Un lecteur a tenu à réagir à notre article sur l’invitation du pape à accepter la nouveauté.
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Quelques précisions pour mieux comprendre l’intention de l’auteur
” D’une part, il ne s’agit pas ici de se tourner vers un individu, mais de se tourner vers un état d’esprit, qui n’a certes pas attendu l’élection du Pape François, ni même la fin du Concile Vatican II, pour commencer à apparaître, au sein de l’Eglise catholique, et qui a déjà produit des effets non négligeables, notamment dans les années 1970 et dans les années 1980.
D’autre part, il ne s’agit pas non plus de laisser entendre que la totalité du Magistère et de la pastorale du Pape François se réduit ou se soumet à ce “franciscanisme périphériste”, ni de s’en prendre à tel élément de ce Magistère ou de ce cette pastorale (d’autant plus que les encycliques et exhortations du Pape François ne comportent pas que des paragraphes rattachables à cet état d’esprit), mais il s’agit plutôt, trois ans après le 13 mars 2013, de formuler une position analytique sur ce qui semble vraiment constituer le spécifique de ce pontificat.
Enfin, il s’agit surtout, à l’occasion de ce type de réflexion, de rappeler que “la priorité des priorités”
– n’a pas à être le développement de l’attractivité de l’Eglise catholique, aux yeux des non catholiques, des non chrétiens, des non croyants, entre autres raisons parce que, notamment dans le contexte européen occidental, nous subissons les conséquences de cette priorisation, plus décatholicisante que christianisatrice, depuis bientôt trois quarts de siècle,
– mais a vocation à être la clarification sur ce que sont vraiment la Foi, l’Espérance, la Charité, non pour le plaisir de clarifier, sans suites vécues, mais en vue de la consolidation effective de la prise en compte, de la mise en oeuvre, de la Foi, de l’Espérance, de la Charité, c’est-à-dire de ce que Jésus-Christ, Fils de Dieu, demande, notamment, à tous les catholiques.
Après tout, si des approbateurs inconditionnels du Pape François ont la possibilité de faire remarquer à ciel ouvert que ce qui semble vraiment constituer la marque de ce pontificat n’est pas sans ressembler assez nettement à l’actualisation d’un courant de pensée et d’action qui est déjà apparu, dans l’histoire du catholicisme contemporain, on ne voit vraiment pas pourquoi d’autres catholiques, non contempteurs du Pape François, mais critiques vis-à-vis de ce même courant de pensée et d’action, n’auraient pas le droit d’inviter à faire la même remarque. ”
- Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’au moins une partie de ce qu’il y a de spécifique, dans le positionnement du Pape François, n’a rien de nouveau.
En effet, une partie de ce qu’il y a de particulier, dans sa conception des choses et sa relation aux choses, est d’inspiration assez proche de ce que l’on trouve, dès les années 1960, chez ceux qui, déjà à l’époque, veulent une Eglise pauvre pour les pauvres : Arrupe, Camara, Himmer, Lercaro, etc.
Pour comprendre les catacombes
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- De même, une partie de ce qu’il y a de particulier, dans sa conception du Synode et sa relation au Synode, a déjà été vécu et subi dans et par l’Eglise catholique, dans les années 1970, notamment et surtout lors des Synodes des évêques de 1971 et de 1974, sauf qu’à l’époque le Pape Paul VI était en situation de vigilance et de résistance catholiques, face à plusieurs évêques, qui se prenaient pour des rénovateurs, alors qu’ils étaient des démanteleurs, ou, en tout cas, alors qu’ils suscitaient en eux et autour d’eux des vocations de démanteleurs.
- Ce que je suis en train de laisser entendre, c’est que le “franciscanisme périphériste” ne constitue en rien une nouveauté, mais a plutôt tendance à fonctionner à la nostalgie, vis-à-vis d’une tendance à la confusion entre attitude évangélisatrice et comportement émancipationniste, en l’occurrence à l’égard de ce qu’il y a de normatif et d’objectif dans l’expression officielle ou orthodoxe de ce que sont la Foi, la Charité, les sacrements, en d’autres termes, et pour aller vite, vis-à-vis du Credo, du Décalogue, et du mariage.
