Paix Liturgique fait le compte-rendu du 14e pèlerinage de Notre-Dame de Chrétienté à Lujan en Argentine, qi a eu lieu ces jours-ci en interviewant un des organisateurs :
Initié en 2010 par des pèlerins de Chartres – Nicolás Stier Laxague et quelques amis, qui avaient désiré reproduire sur les terres d’Argentine le miracle de Notre-Dame de Chrétienté –, le pèlerinage vers Notre-Dame de Lujan s’est déroulé pour la quatorzième fois cette année du 19 au 21 août 2023. Nous avons demandé à notre ami Arnaldo Bilat de présenter à nos lecteurs cet extraordinaire témoignage de fidélité et de catholicité qui se déroule aux antipodes.
Paix Liturgique – Pour commencer cet entretien cher Arnaldo le pèlerinage ne se déroule pas seulement aux antipodes géographiques mais aussi aux antipodes saisonniers ?
Arnaldo Bilat – Tout à fait car si pour vous le mois d’août est au cœur de l’été pour nous, qui sommes dans l’hémisphère sud, il est à la fin de l’hiver… c’est-à-dire dans des conditions climatiques bien différentes et parfois difficiles – les photos qui illustrent cet entretien indiqueront à vos lecteurs que le climat n’y est pas toujours agréable – mais il faut ajouter qu’au cœur de l’été il ferait trop chaud, rendant ce pèlerinage impossible. Mais ajoutons qu’au mois d’août en Argentine le 17 est un jour férié (Anniversaire de la mort du général José de San Martin) mais il est toujours transposé au lundi le plus proche de cette date, ce qui a beaucoup aidé à la disponibilité des pèlerins et de leurs familles. Du coup, lors de quelques éditions du pèlerinage, qui en est à sa XIVe, nous avons eu la joie de pouvoir célébrer la messe de l’Assomption.
Paix Liturgique – Mais si je vous comprends bien il a fait un peu froid…
Arnaldo Bilat – Surtout sur le bivouac à 5 h du matin quand les pèlerins sont réveillés par le classique « Debout les Pèlerins ! on se lève ! » c’est peut-être à ce moment que l’on comprend que le pèlerinage est d’abord un moment de pénitence. Et puis cette année nous n’avons pas eu de pluie une autre raison de rendre grâce à Dieu.
Paix Liturgique – Pourquoi un pèlerinage à Notre-Dame de Lujan ?
Arnaldo Bilat – D’abord parce que Nuestra Señora de Luján qui est une vierge miraculeuse est la sainte patronne de l’Argentine… mais aussi parce que ce sanctuaire depuis plus d’un siècle est l’un de plus célèbres du continent sud-américain, voilà pourquoi de nombreux amis qui ne sont pas Argentins sont heureux d’y participer avec nous, comme nous. Par ailleurs, Notre-Dame de Luján est aussi la patronne de l’Uruguay et du Paraguay…
Paix Liturgique – Que pouvez-vous dire au sujet de ce XIVe pèlerinage ?
Arnaldo Bilat – Que nous avons été inondés de grâce ! Pensez, un pèlerinage qui n’a débuté qu’avec une dizaine de pèlerins en 2010 et qui avait réuni miraculeusement 1000 pèlerins en 2022 malgré les nombreux obstacles religieux. Cette année a connu une croissance que seul le bon Dieu, son fils et Notre-Dame de Lujan ont pu permettre car ce furent plus de 1600 pèlerins qui se sont inscrits auxquels il faut ajouter les nombreux pèlerins de la dernière heure…
Paix Liturgique – Donc une progression importante ?
Arnaldo Bilat – Oui et nous en rendons grâce à Dieu.
Paix Liturgique – Mais comment faites-vous pour faire venir toutes ces personnes ? Disposez-vous de puissants vecteurs médiatiques ?
Arnaldo Bilat – Pas du tout ! Notre-Dame de Chrétienté argentine dispose d’un assez modeste site que vous pouvez consulter pour en savoir plus ( https://www.nscristiandad.com/ ). Mais l’essentiel de la promotion se fait de bouche à oreille, le plus souvent à partir des anciens pèlerins qui tiennent à faire partager leur enthousiasme… de vive voix ou par l’intermédiaire de leurs blogs ou des réseaux sociaux…Mais à part cela nous n’avons que très peu de moyens et tout ce qui se fait est l’œuvre de bénévoles.
Paix Liturgique – Comment se déroule le pèlerinage ?
Arnaldo Bilat – Je dirai d’une manière assez ordinaire en parcourant les 100 kilomètres qui séparent la ville de Rawson du sanctuaire de la Vierge de Lujan, organisé en chapitres et en passant les nuits en bivouac…
Paix Liturgique – Avez-vous des relations avec les autorités locales ?
Arnaldo Bilat – En effet et elles sont excellentes ! Le maire de la ville de Suipacha, dont dépend le village de Général Rivas, l’une des étapes du pelé, a même publié un décret qui déclare d’intérêt municipal le pèlerinage ! En voici la copie .
Paix Liturgique – Quel était le thème du pèlerinage de cette année ?
