Mgr Wintzer ne brille habituellement ni par la clarté de son style, ni par la netteté de ses déclarations. Originaire de Normandie, comme son nom ne l’indique pas, il est culturellement rompu à la pratique du ni oui, ni non. Promu au siège de Poitiers à une succession très difficile, sa nomination avait soulevé beaucoup d’espoirs. Il semble qu’il se soit ensablé dans les méandres du Clain, et qu’il ne sorte pas son pauvre diocèse des impasses dans lesquels son prédécesseur l’avait engagé avec la superbe et la morgue que l’on sait. On ne peut pas totalement reprocher un tel échec à cet évêque « de moyenne quoique d’honnête grandeur », tant la situation était désespérée. Il n’empêche, de fermeture de séminaire en éloignements des prêtres dissidents, de déclarations alambiquées en silences complices, sous son pontificat l’échouage se transforme inexorablement en naufrage.
Ses propos, en guise de commentaires aux prises de position liturgiques du cardinal Robert Sarah, n’avaient guère – c’est un euphémisme – contribué à « réorienter » ses diocésains et ses lecteurs. Ses ultimes déclarations sur la politique française laissent interloqué.
Passons sur le style. Comment mieux s’emberlificoter les pieds dans les tapis de son Évêché ? Difficile de faire mieux dans le pas de deux, pour reprendre d’une main ce que l’on suggère d’avoir donné de l’autre sans l’avoir fait, tout en donnant à penser que l’on n’a pas dit ce que l’on a déclaré. Ces entrechats donnent le tournis. Comme le disait finement un commentateur : « il s’agit bien d’un évêque français, qui aime la mer calme, et transpire à l’idée qu’une vague si petite soit-elle, ne vienne l’ébranler ». Passons aussi sur la langue, monument de langue de buis, molle, imprécise, contournée. Nous ne sommes pas d’étroits censeurs, mais il y a de quoi s’interroger sur le sens de certaines propositions : « … les élections du printemps 2017 donneront à chaque électeur une capacité à décider d’un changement… », « ils… formulent des attentes » ; « on scellerait la perversité d’un système qui renvoie ou bien chacun à lui-même ou bien les gens dos à dos ». On dirait du François Hollande dans le texte. À aucun moment, il n’est possible de savoir s’il parle en sociologue, en moraliste, en théologien ou en pasteur… On constate une accumulation biscornue de « ils », de « ceux qui », l’abus du passif contraire aux usages de la langue française, etc. Passons, passons.
À nouveau, les déclarations de Mgr Wintzer laissent sans voix. Rien de vraiment faux, rien de vraiment choquant… sauf à considérer que cette accumulation d’à-peu-près, de demi-aveux, de sous-entendus obscurs, finit par embrouiller totalement la question. En définitive, pourquoi cette attention réservée à un seul parti explicitement désigné ? Pourquoi cette pudeur à l’encontre des autres ? Ils mériteraient, eux aussi, l’attentive sollicitude de nos pasteurs, eux dont les principes et les pratiques, connues de tous, mériteraient bien des mises en garde aussi nettes. La justice, c’est « à chacun selon son dû », et non pas l’acharnement sur le bouc émissaire. Or, seul le FN fait nommément l’objet des foudres épiscopales. Encore une fois, pourquoi ? Qui choisit? Est-il le seul à « être passé maître », à jouer sur les peurs, le seul parti pour lequel voter serait une « tentation » ? Allons, tout ça n’est pas sérieux et sent le parti pris.
Si « l’Évangile sera toujours une instance critique vis-à-vis de soi-même ; avant de faire porter aux autres une responsabilité, il appelle à considérer la poutre qui obstrue son œil », alors, « on a envie de dire », pour parler comme le successeur de saint Hilaire : « Messeigneurs, de Poitiers ou d’ailleurs, commencez par vous appliquer cette sage maxime à vous-même ! Ne rajoutez pas de chaos au chambardement. Sur l’Europe (Lagleize), le terrorisme (Pontier, Maillard), la liturgie et la politique (Wintzer), et tant d’autres problèmes, si vous n’avez rien à dire – ce qui semble visiblement le cas – balayez devant votre porte et restez discrets ».
Le silence est d’or, les cours sont en hausse, profitez-en !
Gaston Champenier