Pour sa première édition, le pèlerinage traditionnel provençal Nosto Fe a réuni plus de 2000 marcheurs de Cotignac à Saint-Maximin la Sainte-Baume – pour 700 inscrits, alors qu’en Bretagne, la 7e édition de Feiz ha Breizh, malgré la pluie, a battu des records d’affluence – la basilique sainte Anne d’Auray où a lieu la messe de clôture était trop petite, et des centaines de pèlerins ont suivi la messe tridentine sous la pluie. Paix Liturgique revient sur le succès de ces pèlerinages régionaux qui en augurent d’autres – un pèlerinage traditionnel gascon serait en préparation.
“Ces 5 et 6 octobre a eu lieu le premier pèlerinage traditionnel Nosto Fe, de Cotignac à Saint-Maximin, dans le Var. Bien qu’il y ait eu 700 inscrits – ce qui est déjà beaucoup pour une manifestation semblable en Provence, ce sont finalement 2000 personnes qui marchèrent au son des cantiques provençaux et des tambourinaires, sur les pas de sainte Marie Madeleine. Ce pèlerinage s’est achevé par une messe pontificale célébrée par Mgr Rey dans une basilique de saint Maximin la sainte Baume pleine à craquer.
Avec le soutien du département, des municipalités traversées, des diocèses et de nombreuses communautés, ce pèlerinage, dont la direction et la coordination spirituelle est assurée par l’abbé Loiseau (SMMD) donne déjà rendez-vous l’an prochain pour une nouvelle édition, le premier week-end d’octobre, pour une nouvelle édition attachée à faire revivre la culture et l’histoire provençales sauvée de l’oubli par les félibres au XIXe et au début du XXe.”
Si dans les colonnes de l’Homme Nouveau le président de l’association à l’origine du pèlerinage, Jean Rivière, tire l’origine du pèlerinage des éditions locales du pèlerinage de Chartres organisées dans diverses régions pour s’adapter aux mesures anti-Covid, en matière de pèlerinages traditionnels régionaux, c’est la Bretagne qui comme les phares éclaire le chemin, avec le pèlerinage Feiz e Breizh (Foi en Bretagne), doté depuis 2021 d’un bagad, Feiz e Sevenadur, et qui se décline aussi en une marche nocturne aux flambeaux pendant l’Avent depuis 2022 (Feiz e Breizh Noz) et une fête qui réunit les organisateurs et leurs familles depuis le printemps 2023, Gouel ar Feiz.
Commencé en 2017 avec le soutien du diocèse de Vannes et quelques centaines de pèlerins, Feiz e Breizh a vraiment commencé à décoller en 2022 – en 2021 ils n’étaient qu’un peu plus de 200, près de 500 en 2022, et en 2023, doublant encore, le pèlerinage passait de 11 à 26 chapitres. Lors de l’édition de 2024, le dernier week-end de septembre, ils étaient plus de 2000, issus des diverses communautés traditionnelles des cinq départements bretons, et de paroisses diocésaines de plus en plus bretonnantes – une messe de Noël en Breton existe même, depuis quelques années dans le diocèse de Nantes, après des décennies de demandes infructueuses des fidèles, et un livret de famille catholique franco-breton, demandé par les familles qui vivent les sacrements et leur foi en breton va être édité par Ar Gedour à la fin de l’année 2024 – une première pour toutes les minorités linguistiques en France.
Objectif du pèlerinage Feiz e Breizh dès son lancement ? « Toucher spirituellement les familles, en terre de Bretagne, et se faire missionnaire auprès de la jeunesse bretonne ». Et Bertrand de Tinténiac, président de Feiz e Breizh, de développer dans les colonnes d’Aleteia, « nous avons besoin de plus de grandeur, de beau, de vrai et de sacré dans nos vies agressées par l’esprit du monde”. “Aussi vrai que le fond devrait appeler la forme, la forme donne toute sa majesté au fond ».
