fidèles s’interrogent pour savoir qui a mis en œuvre une guerre liturgique dans un diocèse ou les crispations étaient apaisées. Une sorte de réponse vient alors de la pseudo prière universelle : “En accueillant notre évêque ce matin nous vous demandons de veiller sur nos pasteurs, qu’ils soient toujours des artisans d’unité, Prions pour la paix » une invocation suivi d’un chant litanique en latin. “Audi nos domine”
Certes, c’est le Mgr Eychenne, qui n’avait pas à Pamiers la réputation d’un ami de traditionnels, a choisi le NOM en latin pour visiter la communauté traditionnelle et délivrer ce message. Certes, il n’a loué que le latin et le grégorien. Le tout pouvant indiquer qu’il s’imagine naïvement, comme tant d’autres avant lui, trouver un terrain d’entente sur la base de la nouvelle messe en latin. En tout cas, il est clair qu’il semble bien mal à l’aise face au chaos laissé par son prédécesseur et qu’il cherche l’apaisement. Dont acte.
Les Lyonnais au secours des fidèles traditionnels de Vienne
Il faut avouer que, très occupés à négocier leur propre sort, les Grenoblois ont complètement laissé tomber Vienne, avec qui ils n’ont plus aucun contact – mais ils n’en avaient que peu par le passé, – et dont les fidèles ont clairement perdu au change, contrairement aux grenoblois.
Vienne est actuellement desservie, deux dimanches sur 4, par les abbés du groupe Totus Tuus, la communauté traditionnelle du diocèse de Lyon, issue d’une scission de la Fraternité Saint-Pierre. Les Viennois ont perdu deux dimanches sur 4, – mais contrairement aux espérances irréalistes de Mgr de Kerimel, ils ne se sont pas reportés sur les messes NOM de Vienne et des abords – une partie des fidèles vient des Terres Froides, autour de la Tour du Pin, et font la route jusqu’à Saint-Just de Lyon principalement, et quelques-uns jusqu’à une messe non una cum à Saint-André du Gaz, nœud ferroviaire des lignes de Grenoble, Lyon et Chambéry, où réside un prêtre sorti de la Fraternité Saint Pie X puis de la « Résistance », qui rayonne jusque dans le sud de la Côte d’Or, l’Allier et le Cher.
Pour desservir Vienne, située dans l’axe rhodanien à 30 km au sud de Lyon, mais à plus d’une heure de Grenoble, le diocèse espérait faire revenir un prêtre bi-formaliste, originaire de l’Isère et actuellement en Bretagne, mais ce plan semble tomber à l’eau – son corollaire aurait été de dépouiller une des rares dessertes diocésaines traditionnelles de la Bretagne, région historique qui semble avoir prévu Traditionis Custodes avant tout le monde, car une part majeure de ses messes traditionelles ne dépend pas des diocèses (Fraternité Saint Pie X et non una cum principalement).
Depuis, c’est l’arrivée d’un second prêtre de la Société des Missionnaires de la Miséricorde Divine de Toulon à Saint-Georges de Lyon qui semble tenir la corde… sauf qu’il aurait dû être ordonné encore en 2022, puis cette année. Les ordinations de Toulon étant bloquées sine die – on parle maintenant, peut-être, d’ordinations en septembre – le diocèse de Grenoble et surtout Totus Tuus font sans lui, en maintenant une desserte aussi provisoire que discrète. Néanmoins, l’intervention de ce futur prêtre de la Miséricorde Divin était toujours la solution envisagée par Mgr Eychenne en juin 2023 – et confirmée tant du côté de Toulon que de Saint-Georges de Lyon. Dans l’attente de l’ordination de ce prêtre à Toulon, Mgr Eychenne a confirmé à des fidèles grenoblois que la desserte de Vienne continuera à être confiée à Totus Tuus l’an prochain – à partir de septembre 2023 donc.
