Quand des personnes chères se séparent de nous, nous nous affligeons, même si nous savons qu’elles rencontreront un sort meilleur. Aussi nous pourrions penser que l’Église assistera à l’Ascension avec mélancolie. Il n’en est rien. La fête est exclusivement une fête de joie. Une double joie remplit nos cœurs ; nous nous réjouissons pour le Seigneur et pour nous-mêmes.
a) La journée de l’Ascension est un triomphe du Christ, une fête de victoire. Le Seigneur a bien mérité son triomphe. Rappelons-nous toutes les phases et toutes les étapes de sa vie terrestre. Il a quitté le trône de son Père et s’est abaissé dans le sein de la Vierge, il a été couché sur la rude paille de la Crèche de Bethléem, il a dû fuir en Égypte, fuir son propre peuple ; il a vécu dans l’obscurité à Nazareth, comme un simple artisan ; puis il s’est fatigué à parcourir la Galilée et la Judée à la recherche de la brebis perdue. Il a été méconnu, il n’a pas été aimé par ses frères. Enfin, il a enduré sa Passion rédemptrice depuis le mont des Oliviers jusqu’au Golgotha. Pourquoi tout cela ? Parce qu’il nous a aimés. Quel but poursuivait-il ? Nous racheter du pouvoir du diable et nous introduire dans la patrie céleste. Et maintenant son œuvre, à laquelle il a consacré son amour et le sang de ses veines, est achevée. Il peut, aujourd’hui, jeter un regard joyeux sur sa vie écoulée. Hier, la liturgie nous a montré son Ascension en deux images : le vainqueur s’avance triomphant, il entraîne avec lui dans son triomphe les prisonniers, c’est-à-dire nous-mêmes, les enfants de Dieu rachetés par lui ; il fait part de son butin, c’est-à-dire des grâces de la Rédemption à l’Église. Le Fils rentre dans la maison paternelle, il est reçu avec joie par son Père ; mais il lui présente des nouveaux frères et sœurs, l’humanité rachetée. Nous pouvons dire que la fête de l’Ascension est, en même temps, l’accession au trône et le couronnement du Christ comme Roi du ciel et de la terre.
b) Cette fête est aussi un jour de joie pour nous. La glorification du Seigneur dans son Ascension est aussi l’élévation de la nature humaine ; c’est notre glorification. C’est là une pensée qui a profondément impressionné les Pères. Notre nature humaine participe aux plus hauts honneurs divins. Le Christ. en effet, est entré au ciel avec son corps humain, avec sa nature humaine ; il est assis sur le trône de Dieu et il restera avec sa nature humaine éternellement. C’est là une distinction inouïe pour les hommes. L’un des nôtres, notre chef, est assis sur le trône de Dieu ; ainsi donc nous aussi, les membres de son corps, nous sommes divinisés. C’est pourquoi la préface de la fête chante d’une manière significative : « Il a été élevé pour nous faire participer à sa divinité ». C’est là une divine noblesse qui nous est communiquée par l’Ascension. Mais cela constitue, pour nous, une impérieuse exigence : Sursum corda. Le péché ne monte pas au ciel avec le Christ. Le péché est comme une chaîne qui nous lie à la terre. Brisons ces liens du péché. Nous devons d’abord monter au ciel avec la volonté et le désir (« demeurer de cœur au ciel »). Ensuite, nous y suivrons le Seigneur en corps et en âme.