Le préposé général depuis 2021 de l’ordre des Carmes Déchaux, le frère Miguel Marquez Calle, a écrit le 21 novembre dernier à l’ensemble de son ordre pour définir les cas d’abus de pouvoir, et mettre fin à la culture du silence. Quelques extraits de cette lettre :
“Les médias ont mis en lumière la présence d’abus sexuels dans l’Église, tant sur les mineurs que sur les adultes. Nous avons tous pris conscience de cette réalité. Auparavant, elle était entourée de silence et de secret, et il était demandé de ne pas parler et de ne pas dénoncer.
Aujourd’hui, la situation change au sein de l’Église et de la société civile. Et c’est une bonne chose. En tant que Père Général de l’Ordre, ces dernières années, j’ai constaté que nous, les Carmes Déchaux, nous ne sommes absolument pas exempts du danger des abus contre lesquels l’Église nous met en garde et nous corrige : abus d’autorité, abus de pouvoir, abus sexuels, abus de conscience, etc.
[…] En avril 2024, lors de la rencontre à Nemi avec les présidentes et les déléguées des Fédérations et des Associations des Carmélites Déchaussées en vue de la révision des Constitutions 1991, nous avons clairement évoqué la nécessité d’un discernement et d’un accompagnement. Je vous invite à relire la conférence Le Carmel thérésien aujourd’hui. Je rappelle quelques idées importantes : « Des atmosphères étouffantes et excessivement contrôlées (je ne parle pas du besoin d’ordre et de discipline) persistent dans nos couvents et nos monastères, ce qui détruit la confiance et cause beaucoup de tristesse. Thérèse d’Avila prône un style exigeant et un dévouement généreux, dans un climat de confiance et de liberté, où l’on respire et où « tous doivent s’aimer ».
Aujourd’hui, on trouve aussi certaines pathologies : des manipulateurs dotés de charme, des personnes qui séduisent, qui ont un côté doux ou charmant mais qui n’acceptent pas les opposants ou les dissidents. Ils vous aiment et le jour où vous n’allez plus dans leur sens, ils vous rendent la vie impossible. On trouve également le chantage affectif et les abuseurs deviennent des victimes lorsqu’on les contredit ou que l’on a une opinion différente de la leur. Nous devons ouvrir les yeux et créer des communautés où règnent la transparence et la vérité, où vivent des hommes et des femmes mûrs qui reconnaissent leurs limites et se laissent aider. Nous devons faire le ménage dans nos vies et nous « détromper ». Nous devons aider ceux qui protègent leurs propres complexes en faisant preuve de rigidité et d’autoritarisme excessif envers les autres ».
[…] Dans le Carmel thérésien, il y a malheureusement eu des cas de religieux prêtres abusant de religieuses. Celles-ci faisaient confiance à ces prêtres qui avaient autorité (supérieurs), qui étaient leurs confesseurs, leurs directeurs spirituels ou des frères partageant le même charisme. Certains de nos frères ont manqué à leur consécration religieuse et à leur mission de supérieurs, de confesseurs, de directeurs spirituels et comme frères.
Je demande pardon, comme Père Général de l’Ordre, à tous ceux et à toutes celles qui, dans le cadre du Carmel, ont subi ou subissent un abus quelconque de la part de l’un de nos frères ou sœurs, religieux ou laïcs. J’exhorte ceux et celles qui sont enclins à abuser à demander de l’aide sans tarder et à se laisser accompagner, afin de ne pas causer de préjudices ou de les réparer, s’ils en ont commis.
Je demande à Dieu pour toutes les victimes la guérison des peurs, des blessures et la restauration de leur liberté, de leur joie et de leur dignité. Aujourd’hui, marcher dans la vérité au Carmel thérésien, c’est dénoncer toutes les formes d’abus et œuvrer pour la justice et la charité. Ne nous laissons pas gagner par la peur ou par un faux respect. Nous devons avoir peur du mensonge et non de la vérité“.