Mgr Jean-Yves Nahmias, évêque de Meaux, signe une tribune dans Valeurs Actuelles pour promouvoir la construction d’églises dans les nouvelles zones urbaines. Alors que l’actualité est chargée d’églises abandonnées, menaçant ruine, profanées et détruites, le lointain successeur de Bossuet, qui fait actuellement construire deux églises dans son diocèse, souligne que les territoires périurbains sont en manque croissant d’églises :
[…] Fini le temps où l’on construisait les villages autour de l’église, il faut désormais bâtir les églises là où habitent les Français. Et il faut le faire avant que d’autres bâtiments, immeubles d’habitation ou centres commerciaux n’en prennent la place !
En Île-de-France, la croissance de la population, notamment en Seine-et-Marne, pose ainsi la question urgente de l’accueil des nouveaux fidèles et surtout de la disponibilité d’églises à proximité. Que l’on soit en ville ou à la campagne, on croise très facilement des églises dans notre paysage quotidien. Mais les nouveaux territoires, périurbains, souvent en banlieue des grandes villes ou dans le Bassin parisien, ne bénéficient pas de ce maillage territorial hérité de la longue tradition chrétienne du peuple français. Au contraire, dans ces territoires, l’urbanisation se fait au rythme des intérêts économiques des investisseurs et construire des églises ne constitue alors pas une priorité.
C’est ici que l’Église doit prendre toute sa place et retrouver son ancestrale âme de bâtisseur. S’il faut bien sûr reconstruire Notre-Dame de Paris et préserver tous nos chefs-d’œuvre architecturaux, témoins de l’histoire pluriséculaire de l’Église en France, il ne faut pas oublier de bâtir les paroisses de demain, celles qui transmettront la foi aux générations qui nous succéderont, là où elles seront.
Contrairement aux idées reçues, la construction d’églises en France ne s’est pas arrêtée ces dernières décennies, loin de là. Au cours du siècle dernier, près de 1 900 églises ont été bâties, dont l’emblématique basilique du Sacré-Cœur, achevée en 1923. Il s’agissait notamment de répondre aux nouveaux besoins des fidèles qui avaient massivement quitté les campagnes pour s’installer dans des centres urbains. C’est dans ce contexte que le cardinal Verdier a lancé les Chantiers du cardinal, en 1931, pour construire des églises dans une région parisienne en pleine mutation. L’édification d’églises se poursuit de nos jours. Ainsi, en Île-de-France, huit églises ont été inaugurées depuis 2014.
Cependant, nous le vivons concrètement dans les diocèses, de nombreuses églises restent encore inadaptées à la pratique du culte catholique. Chaque village dispose de son église, mais les zones périurbaines, où vivent les populations jeunes et dynamiques, en sont parfois dépourvues. À Chelles, par exemple, la communauté chrétienne n’a pas de lieu pour rassembler les fidèles alors que la ville compte près de 55 000 habitants !
Le diocèse de Meaux a donc la responsabilité de mettre à la disposition des catholiques les moyens nécessaires à la transmission de la foi en bâtissant, rénovant et embellissant leurs lieux de culte. Afin de moderniser certains édifices fragilisés par les siècles, des églises (celles qui appartiennent aux diocèses) sont parfois détruites pour être mieux reconstruites soit sur le même lieu, soit à proximité. D’autres sont agrandies et rénovées : l’agrandissement du centre paroissial Notre-Dame-du-Val de Bussy-Saint-Georges, dans le diocèse de Meaux, illustre bien les besoins auxquels font face les fidèles. La commune, autrefois peuplée de 500 habitants, a multiplié par 40 sa population depuis 1980 et le centre pastoral, devenu trop petit, a dû être agrandi.
L’Église du XXIe siècle ne pourra faire l’impasse sur cette mission de bâtisseurs afin de permettre aux catholiques de vivre leur foi. Le diocèse de Meaux doit s’adapter à ces défis importants, et j’y consacre, avec mes collaborateurs et les communautés locales, beaucoup d’énergie. C’est dans cet esprit que le diocèse de Meaux lance la construction de deux nouvelles églises et d’une institution scolaire privée sous contrat. Alors que la Seine-et-Marne a vu sa population multipliée par près de 3 depuis les années 1960, nous devons faire face à des bouleversements pastoraux qui touchent toutes les générations.
Au cœur du Val d’Europe, l’un des territoires les plus jeunes de France avec près de 70 % des habitants ayant moins de 45 ans, la grande église Saint-Colomban, dont les travaux doivent débuter à l’automne 2023, pourra accueillir 900 fidèles. Visible et reconnaissable, elle offrira un lieu adapté à la communauté croissante des catholiques du territoire. La nouvelle église Sainte-Bathilde, à Chelles, qui remplace une chapelle devenue trop petite, sera quant à elle dotée de 800 places. Ces édifices respecteront l’architecture et l’histoire locales.
Ces projets ambitieux sont emblématiques de notre capacité à bâtir pour être au plus près de chacun. Le cœur de l’Église bat là où la population vit !