Boulevard Voltaire s’était intéressé il y a quelques jours au succès de ce pèlerinage régional traditionnel qui en inspire d’autres : « à quelques jours du départ pour cette huitième édition, déjà 1.800 marcheurs s’étaient inscrits ! Preuve d’un engouement grandissant. Un succès exceptionnel lié, selon les organisateurs du pèlerinage breton contactés par BV, à « une quête de sens et de sacré qui anime les âmes en ces temps confus » et « une soif de beau, de vrai et de sacré ». De Languidic au sanctuaire de sainte Anne d’Auray (Morbihan), Feiz e Breizh propose un pèlerinage bâti sur « trois piliers fondamentaux : mission, tradition et patrimoine ». Le tout profondément ancré dans la culture bretonne et « son héritage ». Au programme : des temps de marche, des messes, une grande veillée festive bretonne et, à l’arrivée, le plus grand bagad catholique. Un retour aux racines bretonnes marquées, il fut un temps, par les grands pardons.
L’occasion pour les pèlerins de « vivre (ou de découvrir) une liturgie multiséculaire et intemporelle ». Mais pas besoin d’être un adepte de la messe en latin pour y participer. Au contraire ! Constance, une jeune Bretonne inscrite pour la première fois à ce pèlerinage, nous avoue ne pas bien maîtriser la messe en forme extraordinaire. Mais ce n’est pas un obstacle pour la jeune femme qui accepte bien volontiers de découvrir « une façon de prier différente de ses habitudes ». « Si j’y vais, c’est surtout en raison de l’ambiance très familiale, de l’ancrage breton et aussi parce que les occasions de pèlerinage d’une telle ampleur ne sont pas fréquentes », explique la néo-pèlerine ».
Aleteia relève aussi le succès croissant de ce pèlerinage : « alors que les éditions précédentes avaient rassemblé entre 150 et 480 pèlerins, l’année 2023 avait déjà été marquée par un pic de participants (1.200). En 2024, l’organisation attend 2.000 pèlerins, auxquels s’ajoutent des centaines d’accompagnants pour la messe du dimanche et 130 bénévoles.
Un engouement qui n’est pas sans rappeler celui suscité par le pèlerinage de Chartres, contraint de clôturer ses inscriptions plus d’un mois avant son départ pour la Pentecôte 2024 ! Pour Bertrand de Tinténiac, cet enthousiasme à l’égard des pèlerinages “de Tradition” s’explique “par la quête de sens et de sacré qui anime les âmes en ces temps confus“. Et le président de Feiz e Breizh de résumer : “Sûrement faut-il voir dans cet écrin rituel, que permet la liturgie dans une forme ‘traditionnelle’, une dimension sacrée, ordonnée, faites de respirations et de silences qui rassure tant elle est hors de l’esprit du monde ».
Devant l’affluence, cette année le pèlerinage a changé d’église de départ, au profit de celle de Languidic, plus grande, rappelle Ar Gedour qui rend compte de l’édition 2024 : « samedi 28, alors que le jour se lève à peine, le grand rendez-vous de départ est cette année donné à Languidic en raison de sa vaste église, car le succès aidant, il convenait de pouvoir accueillir pour la messe de départ le maximum de pèlerins. La petite commune morbihannaise connaît en cette heure matinale une animation joyeuse dont elle n’a guère l’habitude, une première sans doute : pèlerins laïcs, prêtres, religieux et religieuses, tous équipés comme il se doit, déployant drapeaux, bannières et pancartes de ralliements des différents chapitres, ou pour les confesseurs l’étole prête à l’emploi en vue des multiples confessions à venir.
La messe d’envoi est célébrée par Monsieur l’abbé Matthieu Raffray, prêtre de l’Institut du Bon Pasteur. Dans une homélie enflammée, il exhorte les Bretons à prendre les chemins de la reconquête pour « rendre la Bretagne à Dieu et à la Chrétienté », elle qui a donné tant de missionnaires au monde. La messe, bien qu’en semaine, est solennelle : chants grégoriens et cantiques bretons invitent les pèlerins à se mettre dans l’esprit du pèlerinage ».
