Mgr Jean-Marc Aveline, 63 ans, futur cardinal, a été interrogé dans Le Parisien. Extrait :
Vous avez confié avoir ressenti de « l’effroi » en apprenant être fait cardinal ? Pourquoi ?
Ce n’est pas une petite responsabilité. En se regardant soi-même, on se dit d’abord qu’on n’est pas à la hauteur. Quand on est nommé évêque, on est averti un ou deux mois à l’avance, on peut s’y préparer, là j’ai été comme cueilli en plein vol. La création de cardinaux est vraiment un choix personnel du pape. Je prends cela pour une marque de confiance. Maintenant, il va me falloir découvrir ce petit groupe de cardinaux. Aider le ministère du pape et des papes successifs, c’est comme cela que je conçois ma mission.
En quoi va consister votre déplacement à Rome le 27 août pour être officiellement nommé cardinal ?
Il y a deux étapes. D’abord la création des nouveaux cardinaux avec une célébration dans la basilique Saint-Pierre de Rome. Le pape François va donner les insignes aux 21 nouveaux cardinaux, et nous décrire la mission qu’il entend nous confier. Le lendemain, en ce qui me concerne, il y aura une célébration à l’église Saint-Louis-des-Français puis une réception à l’ambassade de France près du Saint-Siège. Les deux jours suivants, doit se tenir une réunion de travail de tous les cardinaux avec le pape. C’est assez nouveau car le pape François ne l’a fait qu’une fois en 2015.
Avez-vous demandé des conseils aux quatre autres cardinaux français ?
Oui. J’ai commencé et puis nous aurons une réunion entre nous à Rome. C’est important que nous puissions nous concerter.
Un cardinal, peut être élu lui-même élu pape, non ?
Je ne me vois pas dans la peau d’un Pape (rires) et vivre un jour un conclave ne me réjouit pas particulièrement. Ce ne sont pas des choses après lesquelles on court. Mais si cela doit venir, eh bien cela viendra. Le ministère du pape est mondial, j’ai du travail devant moi, je dois apprendre, m’informer pour mieux comprendre.
On dit que vous êtes le plus bergoglien des cardinaux Français ?
Il est vrai que comme pasteur d’une ville comme Marseille, il y a un certain nombre de choses qui me tiennent à coeur. Marseille, c’est à la fois un concentré de disparités économiques fortes avec beaucoup de pauvreté et même de misère, c’est aussi une ville avec beaucoup d’espérance, de jeunesse, marquée par la pluralité culturelle et religieuse. C’est aussi une cité aux prises avec une forte pression écologique à cause de la Méditerranée. François met souvent l’accent sur la pauvreté, l’écologie. Si considérer que la mission de l’Église est d’être le plus attentif possible à toutes ces questions, alors je suis bergoglien. Mais je n’aime pas les étiquettes ! […]
Lors du premier tour de la Présidentielle, 4 catholiques sur 10 ont voté pour l’extrême droite, qu’en pensez-vous ?
Ce qui m’attriste le plus c’est que les vraies difficultés qui poussent des personnes vers des idéologies avec lesquelles je ne peux pas être d’accord, ne soient pas entendues. Les problèmes réels d’insuffisance de médecins, de manque de transports en commun, de disparition des services de proximité, auxquels sont confrontés nos concitoyens sont insuffisamment pris en compte. Ce besoin exprimé par les plus pauvres d’avoir une vie décente, nous concerne tous, que l’on soit responsable économique, politique ou religieux.
Est-ce pour cela que vous avez interpellé, Emmanuel Macron, sous la forme d’une tribune, lors de sa visite à Marseille il y a un an et demi ?
C’était un cri d’alarme, je ne jetais la pierre à personne. Marseille était alors en pleine détresseavec des jeunes ados qui se faisaient tuer au pied des tours, à cause des trafiquants de drogue. Il faut que les consommateurs de drogue comprennent aussi qu’ils alimentent ce genre de mépris de la vie humaine. D’ailleurs, ceux qui donnent les ordres ne vivent pas à la cité, ils vivent ailleurs. Je souhaitais aider à un réveil des consciences.