Nous avons évoqué à plusieurs reprises la fondation monastique du Monastère Saint-Benoît à La Garde-Freinet dans le diocèse de Toulon (dans le massif des Maures). Ce petit Monastère bénédictin fondé en 2012 par Dom Alcuin Reid, prieur, utilise les livres liturgiques de 1962 depuis sa fondation. Il y a quelques mois, la communauté a déménagé dans une commanderie médiévale de Templiers à proximité de Brignoles.
La communauté publie le long communiqué suivant sur son site internet. Pour l’heure, aucun communiqué public du diocèse n’est publié (bien qu’il soit sous-entendu par la communauté). Mgr Rey est connu pour être un des évêques qui a été le plus favorable aux dispositions du Motu Proprio Summorum Pontificum et il n’a, selon nos informations, pas annoncé de changements particuliers suite à la publications de Traditionis Custodes souhaitant poursuivre sereinement ce qui a été construit avec les communautés et prêtres du diocèse ces dernières années.
La communauté du Monastère Saint-Benoît indique qu’elle a fait procédé en avril à des ordinations d’un frère au sacerdoce [l’actuel prieur Dom Alcuin Reid était diacre depuis plusieurs années] et d’un frère sous-diacre et diacre par un prélat extérieur au diocèse. Depuis plusieurs mois, le prieur demandait ses ordinations à Mgr Rey (la communauté étant un monastère de droit diocésain), sans qu’elles lui soient accordées.
Souhaitons que cette tension soit aplanie rapidement pour le bien de tous.
Alors que le dialogue avec notre Évêque, Mgr Dominique Rey, était toujours en cours – une rencontre devait avoir lieu dans dix jours, et une conversation téléphonique était prévue cette semaine – le Chancelier de notre diocèse a envoyé aujourd’hui au clergé une déclaration incendiaire, qui est cause de confusion, sinon de scandale, et à laquelle nous nous devons de répondre.
Nous souhaitons de prime abord déclarer que nous avons tout fait pour éviter la publicité et le scandale, pour agir avec discrétion, et pour aller de l’avant avec notre Évêque dans un dialogue privé avec lui. En cela, la déclaration du Chancelier – qui contient des inexactitudes factuelles et canoniques ainsi que des contre-vérités, peut-être à cause d’une mauvaise lecture de textes en anglais – est prématurée ; pour cette seule raison, elle est déjà regrettable.
Ces dernières années, notre communauté monastique a été frustrée par le refus ou l’incapacité de notre Évêque à procéder à des ordinations dont le besoin se fait depuis longtemps sentir, bien qu’elles aient été recommandées par pas moins de trois visiteurs monastiques, le plus récent en décembre 2021. Cette attitude se fondait sur l’invocation de la “prudence” ; il était cependant de plus en plus évident que cette “prudence” émanait d’une crainte de conséquences adverses, une crainte amplifiée par la récente visitation par le Saint-Siège du séminaire diocésain. Mgr Rey a souvent confirmé que cette “prudence” ne se basait sur aucun doute significatif quant à l’idonéité d’aucun candidat, les besoins qu’a le monastère de ces ordinations, ou le bien qui en ressortirait.
Nous voulons clairement dire que nous comprenons bien des pressions auxquelles Mgr Rey est soumis, et que son jugement sur ces questions ne procède pas d’une volonté de sa part de nous faire souffrir, ou d’agir d’une façon injuste. Même si son sentiment d’être comme piégé et incapable d’agir comme il le voudrait en raison de facteurs externes résulte en une injustice, sa bonne volonté et sa paternité ont été et sont encore une bénédiction pour laquelle nous rendons grâces à Dieu.
Les mesures mises en place l’an dernier par le Saint-Siège concernant la forme extraordinaire du rite romain, et en particulier les réponses de Mgr Roche en décembre 2021, ont exacerbé ces tensions. L’interdiction totale des ordinations nous a mis, nous, ainsi que nos vocations et les candidats à l’entrée dans notre monastère, dans une situation impossible. L’intégrité de notre observance liturgique et monastique est gravement compromise. Ce qu’un successeur de Pierre nous a pourtant assuré être vrai se retrouve contredit par un autre. Le contenu des vœux que nous avons prononcés devant Dieu a été substantiellement altéré. Cette situation est, en elle-même, scandaleuse et intenable.