Certes, en Bretagne, les pardons se sont maintenus jusqu’à nos jours – même si un certain nombre connaissent les difficultés du passage du relais entre les générations et de l’équilibre entre la dimension civile et religieuse, ainsi que le Tro Breizh, relancé par des laïcs dans les années 1990 et assuré depuis, chaque année, par étapes – les communautés traditionnelles, notamment la FSSPX et les non una cum (sédévacantistes) organisent aussi des étapes de Tro Breizh tous les étés. Mais la quête de sens, d’enracinement et de sacré demeure, et les occasions de pèlerinage traditionnel sont encore rares.
Le pèlerinage Feiz e Breizh draine large : la basilique Sainte-Anne d’Auray trop petite
Mais Feiz e Breizh attire bien au-delà, relève Ar Gedour : « on croise des gens provenant de divers horizons. Beaucoup de jeunes même si le pèlerinage reste intergénérationnel. Si la majorité des pèlerins sont attachés au rit saint Pie V, on découvre que d’autres sont également des paroissiens qui vont habituellement dans les paroisses célébrant selon le Novus Ordo. Ils n’ont pas les barrières que d’autres peuvent se donner, le bi-ritualisme n’étant qu’un mot disant que pour eux le seul référentiel reste le Christ, au-delà des différences. Il y a des tradis, des chachas ou des entre-deux. Puis on rencontre un chrétien du bout du banc, quelqu’un qui se cherche. Un non-baptisé vient vers nous et on discute. On rencontre des gens attachés à la culture bretonne (et de plus en plus de bretonnants), d’autres qui la découvrent. Feiz e Breizh draine large ».
Et de fait, la basilique Sainte-Anne d’Auray a elle aussi été trop petite : « l’entrée dans la basilique prend alors un air de triomphe, puis les drapeaux, les baussants et les bannières saluent la Présence Réelle, et prennent place, tandis que la chorale chante le Da Feiz hon Tadou Kozh (la Foi de nos Pères). Monsieur l’abbé Maurey, recteur de la basilique souhaite la bienvenue aux pèlerins, et c‘est à l’autel majeur que la messe solennelle est célébrée par Monseigneur Alain Castet, évêque émérite de Luçon. Se déploie alors la beauté de la liturgie tridentine : messe des Anges, chants grégoriens, cantiques bretons, dont celui à Saint Michel (Kantik da Sant Mikaël), en ce jour de fête. Sainte-Anne est comblée par les cantiques qui lui sont dédiés. Malheureusement, rançon du succès, la basilique s’est avérée trop petite pour accueillir tous le monde. La pluie se met à tomber généreusement sur les infortunés qui n’ont pu y entrer, devant se contenter de suivre la messe sur un écran extérieur géant ». Pas de quoi décourager les fidèles bretons, ni le Bagad et les danseurs à la sortie de la messe…
Cependant, le pèlerinage breton en inspire d’autres, indique Boulevard Voltaire : « sur le même modèle, bientôt « devrait voir le jour un pèlerinage gascon », nous annoncent d’ailleurs les organisateurs de Feiz e Breizh. À cela s’ajoute également un pèlerinage, organisé au-delà des marches de France, en Suisse sur le modèle de Notre-Dame de Chrétienté. Sans oublier les pèlerinages de la Fraternité Saint-Pie-X – dont le dernier dans la baie du mont Saint Michel – qui, selon une participante, rencontrent eux aussi un succès grandissant ».
Et les autres régions ? « Réveillez vous Picards, Picards et Bourguignons », comme dit la chanson…
NB : Il existe dans l’ouest de la Normandie l’injustement méconnu pélérinage en pays Coutançais, sur deux jours.