- Qui sommes-nous, pour ne pas constater que si les catholiques étaient moins amnésiques, sur la doctrine et sur l’histoire de l’Eglise, ils auraient été beaucoup moins acritiques, dès le début du pontificat du Pape François, sur le caractère soi-disant innovateur, original, et, surtout, “évangélique”, de cette composante du positionnement du Pape François.
- En quoi est-il pleinement fidèle à, ou pleinement respectueux de l’Ecriture, de la Tradition, du Magistère, du Catéchisme, de recourir à “l’esprit de l’Evangile”, pour actualiser ou contextualiser, d’une manière sélective ou tendancieuse, la vision de, ou le rapport à l’orthodoxie, au point de donner fréquemment l’impression que l’on légitime ouvertement un assouplissement, ou plutôt un affranchissement, émancipationniste, et non évangélisateur, sur ce que sont vraiment la Foi, l’Espérance, la Charité, les sacrements ?
- Le Pape François accepte, approuve, désire, ou projette, à la fois une Eglise pauvre pour les pauvres, et une Eglise synodale : ne sait-il pas qu’il s’agit là d’une double absurdité, potentiellement suicidaire, qui a déjà mis à mal l’Eglise catholique, à partir du début des années 1960 ?
- En effet, d’une part l’Eglise est riche de nombreuses ressources caritatives, contemplatives, culturelles, doctrinales, dogmatiques, éducatives, liturgiques, morales, pastorales, sociales, spirituelles, théologiques, et, d’autre part, l’Eglise s’adresse à tous, destine ces ressources à tous, aux pauvres et aux riches, les uns et les autres étant tous des pauvres, face à Notre Seigneur.
- Par ailleurs, que serait, immanquablement, une Eglise synodale, que ce soit dans le cadre du Synode des évêques, ou dans celui de Synodes diocésains ? Nous ne savons que trop qu’une Eglise synodale serait une Eglise dans laquelle la doctrine, dans l’ordre de la Foi, dans celui des moeurs, ou dans celui des sacrements, serait occultée ou évacuée, parfois par votes à main levée, au profit d’une praxis pastorale qui serait, ELLE, auto-référencée, changeante et mouvante, et qui confondrait fréquemment actualisation et démantèlement, pour ne pas dire modernisation et dénaturation.
- Ce qui précède ne constitue pas un procès d’intention, au contact de ce que veut François, mais constitue l’expression d’une quasi-certitude, sur ce que cette composante de son positionnement (qui se traduit d’ailleurs souvent par la mise en cause non charitable des catholiques “pélagiens” ou “pharisiens”, qui fonctionnent au “gnosticisme”, au “légalisme”, ou au “rigorisme”) a déjà commencé à produire, au sein de l’Eglise catholique : davantage une fragilisation qu’une consolidation du recentrage qui a été impulsé puis incarné, pendant un peu plus de trois décennies, par Jean-Paul II puis par Benoît XVI.
- La priorité des priorités n’est pas une Eglise pauvre pour les pauvres, ni une ecclésiologie en synodalité, mais est la consolidation de la Foi, de l’Espérance, de la Charité, des sacrements, et la vigilance, au service de la résistance, face à telle ou telle composante de l’esprit du monde, que cette composante soit, pour ainsi dire, d’inspiration anthropocentrique et individualiste postmoderne d’origine occidentale, ou d’inspiration communautariste et théocratique médiévale d’origine orientale.
Cela n’exclut pas, bien au contraire, une très grande attention aux pauvres, d’autant plus que ceux-ci, entre autres, ont besoin d’une Eglise lucide et tenace, face à l’esprit du monde. Mais les fidèles ont-ils bien conscience du fait que toute religion séculière, même “croyante en Dieu”, ou que toute volonté de puissance, même “croyante en l’Homme”, est inspirée par l’esprit du monde, et que les pauvres sont bien souvent parmi les premières victimes de telle religion séculière ou de telle volonté de puissance ?
Un catholique.
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