En janvier, Mgr Rey nous a informé qu’il ne pouvait pas procéder aux ordinations recommandées par le rapport de la Visitation de décembre dernier. Nous avons pris conseil auprès d’amis, y compris auprès de respectés prélats de haut rang, concernant notre situation apparemment impossible. Dans nos consultations, nous avons mis l’accent sur notre respect pour l’Évêque, notre compréhension vis-à-vis de sa position, ainsi que notre dilemme. Le Prieur fit un pèlerinage à la tombe de Saint Pierre, en la fête de sa Chaire, pour y prier pour l’unité de l’Église. Un prélat de haut rang offrit de conférer les ordres si Mgr Rey se trouvait plus longtemps incapable de le faire. Cette offre nous surprit ; nous n’avions demandé d’ordinations à personne.
Notre Prieur rencontra encore Mgr Rey pour examiner s’il n’y avait pas une autre façon d’aller de l’avant – mais une fois encore, il était clair qu’il ne pouvait pas envisager d’ordonner nos moines. Notre frustration face à cette situation a évolué en une considérable et lancinante crainte. Qu’arriverait-il si le Saint-Siège nous retirait notre Évêque ? Si le Saint-Siège nous supprimait avec d’autres communautés traditionnelles qui ne sont « que » des Associations de Fidèles ? Sans prêtre, nous ne pouvions espérer traverser la tempête en espérant des jours plus favorables. Et si les prêtres diocésains devant célébrer la Messe pour nous ne pouvaient plus venir ? Nous serions sans la Messe, comme nous le fûmes déjà auparavant.
Nous avons portées ces inquiétudes en nous dans les profondeurs du Carême. Nous avons beaucoup étudié et prié à leur sujet. Nous les avons placés sous le regard de notre Père Saint Benoît, et en sa fête, nous décidâmes d’accepter l’offre faite par ce prélat de haut rang, la considérant comme un appel aux Ordres légitimement fait par un successeur fidèle des Apôtres, dans des circonstances réellement exceptionnelles.
Nous avons pris cette décision en conscience devant Dieu, sachant qu’elle apparaîtrait comme matériellement désobéissante, mais avec la conviction qu’elle était pour le bien suprême des âmes, dans une situation proprement extraordinaire dans la vie de l’Église ; nous craignions que si nous n’acceptions pas cette offre providentielle, nos propres vocations, ainsi que celles des jeunes hommes désirant nous rejoindre, seraient mises en péril, voire perdues. Nous avons ressenti une grande paix dans cette décision.
Ainsi, en avril, le prélat de haut rang susmentionné, jouissant d’une communion sans entraves avec le Siège Apostolique, ordonna un de nos moines au sous-diaconat et au diaconat en deux jours successifs, et ordonna notre Prieur au sacerdoce, selon la forme extraordinaire du rite romain, en un lieu discret hors de France. Aucun paiement ne fut demandé, offert, donné ou accepté pour ces ordres. Ces ordinations furent précédées par les serments nécessaires, et ont été certifiées et attestées en bonne et due forme. Nous ne révélerons pas le nom du prélat ordinant.
La peine encourue selon le canon 1388 § 1 — si tant est qu’elle n’ait jamais été encourue, prenant en compte les provisions du canon 1323 — a été remise, selon les dispositions du canon 1355 § 2. [selon la numération du Code en décembre 2021]
À notre retour, nous écrivîmes à Mgr Rey pour l’informer et lui demander de le rencontrer pour envisager ensemble comment aller de l’avant. Nous sommes résolus à demeurer fidèles à nos vœux, sur notre propriété de Brignoles, quoiqu’il arrive. C’est là notre devoir et notre vocation devant Dieu. Nous avons agi de bonne foi, même si ce fut, par nécessité, hors des normes canoniques légitimes, et envers et contre tout nous désirons demeurer en relations amicales et en pleine communion avec notre Évêque, ses successeurs, et le diocèse.