Arnaldo Bilat – Tout un programme « Saint-Michel défendez-nous dans la bataille », imaginons un champ de bataille spirituel où les esprits rebelles blasphèment et hurlent Non serviam alors que les anges bons défendent le pouvoir de Dieu et l’honneur de sa Mère Immaculée et à leur tête, Saint-Michel qui lance le cri de guerre : Quis ut Deus ? Les pèlerins ont répondu « oui » à l’appel de Notre Mère de Luján, et à travers ce combat spirituel dont le pèlerinage est une image, ils veulent obéir à Dieu qui leur a préparé les places restées vides après la chute des anges mauvais. Trois méditations quotidiennes marquaient la journée, autour justement de cette lutte où nous luttons non seulement contre la chair mais contre les esprits de ce monde. Et c’est la Vierge Immaculée, Reine des Anges, qui écrase justement la tête du serpent.
Paix Liturgique – Permettez-moi de revenir aux pèlerins… des jeunes ? Des familles ?
Arnaldo Bilat – Vous vous doutez bien qu’une très grande partie des pèlerins sont plutôt des jeunes étudiants ou lycéens et de nombreuses familles avec leurs enfants. Mais il y avait aussi des adultes notamment le chapitre de l’Apôtre Saint-Jacques, j’allais dire des « anciens » d’une moyenne d’environ 45 ans ! Un chapitre qui a fait une forte impression sur les pèlerins eux-mêmes.
Paix Liturgique – Votre pèlerinage a-t-il un caractère international ?
Arnaldo Bilat – Tout à fait ! il est normal que les pèlerins soient majoritairement des argentins qui viennent de toutes les régions du pays. Mais le phénomène d’internationalisation que nous avions constaté l’an dernier s’est considérablement élargi et cette année le pèlerinage de Lujan a accueilli des pèlerins de nombreux pays de l’Amérique du Sud.
Paix Liturgique – Vraiment ?
Arnaldo Bilat – Oui, des pèlerins venus de Bolivie, du Brésil, du Pérou, du Venezuela et de Colombie, j’en oublie sans doute, également un fort contingent de jeunes paraguayens mais aussi, ne les oublions pas non plus, des pèlerins français et espagnols !
Paix Liturgique – Et les prêtres ?
Arnaldo Bilat – Il y avait une trentaine de prêtres, la plupart des diocésains argentins avec quelques autres venus du Brésil, des Etats-Unis et même de France ! Et même pour la première fois un prêtre de la Fraternité Saint-Pierre !
Paix Liturgique – Pour quel type de célébration ?
Arnaldo Bilat – La liturgie du pèlerinage est uniquement celle de l’Usus antiquior qui a été célébrée tout le long des trois journées.
Paix Liturgique – Et quels sont vos relations avec les autorités religieuses ?
Arnaldo Bilat – Avant la publication de Traditionis Custodes la messe de départ était célébrée devant l’église paroissiale, car les pèlerins étaient trop nombreux pour pouvoir tous entrer dans l’église. Le deuxième jour, la messe était célébrée en plein air dans le bivouac et la messe de clôture dans le sanctuaire de Lujan. Mais depuis l’été 2021 nous n’avons plus eu l’autorisation de célébrer la liturgie traditionnelle dans la basilique de Lujan.
Paix Liturgique – Plus d’accueil ?
Arnaldo Bilat – Nous avons donc célébré notre messe de clôture à Jauregui à 8 kilomètres du sanctuaire, puis nous sommes allés clôturer notre pèlerinage par une adoration du Saint-Sacrement et la récitation du chapelet dans le sanctuaire national.
Paix Liturgique – Donc pas tout à fait indifférents…
Arnaldo Bilat – Personne n’est indifférent au phénomène du pèlerinage de Cristianidad…Nous savons par un prêtre ami que la réalité du pèlerinage a fait l’objet de nombreux échanges jusqu’au sein du séminaire de Lujan…
Paix Liturgique – Donc pas de « Todos » pour vous…
Arnaldo Bilat – En tout cas un petit « todos » minimaliste puisque ce fut le recteur de Lujan qui nous a accueillis et un autre des prêtres de la basilique qui donna sa bénédiction finale mais cela n’empêchera pas le pèlerinage de prendre de l’ampleur car nous avons une mission de laïcs à remplir et nous allons la remplir ! Après le chapelet et la bénédiction du Saint-Sacrement à l’intérieur de la basilique, un des prêtres qui nous avait accompagné pendant les trois jours de marche, a pris le micro et nous a encouragé à inviter chacun un ami à participer au prochain pèlerinage. Et en même temps il a exprimé le souhait que l’année prochaine la basilique de Notre-Dame de Luján ouvre ses portes pour la célébration de la messe traditionnelle, car comme l’a rappelé le pape François à Lisbonne lors des JMJ, dans l’Église « il y a de la place pour tous, tous, tous ».
Paix Liturgique – Vous allez bien sur continuer …
Arnaldo Bilat – Sans hésitation pour l’honneur du Cristo Rey ! nous préparons déjà dans nos cœurs et nos prières le pèlerinage de 2024.