En cette fin septembre, la France se rappelle au Ciel. Une neuvaine est lancée au plus haut des Cieux, portée par saint Michel, une autre sourd de l’archidiocèse de Reims qui fête, le 1er octobre, Remi son patron. Après la grande neuvaine de l’an dernier, restent donc les « petites neuvaines » qui fleurissent sur cette vieille terre de France. Et Dieu sait qu’elle en a besoin !
Mais Dieu sait aussi que pour que nous ne nous attribuions pas des mérites indus, il nous faut quémander, quémander, quémander sans cesse. La France est meurtrie. Meurtrie dans son cœur de Fille aînée de l’Eglise, meurtrie dans son âme d’évangélisatrice des peuples, par la désertion de ce peuple égaré, tenté par le veau d’or de l’humanisme athée, devenu athéisme « humanicide », par le tranchant parricide de l’orgueil.
Pourtant, cette terre bénie de Dieu, visitée par son Fils, par sa Mère, par ses archanges, terre refuge des compagnons du Christ, Madeleine, Lazare, Joseph d’Arimathie, terre native du plus grand nombre de saints, cette terre tuméfiée par le reniement de ses enfants demeure, aux yeux du monde, la terre prophétique de la chrétienté, la terre d’espérance du renouveau de la civilisation du Christ. En témoignent les assauts qu’elle subit de l’extérieur par les hordes fanatisées du démon qui, sur son sol, sont venus sacrifier le Christ officiant, à l’autel de Saint-Etienne-du-Rouvray. En témoignent les assauts du dedans menés par une idéologie mortifère qui se veut la nouvelle voix prophétique de la France et ajoute aux plaies du Christ sacrifié les plaies de l’Egypte insoumise.
Comment se fait-il qu’une terre qui a tant reçu de Dieu, une terre donnée par son roi à Notre Dame, soit aussi abandonnée ? Qu’avons-nous donc fait ? Qu’ont fait nos aïeux « pour mériter ça » ? Dieu oublierait-il d’avoir pitié, comme se plaint le psalmiste ? Tout cela ne serait-il que juste retour de nos infidélités ? Peut-être…. Car, comme le dit saint Cyprien de Carthage, Dieu châtie pour t’avertir et te corrige pour t’éduquer.
Le malheur qui s’abat sur le juste, longtemps incompris dans la Bible, est une épreuve qui vérifie la qualité de la foi, nous dit saint Pierre, mais aussi, comme le rappelle le livre d’Esther, il est un avertissement pour celui qui s’approche de Dieu. C’est une purification, une invitation à l’humilité et à l’écoute, prémices de la contemplation.
Le malheur qui s’abat sur les méchants est avant tout une conséquence de leur éloignement de la main protectrice de Dieu. La mal est une des conséquences de notre refus de Dieu. Nous écartant du droit chemin, nous tombons dans le précipice de la souffrance, nous nous livrons nous-mêmes au pouvoir de Satan. En nous coupant de Dieu, nous nous fermons à ses grâces, à ses appels à la conversion. Et il faut souvent à Dieu bien des efforts pour se faire entendre dans le brouhaha peccamineux qui nous enveloppe. Dans sa sagesse, il a beau appuyer là où ça fait mal, pour nous révéler notre erreur, rien n’y fait et il nous faut bien souvent atteindre le fond du gouffre pour enfin percevoir le murmure discret mais insistant de l’Esprit qui dit « viens ».
Ce qui est vrai de chacun l’est collectivement d’une nation. Petit à petit, la France s’est coupée de Dieu, s’est laissé enfouir sous le fatras du péché, aveugler par l’orgueil de sa suffisance. Ce faisant, ses oreilles se sont bouchées et ses yeux sont devenus aveugles, tandis que ses mains se sont fermées. Alors, conformément à la prophétie intemporelle du Magnificat, les riches repartent les mains vides et les puissants sont tombés de leur trône. Des décennies durant, la France a cessé de crier vers le Ciel. Fin des adorations, des processions du Saint Sacrement, suppression de la prière à saint Michel à la fin des messes sont autant mains riches qui se sont fermées, n’attendant plus rien de Dieu.
La France ne redeviendra la France que si elle retrouve sa vocation de priante et de suppliante. Le peuple de France est reconnu comme un peuple spirituel et contemplatif, il lui faut retrouver son âme d’orant. Se perdre dans l’activisme est une des nombreuses chausse-trappes du démon. C’est par sa vocation spirituelle et contemplative que la France redeviendra ce doigt tendu vers le ciel, cette nation prophétique. C’est de ce prophétisme priant que la Fille aînée de l’Eglise pourra à nouveau être éducatrice des peuples. Je ne dis pas qu’il ne faut pas agir. Je dis qu’il faut agir dans la prière. Je ne dis pas que nous agissons trop, je dis que nous ne prions pas assez. C’est de l’adoration, de ce cœur à cœur intime avec le Christ qu’un feu nouveau embrasera la France. Du reste n’est-ce pas ce que le Sacré Cœur ne cesse de demander ? Une conversion de chacun au Cœur Sacré pour que la France puisse enfin honorer cette demande du Christ qui attend cette consécration à son Sacré Cœur.
Mais accepter de tout remettre au Christ est dépouillant. Dépouillant parce que c’est lui laisser le choix des règles du jeu et du temps. Dépouillant parce que cela suppose une plus grande humilité, une plus grande confiance et abandon total. Mais comment pouvons-nous croire que nous ferions mieux que Lui ?
Nous sommes entre Ciel et terre. Le combat que livre le démon à la France est trop violent pour que nous puissions croire y arriver sans Dieu. Mais Dieu attend notre prière pour creuser en nous le désir du salut, pour nous rendre humbles face à la victoire qu’il promet afin que nous ne retombions pas, comme tant de fois le peuple hébreu, dans nos vieux démons, oubliant le Seigneur dès le péril passé.
Pour espérer revoir le Christ régner sur la France, il faut d’abord que toute sa terre irradie de prière. Mais nous manquons tellement de foi, d’espérance… et de patience !