Lundi 16 décembre 2024, Mgr Sylvain Bataille, évêque de Saint-Etienne, présentait ses vœux à l’ensemble des élus, autorités civiles et militaires, responsables religieux, associatifs et économiques en présence des Curés et Responsables des services diocésains.
DISCOURS DE MGR BATAILLE :
Chers amis, soyez tous les bienvenus ! Merci d’avoir répondu à mon invitation. Dans l’Église nous commençons la nouvelle année avec un mois d’avance, le mois qui nous prépare à célébrer Noël, d’où cette date qui peut sembler un peu avancée pour la présentation de mes vœux.
RÉOUVERTURE DE NOTRE-DAME DE PARIS, UN SIGNE D’ESPÉRANCE
En huit jours, nous venons de vivre deux événements religieux particulièrement marquants en France. Hier le Pape François est venu visiter la Corse. Avec sa fraîcheur, sa foi et sa grande simplicité, il a touché les cœurs.
Une semaine plus tôt, nous avons vécu la réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris, à laquelle j’ai eu la joie de participer. L’incendie du 15 avril 2019 restera dans l’histoire. Dans les premières heures, il semblait impossible à maîtriser, tout-puissant : le retard pour identifier le feu et appeler les pompiers, les grandes difficultés pour accéder au foyer de l’incendie dans les combles, le vent fort qui poussaient les flammes vers les deux tours, sachant que leur embrasement aurait conduit à l’effondrement de la cathédrale… Tout semblait perdu, la chute de la flèche en a été le symbole. Dans le même temps, les gens se sont rassemblés et se sont mis à prier la Vierge Marie, non seulement sur les quais de Seine, mais bien au-delà.
Imperceptiblement, on a assisté à un basculement : les renforts ont fini par arriver, le vent s’est inversé, les pompiers ont pris les bonnes décisions, ils ont fait preuve de beaucoup de compétence et de courage… C’est ainsi que le feu a été maîtrisé et que la cathédrale est restée debout. De même, tout au long de la reconstruction, nous avons perçu cette alliance entre la compétence des hommes, dans une très grande diversité de talents, et une puissance d’un autre ordre, spirituelle, qui a permis la communion, l’élan intérieur, pour réaliser en cinq ans ce qui semblait humainement impossible. Le résultat révélé ces derniers jours est un succès étonnant.
Notre-Dame de Paris est un signe d’espérance pour toute notre société, une très belle parabole de l’articulation entre l’action de Dieu et celle des hommes. Ce qui a été vrai ici, l’est aussi de bien d’autres manières, sans même que nous en ayons conscience. Par-delà les confessions de foi, la puissance de l’Esprit est à l’œuvre dans tous les cœurs un peu disponibles à son amour, un peu libres d’eux-mêmes pour pouvoir se donner.
Cependant, 2024, comme toutes les années qui ont précédé, mais peut-être avec une intensité particulière, a été marquée par bien des difficultés : les guerres avec leur cortège de souffrances, en Ukraine, à Gaza, au Liban, en Syrie, les tensions qui traversent notre pays au point de le rendre difficile à gouverner en ces temps où il a de grands défis à relever. Je pense aussi au recul inquiétant du respect de la dignité de toute personne humaine, quelle qu’elle soit. Des droits nouveaux et individuels finissent par contredire les droits fondamentaux et fausser les points de repères essentiels de notre vie en société. On voit aussi grandir la pauvreté dans nos pays dits « développés », avec la question toujours plus complexe de l’accueil des personnes migrantes, mais aussi avec tant d’autres pauvretés cachées, tout près de nous. À tout cela s’ajoutent les dérèglements climatiques aux conséquences toujours plus graves, et nous avons une pensée pour le drame que vivent en ce moment les habitants de Mayotte.
Je m’arrête là, mais toutes ces difficultés induisent des sentiments de peur et d’insécurité, des réactions de repli. Cependant, un regard qui ne voit que le négatif n’est pas vrai. Comme nous l’avons constaté pour Notre-Dame de Paris, il y a une puissance spirituelle de vie et d’amour qui anime notre humanité. Elle se manifeste par tant de générosités, tant d’engagements. J’en suis le témoin au quotidien.
L’année qui va s’ouvrir sera pour nous une Année sainte, à l’occasion des 2025 ans de la naissance de Jésus-Christ. Il est notre espérance, et c’est le thème que le Pape François a choisi pour cette année, en reprenant la phrase de saint Paul : « L’espérance ne déçoit pas ». Certes nous faisons tous l’expérience de la déception. Nos attentes, même les plus légitimes, peuvent être déçues. Par-delà ces déceptions, l’espérance est une ouverture à l’au-delà, une confiance en la vie, en l’amour, en la puissance de Dieu. Elle permet de dépasser les difficultés et les tensions du quotidien, avec cette certitude que la vie aura le dernier mot, certitude qui pousse à l’engagement au quotidien, là où nous sommes.