Nous avons déclaré à Mgr Rey que s’il jugeait devoir nous sanctionner publiquement, nous resterions ici et vivrions nos vœux aussi fidèlement que possible en attendant de meilleurs jours, comme le fit Dom Gérard en 1974 quand il fut sanctionné pour avoir laissé un évêque conférer les ordres mineurs à des moines de son monastère encore naissant. Quinze ans plus tard, il fut béni comme le premier Abbé du Barroux.
Par discrétion, et pour laisser l’Évêque libre dans sa décision pour la suite, nous avons conservé le secret concernant ces ordinations et n’avons pas exercé de ministère publiquement. Mais nous avons aussi supplié l’Évêque d’éviter le scandale, en fournissant des prêtres pour célébrer la Messe. Devant Dieu, nous ne pouvons permettre que le monastère soit encore une fois privé de la Messe quotidienne ou des sacrements.
Nous avons demandé et avons reçu la promesse d’entretiens privés, avant de les voir refusés par la suite. Nous avons reçu du Chancelier des exigences péremptoires qui contrastent étonnamment avec le ton des messages envoyés par l’Évêque. On nous a rapporté des indiscrétions inacceptables de la part du Chancelier en ce qui nous concerne. Finalement, on nous a communiqué une « déclaration » de suspension des ordres que nous avons reçus, déclaration qui a déjà été remis en bonne et due forme.
La déclaration du Chancelier aujourd’hui, qui nous est parvenue par un tiers, contient des éléments qui ne nous ont pas été communiqués, ainsi que de grossières inexactitudes. Nous ne pouvons penser que Mgr Rey les ait autorisées en connaissance de cause.
Nous avons toujours espoir que le dialogue et la réconciliation sont possibles. C’est là notre fervent espoir et notre prière.
Nous demandons pardon à tous ceux qui pourraient trouver cette situation angoissante, comme elle l’est pour nous, et demandons à tout le monde de bien comprendre qu’avant toute chose, nous devons rester fidèle à notre vocation d’une vie bénédictine traditionnelle de prière et de travail, ratifiée et bénie par notre Évêque dans les statuts et constitutions de notre fondation, ainsi qu’à nos vœux, que nous avons prononcé devant Dieu en vertu de ceux-ci. Nous avons ainsi vécu depuis plus de dix ans, et prions Dieu qu’il nous soit accordé de faire de même pour de nombreuses autres années, dans une communion fructueuse avec notre Évêque.
Que ceux qui voudraient user de cette situation comme occasion pour des attaques personnelles contre nos moines veuillent bien noter qu’en aucune occasion l’évêque n’a eu de raison de les censurer en ce qui concerne la foi ou la morale. En ce qui concerne le Prieur, que Mgr Rey a invité dans le diocèse et incardiné en juin 2009, faisant toutes les consultations requises et appliquant les procédures nécessaires, il faut souligner que l’Évêque l’a jugé idoine pour être supérieur du monastère aussi récemment que lors de la reconduction de ses statuts en janvier 2022. Tous les autres moines ont été admis et ont suivi leur formation suivant les procédures en vigueur – et même selon des procédures plus strictes que celles ayant cours dans d’autres communautés du diocèse.
Nous confions le monastère et nos vocations à Notre-Dame de Fatima, offrant en réparation pour nos péchés toute souffrance que nous pourrions subir, pour la liberté et l’unité de l’Église, pour notre diocèse, et pour Mgr Rey.
Vous êtes sûr qu’il n’y a pas de sujets plus graves à évoquer à l’attention de lecteurs qui sont aujourd’hui en plein désarroi devant ce chaos doctrinal infligé par le pape actuel et son gouvernement ?
Un chancelier qui fait du zèle, un évêque qui temporise par prudence.
Voilà le résultat de Traditionis custodes: des vocations que l’on tente d’étouffer.
Mgr Rey, semble–il, est lui-même menacé. Notre Pape François a déjà poussé à la démission des évêques et a même démis des récalcitrants.
Comment dis-t-on “faire le gros dos” en langue de buis ?
Oremus
Entre la foi et l’obéissance à un supérieur il n’y a pas à hésiter, seule la foi compte