Suite à la révélation, par l’archevêque émérite de Strasbourg Jean-Pierre Grallet, franciscain, qu’il faisait l’objet d’une procédure civile et canonique pour des gestes déplacés sur une personne majeure à la fin des années 1980 alors qu’il était religieux, son ordre a réagi officiellement – l’on apprend au passage qu’il a été suspendu de ses responsabilités en lien avec cette affaire il y a dix jours, et que l’évêque de Strasbourg en poste a été mis au courant voilà un an par la victime.
France info précise à ce sujet : “Les faits “remontent à l’automne 1985 alors qu’il était prêtre”, précise dans un communiqué mercredi 16 novembre l’actuel archevêque de Strasbourg, Luc Ravel.
“Ces faits ont été portés à ma connaissance par la personne victime en décembre 2021. J’ai procédé à un signalement auprès de la procureure de la République de Strasbourg en janvier 2022. Les autorités romaines [le Vatican] ont, elles aussi, été saisies. Ces enquêtes sont en cours”.
Contacté, le parquet de Strasbourg confirme dans un communiqué les propos de Luc Ravel : saisi par un signalement de Mgr Ravel en janvier 2022, l’enquête pénale, toujours en cours, a été confiée à la brigade de recherches de la gendarmerie de Strasbourg“.
A l’automne 1985 il venait de rejoindre Strasbourg depuis Besançon comme aumônier universitaire et maître des étudiants franciscains. Il enseignait aussi – jusqu’en 1986 -, l’histoire de l’Eglise au séminaire de Dijon. En 1988 il est muté à Metz comme responsable de l’aumônerie universitaire et ne revient à Strasbourg que huit ans plus tard.
Il est nommé évêque auxiliaire de Strasbourg en 2004-2007 puis archevêque de Strasbourg après la démission de Mgr Doré en août 2006, à 70 ans, cinq ans avant la limite d’âge pour raisons de santé, entre 2007 et 2017. In illo tempore il avait réservé un accueil plutôt froid à Summorum Pontificum, comme le rappelle le Forum catholique.
“Paris, le 16 novembre 2022
Par une déclaration adressée à Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des Évêques de France (CEF), Mgr Jean-Pierre Grallet, franciscain et archevêque-émérite de Strasbourg, a fait savoir qu’il fait l’objet d’une procédure canonique et d’une enquête pénale. Il reconnaît des « gestes déplacés » envers une jeune femme majeure, à la fin des années 80. Il écrit regretter profondément ce comportement.
Comme provincial des Frères Mineurs de France-Belgique, j’ai appris le 30 septembre 2022 l’existence d’une procédure canonique ainsi que d’une plainte pénale visant Jean-Pierre Grallet. Cette plainte ne concerne pas des abus sur mineurs, elle ne concerne pas non plus la période où Mgr Grallet a exercé son ministère épiscopal à Strasbourg. Elle a été portée à ma connaissance conformément au protocole établi par la Commission Reconnaissance et Réparation (CRR) de la Conférence des Religieux et Religieuses de France (CORREF).
J’ai aussitôt pris contact avec les autorités compétentes – Nonciature apostolique – pour discerner les suites à donner. En effet, du point de vue du droit interne de l’Église, il ne revient pas à un responsable de congrégation de prendre des mesures canoniques à l’encontre d’un évêque, même membre de cette congrégation. Depuis son ordination épiscopale, Mgr Grallet relève de la seule Congrégation des évêques à Rome.
Le 27 octobre 2022, j’ai rencontré les responsables de la CRR, saisie par la personne victime, afin de prendre les mesures relevant de ma responsabilité sans entraver le fonctionnement des institutions judiciaires, civiles et ecclésiales, car les procédures sont toujours en cours.
Comme provincial, je suis responsable des missions que je confie dans le cadre de la Province. J’avais confié à Fr. Jean-Pierre la responsabilité d’une maison de frères aînés. Après avoir pris l’avis du conseil de Province, j’ai décidé de le suspendre de sa charge le 4 novembre 2022 en attendant les conclusions de l’enquête.
Nous, frères mineurs, sommes sous le choc des dernières révélations dans l’Église, comme l’ensemble du peuple de Dieu. Les erreurs commises et le climat de défiance généralisé à l’égard de l’institution invitent à une grande prudence et à une grande exigence. Malgré la colère légitime, gardons à l’esprit que chaque affaire est bien singulière. Le cas de Mgr Grallet est différent de celui de Mgr Santier et de Mgr Ricard dont la presse s’est faite l’écho ces dernières semaines. Ce sera à la justice de qualifier précisément les faits et leur gravité.
Nous pensons en premier lieu à la personne victime et à toutes les personnes victimes d’abus, en particulier dans l’Église. Nous devons continuer d’entendre leur cri qui réclame vérité et justice. Nous partageons la peine de celles et ceux qui sont blessés par cette révélation. Nous réaffirmons notre volonté, ferme et résolue, de lutter contre toute forme d’abus au sein de notre province. Nous espérons que la déclaration de Fr. Jean-Pierre contribuera à ouvrir un temps nouveau pour l’Église ; une Église qui reconnaît ses fautes, qui s’engage pour réparer ce qui a été brisé et qui agit pour que ces faits ne se reproduisent plus.
Nous poursuivons notre collaboration active avec la CRR et autres instances civiles ou ecclésiales pour mieux protéger et reconnaître les personnes victimes. Nous approfondissons notre travail de prévention, d’amélioration et d’accélération de nos procédures. Nous continuons d’inviter toute personne qui s’estimerait victime d’un frère franciscain à contacter directement la CRR :
par mail : victimes@crr.contact, par téléphone : 09 73 88 25 71, ou sur le site internet www.reconnaissancereparation.org.
Fr. Michel Laloux, provincial des Franciscains de France et Belgique