La Croix identifiée, Hélène entre à nouveau en scène dans le récit de Rufin : « La reine, dont le vœu était exaucé par un signe aussi évident, fit construire, avec un faste royal, un temple magnifique à l’endroit où elle avait trouvé la Croix. » Rufin se fait ici l’écho de la tradition qui rapporte à Hélène, et non à Constantin, les constructions édifiées sur le Golgotha.
Elle prit soin également des précieuses reliques : la Croix elle-même, les clous et l’écriteau retrouvés en même temps. « Elle porte aussi à son fils les clous qui avaient servi à clouer le corps du Seigneur. Avec les uns, il fit un mors dont il se servirait pour la guerre ; et avec les autres, il garnit, dit-on, un casque non moins destiné aux usages de la guerre. »
Cette tradition concernant les clous est connue en Italie avant même le retour de Rufin puisque Ambroise en fait état dans le panégyrique de l’empereur Théodose défunt qu’il prononça à Milan le 25 février 395. Il termine son Oraison funèbre par un développement sur l’« Invention » de la Croix par Hélène et la valeur symbolique de la destination des clous à l’initiative de l’impératrice : « Hélène a cherché les clous de la Croix et les a trouvés. De l’un elle fit faire un mors, l’autre fut enchâssé dans un diadème. […] Elle envoya à son fils Constantin le diadème orné de pierres. […] Elle envoya aussi le mors. Constantin se servit des deux et transmis sa foi à ses successeurs. […]. » Et l’évêque d’expliciter la valeur symbolique de l’usage qui est fait des clous : « Sagement fit- elle de placer ainsi la croix sur la tête des rois afin que, dans les rois même, la croix du Christ fut adorée ! » Allusion au rite de l’adoratio qui voulait que l’on se prosternât devant l’empereur. La présence de la relique sacralise le diadème et celui qui le porte : en se prosternant devant l’empereur chrétien, c’est le Christ que l’on adore. Et Ambroise poursuit : « O clou béni qui tient cet Empire romain auquel l’univers entier obéit, qui sert d’ornement au front des princes afin de rendre prédicateurs de la foi ceux qui en étaient les persécuteurs ! »