Après avoir été déboutée pour divers motifs et à plusieurs reprises, Petra De Sutter n’en démord pas et revient à la charge, pour la promotion de la GPA, mais en tentant un écran de fumée à peine dissimulé.
La GPA, nombre de députés sont d’accord, c’est de l’esclavagisme. C’est du reste l’argument principal pour ne pas dire unique. Les intérêts de l’enfant sont bien peu pris en compte, tant le droit à l’enfant lui semble supérieur.
Alors que Madame De Buttler, au passage, professionnelle de la GPA et de la PMA à l’hôpital de Gand, tentera à nouveau sa chance le 21 septembre prochain au parlement Européen, en Inde, le 24 août dernier marque une nouvelle étape dans la marche arrière concernant la GPA.
En effet, devenue une plateforme mondiale de la gestation pour autrui suite à la légalisation de cette pratique en 2002, l’Inde s’apprête à restreindre fortement l’accès à la GPA en interdisant aux étrangers ainsi qu’aux Indiens non résidents d’y avoir recours, nous rapporte l’AED.
Les abus de la GPA sont tels que le gouvernement indien a adopté le 24 août dernier un projet de loi intitulé Assisted Reproductive Technologies Regulation Bill (ou Projet de loi de régulation des technologies liées à la reproduction assistée), destiné à lutter contre les dérives du système. Il sera présenté à la session d’hiver du Parlement fédéral.
Cette loi, proposée par le BJP, le parti nationaliste hindou au pouvoir à Delhi, vise à interdire la GPA à titre onéreux mais autorise, de manière très encadrée, la GPA dite « altruiste ». Selon les termes du texte, seuls les couples hétérosexuels, mariés depuis un minimum de cinq ans et sans enfant pourront avoir recours aux services d’une mère porteuse. Celle-ci ne pourra plus être rémunérée. Toute transaction financière sera interdite si ce n’est pour couvrir des frais médicaux. Les mères porteuses enfin ne seront autorisées à porter le ou les enfants d’un autre couple qu’une seule fois dans leur vie, et devront déjà avoir mis au monde au moins un enfant. Enfin, une des principales nouveautés du texte réside dans le fait que la GPA ne sera désormais possible que dans un cercle familial « étroit » : la mère porteuse et le couple initiateur de la GPA devront être « étroitement apparentés ».
Depuis une dizaine d’année, l’Inde est devenue l’une des destinations les plus plébiscitées pour les personnes en quête de GPA grâce à la compétence de ses médecins, l’important vivier de mères porteuses potentielles, et des prix particulièrement attractifs. Plusieurs milliers de couples indiens ou étrangers – 2 000 par an selon les statistiques du gouvernement – ont eu ainsi recours à la GPA pour avoir des enfants. D’après une enquête menée par les Nations Unies, il existe en Inde 3 000 cliniques dites « de la fertilité », spécialisées dans la GPA, et cette industrie génère un chiffre d’affaires de 400 millions de dollars par an.
Figaro Vox rappelle que Petra De Buttler “collabore avec une entreprise de GPA commerciale en Inde (Seeds of innocence). Elle a donc tout intérêt à faire accepter la GPA par le Conseil de l’Europe, surtout à l’heure où cette manne indienne semble vouée à disparaître, à horizon fin 2017.
Depuis que la GPA a été autorisée en 2002, nombre de mères porteuses y trouvent le moyen de gagner de l’argent – le « salaire » d’une grossesse équivaut souvent à environ sept années de revenu en milieu rural –, et d’accéder à une vie meilleure. Sans se soucier des effets physiologiques et psychologiques d’une grossesse, elles acceptent de louer leur ventre, et parfois de renouveler plusieurs fois l’expérience.
Devant les proportions considérables qu’a pris ce marché et pour éviter les abus, une première loi a été votée en Inde en 2012 interdisant aux célibataires et aux couples homosexuels étrangers d’avoir recours aux services de mères porteuses. En octobre 2015, le gouvernement indien a fait part de son intention d’interdire complètement la GPA aux étrangers. Depuis, ceux-ci ne peuvent plus obtenir de visas médicaux en vue d’une GPA, et les cliniques indiennes n’ont plus le droit de leur proposer ce service.