Les chrétiens essaient d’en témoigner au cœur de ce monde et nous tenterons de le faire d’une manière toute particulière en cette année 2025, avec toutes les personnes de bonne volonté, avec tous ceux qui ont cette ouverture intérieure à l’Esprit, par-delà les confessions de foi et les convictions personnelles.
RETOUR SUR L’ANNÉE 2024 DANS NOTRE DIOCÈSE
Après ces réflexions plus générales, permettez-moi de revenir plus précisément sur l’année écoulée, sur la manière dont elle a été vécue dans le diocèse de Saint-Étienne.
Ce qui a marqué cette année, c’est la transformation que nous vivons dans notre Église de France, et en particulier dans le diocèse de Saint-Étienne. D’une part nous faisons face à un vieillissement et à une baisse numérique des membres de nos communautés, ce qui nous conduit à faire des choix à tous les niveaux, à renoncer à des manières de faire, à nous adapter à une situation nouvelle. D’autre part, le phénomène que nous percevons depuis 2 ans autour d’un renouveau des demandes de baptêmes des collégiens et des lycéens, mais aussi des adultes, en particulier entre 20 et 40 ans, s’accentue de manière étonnante dans la plupart de nos communautés.
Cette soif spirituelle, constatée aussi dans d’autres confessions religieuses, est réjouissante. La plupart du temps, ces personnes font d’abord une expérience intérieure de rencontre du Christ, qui nous dépasse. Cela les engage dans une recherche personnelle puis, le moment venu, elles viennent frapper à la porte de nos paroisses, de nos écoles catholiques. Certaines sont de tradition chrétienne et d’autres pas du tout. Comment les accueillir ? Comment les accompagner ? Comment leur donner toute leur place dans nos communautés et accueillir les richesses qu’elles portent ? Notre Église est en train de prendre un nouveau visage. C’est une vraie joie et un défi pour nous, avec cette certitude intérieure que le Seigneur est à l’œuvre.
Pour ce qui concerne les prêtres, nous avons eu cette année la joie d’ordonner trois diacres trentenaires qui deviendront prêtres l’an prochain. Il y a aussi eu de nombreux changements : sur 26 paroisses, 10 ont changé de curé et un tiers des prêtres a changé de mission. Cette année a aussi été marquée par le décès de deux figures marquantes de notre diocèse. Tout d’abord le Père Louis Tronchon, fondateur de la radio RCF de Saint-Étienne ainsi que du Centre spirituel Notre-Dame de Grâce à Chambles, et qui fut très engagé dans le jumelage de notre diocèse avec celui de Batroun, au Liban. Quelques semaines plus tard, le Père Gérard Riffard nous quittait. Il avait fondé l’association Anticyclone à Montreynaud, au service des migrants. Ce sont des pages qui se tournent, mais les défis demeurent et la mission se poursuit. Je me réjouis de la générosité de tant de chrétiens qui s’engagent, avec beaucoup d’autres, au Secours catholique, à la Société Saint-Vincent-de-Paul et dans tant d’associations qui se mettent au service des migrants et des plus pauvres.
2025 : UNE ANNÉE JUBILAIRE
Et maintenant, jetons un bref regard vers 2025, pour autant qu’on puisse le faire. Comme je vous l’ai dit, ce sera pour nous une Année sainte, une année de jubilé, c’est-à-dire de joie. Elle est une invitation à la conversion et au renouveau intérieur, en particulier grâce à la démarche jubilaire que nous pourrons vivre non seulement à Rome, mais aussi chez nous, dans quatre lieux jubilaires : la cathédrale Saint-Charles de Saint-Étienne, la collégiale Notre-Dame d’Espérance de Montbrison, le Sanctuaire Notre-Dame de l’Hermitage à Noirétable et le Sanctuaire Notre-Dame de Valfleury.
Cette espérance, nous allons aussi l’approfondir et la partager en petites fraternités locales. Cela nous orientera vers la grande fête diocésaine du dimanche 12 octobre 2025 au Parc-expo de Saint-Étienne, une fête avec tous les catholiques du diocèse, que nous voudrions largement ouverte, ressourçante et missionnaire.
Je conclue : que faut-il se souhaiter pour cette année 2025 ? Peut-être simplement de garder l’espérance dans nos cœurs, avec ce regard qui voit au-delà du mal et des conflits, ce regard qui permet de s’ouvrir aux autres et de s’engager avec tous ceux qui veulent contribuer au renouvellement de notre société.
Je vous souhaite donc une année d’espérance, une espérance accueillie, une espérance partagée, une espérance offerte, et d’ici-là un joyeux Noël.
+ Sylvain Bataille, évêque de Saint-Étienne