Nous venons de célébrer avec bonheur la fête de la « Croix glorieuse ». Hélas, calendrier électoral oblige, La Croix, quotidien supposé catholique, nous invite les jours prochains à une célébration bien piteuse.
On nous annonce en effet à grands coups de trompe que ce journal va envoyer à tous ces abonnés, un hors-série de 100 pages sur le Front National. Non, non, bien sûr, affirme-t-on, la main sur le cœur, avec un sourire de marchand de voitures : « Non. Ces 100 pages ne sont pas un tract anti-Front national, ni un contre-argumentaire. » Figurez-vous que ces belles âmes découvrent la lune : « On ne comprend pas nous-mêmes pourquoi le phénomène touche aujourd’hui autant de chrétiens. Alors, on a cherché à comprendre plutôt que de dénoncer”, explique le rédacteur en chef de la revue, jésuite dit-on, Projet, Jean Merckaert. Je vous laisse le plaisir de découvrir sur internet le pedigree de ce soi-disant fils de saint Ignace.
Quant à l’argumentaire, les lecteurs verront. C’est un monument où l’on ne sait ce qu’il faut admirer le plus, la langue de buis, la fausseté mensongère, ou le vide intersidéral de la pensée politique : « Reprenons aussi ce qui nous guide au moment d’aller voter. Est-ce que nous avons encore une espérance ? J’ai du mal à sentir une espérance dans le vote d’extrême droite. […] L’espérance est la pointe de la foi chrétienne. Même dans les circonstances les plus extrêmes, les chrétiens continuent d’espérer.» Le reste est du même tonneau.
On se croit revenu aux plus belles heures de La Croix successivement, avec le même aplomb, le même cynisme et le même appui des évêques français, « journal le plus antisémite de France », nationaliste jusqu’au-boutiste antiallemand, action française, collabo, résistant, démocrate-chrétien, socialiste soixante-huitard, toujours et partout, organe du parti de la bien-pensance ecclésiastique, toujours donneur de leçon, toujours en retard d’une guerre. « La constance en héritage », pour paraphraser la pub !
Ne boudons pas notre plaisir et précipitons-nous sur ce collector. Cela nous permettra d’attendre sans impatience le texte que préparent les évêques sur le sujet… Décidément, l’automne est une saison féconde.
Ah, pour finir, une dernière, en forme d’envoi.
Depuis quelques jours, madame de Gaulmyn, se répand dans les médias. Figure du paysage médiatique catholique français, rédactrice en chef adjointe à La Croix, donneuse de leçon patentée, juge infaillible du bien et du mal dans l’Église, elle fut chienne de meute du lynchage du père Benoît (l’un de ses derniers méfaits). Elle fait l’article pour son dernier livre sur l’« affaire Barbarin ». En bref, elle sait tout du cas Preynat depuis des années… et n’a rien dit (y compris ces derniers mois), mais elle va tout nous dire maintenant, parce qu’un journaliste c’est un défenseur de la vérité, etc., etc.
Quelles sont ses motivations ? Agit-elle sur ordre ? Une source proche du dossier, mais qui a demandé à garder l’anonymat, évoque davantage une opération d’auto-psychanalyse, d’évacuation de la culpabilité cette bourgeoise lyonnaise du genre « héroïne » des Deux étendards… Mais les grandes douleurs sont muettes. Pourquoi ce papotage multidimensionnel ? Qu’on ne nous fasse pas le coup de la repentance!
Lorsque l’on s’est tu sur des sujets aussi graves, on continue à se taire. À sa place, j’aurais été m’enfermer dans un monastère pour méditer. Il parait que c’est la solution à tous les plaies de l’Église… Et puis elle y retrouvera son collègue, le comique vieillissant Élie Semoun. C’est trop tendance dans la profession !
Gaston Champenier