L’OJIM revient sur les abus qui auraient été couverts par le pape Jean-Paul II lorsqu’il était encore archevêque de Varsovie, accusations qui donnent lieu à une bataille rangée en Pologne entre partisans et opposants du Pape, ingérence des Etats-Unis, fausses accusations issues des services communistes ou de prêtres déviants, interventions de politiques et de médias conservateurs, etc.
Le scandale part d’un documentaire de TVN, “intitulé Franciszkańska 3, d’après l’adresse du siège de l’archidiocèse de Cracovie, situé au 3 de la rue « Franciscaine », émis le 5 mars par la télévision TVN, et de l’ouvrage intitulé « Maxima Culpa – Jean-Paul II savait » (publié uniquement en polonais) du journaliste hollandais Ekke Overbeek, qui réside à Varsovie“. Or, cette chaîne “reproche justement à l’archidiocèse de Cracovie de lui avoir refusé l’accès à ses propres archives“, rappelle l’OJIM.
“Sur ce point, précisons que, dans le paysage audiovisuel polonais, TVN est une télévision de gauche (libérale-libertaire, progressiste, pro-LGBT, euro-enthousiaste, etc. très hostile à la coalition Droite unie qui gouverne depuis 2015, avec parfois des accents anticléricaux, ce qui peut peut-être expliquer la méfiance de l’archidiocèse) et que le groupe Agora qui publiait le 8 mars le livre d’Overbeek est sur la même ligne éditoriale, de même que l’hebdomadaire Newsweek dans sa version polonaise, propriété du groupe médiatique « germano-suisse » Axel Springer (qui a en fait été racheté par le fonds d’investissement américain KKR), qui soutient à fond les thèses contenue dans le livre d’Overbeek et le documentaire de Marcin Gutowski. Ah, au fait, Agora compte un fond sorosien parmi ses actionnaires. Précisons encore que le documentaire Franciszkańska 3 est le septième d’une série consacrée à la pédophilie dans l’Église. Quant à Ekke Overbeek, l’auteur du livre Maxima Culpa, il est très engagé depuis des années dans le combat pour contraindre l’Église de Pologne à plus de transparence sur le sujet“.
Or, certains aspects du background du documentaire suscitent la polémique, rappelle l’OJIM :
“Cet auteur [Ekke Overbeek] soulève d’ailleurs un peu la polémique, d’une part parce qu’il semble faire une grand confiance à la véracité des informations contenues dans les documents de l’ancienne police politique du régime communiste, la SB (pour Służba Bezpieczeństwa – Service de sécurité), alors que les historiens sont plus prudents, mais aussi parce qu’il avait dans le passé promu la personne de Marek Lisiński, un maître chanteur (condamné par la justice) qui se faisait passer pour une ancienne victime de prêtre pédophile et qu’Ovebeek, ignorant probablement qu’il avait affaire à un menteur, avait poussé à créer la fondation N’ayez pas peur (Nie Lękajcie Się) dans le but d’apporter de l’aide aux victimes de prêtres pédophiles
On a beaucoup parlé de cette association et de son chef, Marek Lisiński, au début de l’année 2019, lorsqu’il a été reçu en compagnie d’une députée libérale au Vatican par le pape François à qui ils avaient remis un rapport sur la pédophilie dans l’Église polonaise. Il s’est rapidement avéré que le rapport contenait principalement des informations sur des cas connus, dont certains n’étaient fondés que sur des articles de presse où les allégations n’avaient pas été prouvées devant les tribunaux et n’avaient pas été vérifiées par les auteurs. L’association a finalement été dissoute en janvier 2020 quand il est apparu que Marek Lisiński avait menti depuis le début sur sa propre expérience d’enfant victime d’un prêtre pédophile, et qu’il avait inventé toutes ses accusations contre un prêtre afin de le faire chanter pour en obtenir de l’argent“.
Par ailleurs, “on remarque aussi un point faible du documentaire de Gutowski dès les premières minutes, qui mériterait presque le qualificatif de manipulation. En effet, pour conforter la thèse d’un Karol Wojtyła qui aurait couvert des prêtres pédophiles, le documentaire nous explique que le cardinal Adam Stefan Sapieha (1867–1951), archevêque de Cracovie de 1926 à 1951, était un homosexuel et qu’il harcelait sexuellement les séminaristes, dont faisait partie à un certain moment le futur Jean-Paul II, qui a même été un peu le protégé de Sapieha (une relation sexuelle entre Mgr Sapieha et le jeune Karol Wojtyła est même suggérée, sans être toutefois énoncée clairement).
L’auteur, Marcin Gutowski, le reconnaît : l’un des deux prêtres qui accablent Sapieha dans les documents de la SB n’est pas forcément crédible car c’est lui-même un homosexuel et un pédophile reconnu. Il oublie cependant de préciser qu’il avait été suspendu par Mgr Sapieha et avait donc des raisons de vouloir se venger en racontant des histoires à la SB. Il oublie aussi de préciser que les dépositions de l’autre prêtre, personnage plus crédible, avaient été obtenues sous la torture“.
Voilà de quoi nuancer fortement la polémique – mais les médias dominants français (ou étrangers dans les pays occidentaux notamment) n’éclairent pas tous les aspects de l’affaire, comme l’explique l’OJIM, preuves à l’appui.
Lire le dossier de l’OJIM sur Jean-Paul II et les abus en Pologne