S’il faut regarder d’un œil très positif cette marche en arrière indienne, ne crions pas victoire trop tôt, car l’Inde pose la même distinction que Madame De Buttler, en prévoyant d’autoriser toujours la “GPA altruiste”.
Une distinction qui peut sembler respecter la femme, qui ne serait plus une esclave des temps nouveaux, mais qui pour autant, laisse pour compte l’enfant lui-même.
En jouant sur le double affect du droit à l’enfant et de la non servitude de la femme, la GPA altruiste se pare même d’une aura de bienfaisance, qui n’est autre que le nouvel écran de fumée des promoteurs de la GPA.
Or comme le souligne ce même article de Figao Vox
Cette approche, apparemment consensuelle, est un piège.
Le piège repose sur une opposition largement fictive entre GPA altruiste et commerciale: la première serait bonne, et la seconde mauvaise. D’altruiste, la GPA deviendrait commerciale lorsque la somme versée à la mère porteuse serait supérieure aux «frais raisonnables» causés par la GPA, or ceux-ci incluent nourriture, logement, perte de revenus, etc, ainsi que l’indemnisation de «l’inconvénient d’être enceinte». Autant dire que, le plus souvent, ces frais raisonnables sont une rémunération déguisée.
La dialectique opposant GPA commerciale et altruiste est un piège qui réduit et enferme l’appréciation morale de la GPA à l’un de ses aspects secondaires: l’argent. De fait, le problème avec la GPA, ce n’est pas tant l’argent que la situation de l’enfant et de la mère qui le porte. Une GPA moins chère n’en serait pas moins préjudiciable et condamnable.
Plus encore, l’opposition entre GPA commerciale et altruiste est fictive: la seule différence porte sur le nom donné à la rétribution de la mère: on parle d’un paiement pour la GPA commerciale et d’une indemnité pour la GPA altruiste. Mais notez que le montant de l’indemnité peut être très supérieur à celui du paiement! Alors qu’une mère porteuse reçoit environ 20 000 € «d’indemnités» au Royaume Uni, elle ne reçoit que 10 000 € de «paiement» en Europe de l’Est et 2 000 € en Asie. Verser 20 000 € «d’indemnités» serait plus éthique que 10 000 € de «paiement»…
Du reste le projet indien ne fait pas l’unanimité en Inde, précise l’EAD
Si certains perçoivent ce projet comme une avancée en faveur de la défense de la condition des femmes, d’autres le jugent « régressif, cruel et contraire à l’intérêt des femmes ». « Le gouvernement a négligé les malheurs des femmes sur les deux extrémités du spectre – les femmes infertiles et les femmes pauvres qui choisissent la GPA pour combattre la pauvreté. […] Tandis que les femmes infertiles n’auront pas le droit de bénéficier d’un traitement médical avancé, des centaines de femmes qui ont tiré leurs familles de la pauvreté ne pourront plus avoir l’opportunité de mener une vie respectable », a déclaré le docteur Nayna Patel, pionnière de la GPA à Anand, dans le Gujarat, à l’ouest du pays. Par ailleurs, et même si les relations homosexuelles n’ont pas été dépénalisées en Inde, certains considèrent ce projet de loi comme étant discriminatoire envers les couples homosexuels désireux d’adopter.
Des experts de la fécondité s’inquiètent, quant à eux, du fait que cette loi puisse entraîner le développement de réseaux souterrains de mères porteuses. Selon eux, il est improbable que des femmes acceptent de prêter leur ventre gratuitement. Et la mise en place de réseaux souterrains risquerait de dégrader encore d’avantage la situation des mères porteuses, font-ils valoir.
Prendre appui sur l’esclavage des femmes ou sur la dimension financière de la GPA, qu’elle soit altruiste ou non est encore une impasse future dans laquelle nous pourrions bien nous retrouver dos au mur. Tant que l’enfant ne sera pas protégé, du droit à l’enfant, la GPA restera pour lui une menace sérieuse.