Ainsi les horaires de la messe traditionnelle de Vienne ne sont disponibles nulle part, ni sur le site de la paroisse de Vienne, ni dans le bulletin de Saint-Georges de Lyon. Les fidèles traditionnels de Vienne sont vraiment traités en catholiques de seconde zone, ce qui est d’autant plus choquant que l’arbitraire de Mgr de Kerimel et de Traditionis Custodes n’aurait jamais dû s’abattre sur eux – Notre-Dame de l’Isle, le lieu de messe à Vienne, est en effet, malgré ses dimensions importantes, une chapelle et non une église paroissiale.
Des préoccupations sonnantes et trébuchantes dans le diocèse de Grenoble
Outre la nécessité de maintenir l’unité de l’Eglise, d’autres préoccupations, plus terre à terre, conduisent peut-être le diocèse de Grenoble à calmer le jeu avec les fidèles traditionnels et à réparer les dégâts causés par les coups de menton et de sabre de Mgr de Kerimel.
Le bulletin de Notre-Dame de l’Espérance, paroisse centre-ville de Grenoble, donne l’une d’elles. Il s’agit d’un appel aux dons : « en 2022 nous avons enregistré une baisse [des dons] de 26% par rapport à l’année précédente. Baisse d’autant plus dramatique que cette contribution permet de faire face à tous les frais de fonctionnement, en forte augmentation (eau, gaz, électricité, réparations) des églises, appartements des prêtres et de la maison Paroissiale. La contribution vient en complément du montant des quêtes », qui a lui aussi baissé puisque Saint-André a fait la grève des quêtes suite à l’expulsion de la Fraternité Saint Pierre.
Du même bulletin, on apprend aussi une chose un peu étrange : suite à l’entrée de ses deux parents en maison de retraite, un curé en poste actuellement sur Grenoble quitte momentanément le sacerdoce pour un « travail plus rémunérateur » afin d’en assuer le coût – le diocèse n’étant visiblement pas en mesure de l’aider, même par un prêt personnel comme cela se pratique ailleurs. Alors qu’il est en mesure d’employer divers laïcs pour des missions dont l’utilité et l’impact réel nous laissent dubitatifs.
Ledit curé s’explique aussi sur le site de la paroisse : « Cette situation [le placement de ses parents en maison de retraire] n’ayant pas été suffisamment anticipée et malgré les aides de l’Etat je dois faire face à une situation financière complexe. Après plusieurs rencontres avec l’assistante sociale du diocèse et particulièrement notre évêque Mgr Jean-Marc Eychenne, il a été convenu, avec son soutien, d’interrompre momentanément mes missions pastorales et de trouver un travail plus rémunérateur que mon traitement actuel. Je tiens, tout de suite, à préciser qu’il ne s’agit pas d’un problème de mœurs, ni d’une crise vocationnelle, ni d’un burnout ».
Mgr Eychenne connaît bien les problèmes financiers : son ancien diocèse de Pamiers avait le plus grand mal à joindre les deux bouts et il avait augmenté la contribution des paroisses aux besoins du diocèse jusqu’aux limites du supportable. Et le diocèse de Grenoble, lui aussi, est dans la dèche… Or, il est important de savoir que les persécutions organisées par Traditionis custodes ont eu un coût financier pour les diocèses, d’une part en les privant de la contribution de fidèles traditionnels et d’autre part refroidissant la générosité de fidèles conservateurs. Autre motif pour nos pasteurs d’être raisonnables”.
Quant à Mgr de Kerimel, il est très occupé à essayer de faire démettre le recteur de Rocamadour, aussi ex-vicaire général du diocèse de Cahors.
Pas un centime pour les diocèses, évêques et prêtres modernistes.
C’est triste mais la seule façon de faire revenir l’Eglise vers le motu proprio c’est de toucher les diocèses par le nerf de la guerre : les finances.
D’ailleurs c’est aussi pourquoi le Vatican a du mal à recadrer le synode allemand à cause de son immense contribution au budget du Vatican.