Malgré sa nouvelle composition, la Cour Suprême des Etats-Unis a rejeté la procédure engagée par Sandra Cano (« Mary Doe ») contre la décision de 1973 établissant que l’avortement est légal dès lors qu’il vise à protéger la santé de la femme : par extension au domaine psychologique, l’avortement était alors devenu aux Etats-Unis un « droit » constitutionnel. En écartant toute considération de délais, la jurisprudence Doe v. Bolton avait, en outre, ouvert la porte aux avortements extrêmement tardifs qui se pratiquent aux Etats-Unis, y compris l’avortement « par naissance partielle » qui consiste à faire naître l’enfant par le siège et à aspirer son cerveau avant de finir d’extraire sa tête du corps de la femme…
L’affaire Doe était ainsi venu achever le travail commencé par Roe v. Wade, jurisprudence établissant que la plupart des lois interdisant l’avortement portaient atteinte à la vie privée. Il s’agissait dans l’affaire Doe de faire invalider une loi de l’Etat de Géorgie qui interdisait l’avortement sauf en cas de viol, de grave déformation fœtale ou de grave danger pour la santé de la mère – et donc de désamorcer les éventuelles exceptions à la jurisprudence Roe v. Wade.
« Jane Roe », Norma McCorvey, ne devait en réalité jamais avorter et elle milite depuis contre la jurisprudence qui a ouvert les portes au massacre, expliquant que ses avocats avaient abusé de son ignorance pour faire avancer leur cause. Même scénario dans l’affaire « Mary Doe » : Sandra Cano était à l’époque enceinte et en instance de divorce : elle cherchait à défendre ses droits face à un mari violent et à obtenir la garde de ses premiers enfants, se trouvant effectivement en une réelle situation de détresse.. Elle estime elle aussi avoir été « utilisée » pour une cause à laquelle elle n’adhérait pas : d’ailleurs elle non plus n’avait pas avorté, confiant son enfant à l’adoption. Comme « Jane Roe », elle n’avait jamais été entendue par les juges…
Elle a argué de cette fraude devant la Cour Suprême, expliquant qu’on s’était contenté de lui arracher la signature d’une plainte dont le but réel avait été de modifier la loi de son Etat. Elle a rappelé que, contre son gré, son nom et sa vie sont désormais liés au « massacre de 40 à 50 millions de bébés ». Comme motif légal de la demande de révision, son avocat avançait l’existence d’une « situation nouvelle » : les milliers de témoignages de femmes qui regrettent amèrement d’avoir eu l’option d’avorter, et la certitude scientifique que l’enfant à naître est un être humain dès la conception.
La Cour Suprême, toujours favorable à l’avortement à 5 contre 4, a rejeté la demande de Sandra Cano sans aucun commentaire et sans la moindre motivation, à l’unanimité des juges semble-t-il.