Il est intéressant de cerner le profil de certains importants personnages de l’ombre au sein de la Curie romaine. Le Père Corrado Maggioni, disciple et protégé de Mgr Piero Marini, lui-même fidélissime disciple d’Annibale Bugnini, est de ceux-là.
Religieux montfortain de 56 ans, il est docteur en liturgie de l’Institut pontifical Saint-Anselme de Rome, où il enseigne. Il travaille depuis 1990 à la Congrégation pour le Culte divin, dont il a gravi les échelons pour accéder au poste de Sous-Secrétaire en 2014.
En fait, il était chargé, avec le Secrétaire, l’Anglais Mgr Arthur Roche, devenu récemment Préfet en remplacement du cardinal Sarah, de neutraliser de manière constante et appliquée le cardinal-préfet. Il avait un rôle d’autant plus actif que Mgr Roche est loin d’être un bourreau de travail.
Maggioni a été l’artisan de l’instruction Magnum principium, en 2017, qui a concrètement déplacé la responsabilité des traductions liturgiques du Dicastère romain aux Conférences épiscopales nationales. Maggioni s’est fait la courroie de transmission des professeurs de Saint-Anselme et d’un bon nombre d’évêques italiens, dont on ne dira jamais assez qu’ils constituent un groupe de pression très influent. Maggioni a été le maître d’œuvre du délayage des corrections qu’auraient dû subir les traductions en langues vernaculaires : par exemple en écartant les quelques corrections voulues par le Cardinal Sarah qui hérissaient les responsables de la Commission épiscopale francophone pour les Traductions liturgiques (CEFTEL). Maggioni est intervenu à la suite de « L’appel de Londres » du cardinal Sarah en faveur de la célébration ad orientem, en 2016, et du discours de Milan, en 2017, en faveur de la communion sur les lèvres, pour qu’il lui soit fait de bergogliennes et paternelles remontrances : « Eminence, l’enrichissement réciproque n’est plus de saison ! » Maggioni, qui célèbre tous les matins à Saint-Pierre, a poussé avec vigueur à la suppression des messes privées dans la Basilique.
Mais voilà qu’à la suite de la visite canonique de la Congrégation, qui a suivi la démission du cardinal Sarah, le P. Maggioni a été « débarqué » ! Il faut dire que les plaintes contre lui auprès du visiteur avaient été très nombreuses de la part des employés. S’il est en effet d’idées parfaitement « correctes », il est d’un caractère insupportable, cassant, autoritariste, écartant les prêtres suspects de résistance à son égard (tout simplement en ne leur transmettant plus aucun dossier, ce qui a réduit certains à faire des mots croisés durant des années). Le cardinal Sarah n’hésitait pas à dire que Maggioni dirigeait le Dicastère comme un supérieur de petit séminaire. C’est au point que ce religieux est incapable de vivre en communauté avec ses confrères montfortains et qu’il a son appartement propre.
Mais c’était un simple accident de parcours. Annonçant, au mois de mai dernier, les nominations à la Congrégation dont il devenait Préfet, celle de Mgr Viola comme Secrétaire et celle de Mgr Garcia comme Sous-Secrétaire, Mgr Roche, précisait : « Le Père Maggioni va nous quitter pour être nommé prochainement à une fonction prestigieuse ». Il est en effet nommé aujourd’hui Président du Comité pour les Congrès Eucharistiques Internationaux à la place de Mgr Piero Marini. La nomination intervenant, comme il le souhaitait, avant la publication de la constitution Prædicate Evangelium pour la réforme de la Curie, il pourrait même être consacré évêque, le service des Congrès eucharistiques devant probablement être intégré à la super-congrégation de la liturgie que prévoit cette réforme.