Divers blogues anglo-saxons avaient déjà observé que de grandes manœuvres éditoriales se déployaient à propos du cardinal Luis Antonio Tagle, archevêque de Manille. Pour l’Italie, une autobiographie sous forme d’entretiens, Dio non dimentica i poveri. La mia vita, la mia lotta, le mie speranze (Dieu n’oublie pas les pauvres. Ma vie, mon combat, mon espérance), qui va paraître à l’Editrice Missionaria Italiana, au mois de mai. Pour le monde anglo-saxon, une autre biographie, par Cindy Wooden, une vaticaniste qui dirige l’agence de presse Catholic News Service, Luis Antonio Tagle. Leading by Listening (Liturgical Press, 2015). Ce dernier ouvrage, dont une traduction vient de paraître aux Éditions Emmanuel, Luis Antonio Tagle, un cardinal hors du commun, est recensé dans L’Homme nouveau, sous le titre : « Portrait d’un prélat qui monte ».
Ces biographies font la promotion du « cardinal des pauvres », d’une très grande simplicité (vêtu d’une chemisette sans croix pectorale, il a longtemps circulé en tricycle), homme d’écoute, de dialogue, cardinal selon le cœur du pape François.
Issu, par sa famille paternelle, de la classe gouvernante à l’époque coloniale espagnole, ce garçon intelligent et grand travailleur, toujours premier de classe, sera rapidement pris en main par les jésuites, qui ont aux Philippines une influence considérable.
Il entra dans séminaire tenu par eux, puis suivit des études à l’Université jésuite Ateneo de Manille, pour être enfin envoyé par ses maîtres à la Catholic University of America de Washington D.C., où il devint docteur théologie avec une thèse sur la collégialité épiscopale à Vatican II. Son maître à penser fut et reste le P. Catalino Arevalo, un jésuite, disciple de Jürgen Moltmann, un des personnages les plus en vue de la « théologie asiatique », une branche de la théologie de la libération.
A 44 ans, en 2001, il devint évêque d’Imus, en 2011, archevêque de Manille, en 2012, à 55 ans, cardinal. Chico, comme on le surnomme, ou encore « le bébé cardinal », en raison de sa figure enfantine, n’a aujourd’hui que 59 ans.
Auparavant, le P. Joseph A. Komonchak, professeur à la Catholic University of America, qui avait été le directeur de thèse de Luis Antonio Tagle, et qui avec Giuseppe Alberigo, fondateur de la progressiste École de Bologne, collaborait à la monumentale Histoire de Vatican II, fit nommer Luis Antonio Tagle, en 1995, membre du comité éditorial qui supervisait l’entreprise. Dans la foulée, Komonchak et les jésuites obtinrent que Tagle soit nommé, en 1997, membre de la Commission théologique internationale.
Un autre jésuite, Jorge Bergoglio, se lia avec lui alors qu’ils siégeaient tous deux au conseil général du Synode des évêque, au début des années 2000. Lors du conclave de 2005, Tagle fut un soutien pour, l’Asie, de Bergoglio, qui obtint 40 voix contre 72 à Ratzinger, lors du 3ème vote. Selon les analystes des conclaves actuels, les paquets de voix incompressibles des libéraux et des “restaurationnistes” se situent à hauteur du tiers pour chacun. Le dernier tiers, “centriste”, fait l’élection. Le cardinal de Manille soutint activement le même Bergoglio, au conclave de 2013.
Le pape François nomma Luis Antonio Tagle comme l’un des co-présidents des deux assemblées du Synode des évêques, en 2014 et 2015, qui lui tenaient tant à cœur. Le cardinal Tagle se fit (trop) remarquer en 2014, lors d’une conférence de presse, en s’écriant : « Dans ce Synode, l’esprit de Vatican II s’est manifesté chez les Pères ». En octobre 2015, il fut nettement plus prudent : Non fare rumore, lui avait-on conseillé. Entretemps, le cardinal Rodriguez Maradiaga, du Honduras, coordinateur du Conseil des neuf cardinaux chargé par le pape de proposer des idées pour la réforme de la Curie, l’avait fait élire, le 14 mai 2015, président de Caritas Internationalis, en le présentant comme « défenseur des marginalisés ». Depuis janvier, lors du voyage apostolique du Pape aux Philippines, où le Pape jésuite l’avait mis particulièrement en vedette, on commençait dans les médias à parler du « successeur ».
C’est bien trop tôt. D’ailleurs, la recension de L’Homme nouveau fait état des rumeurs romaines qui voudraient que le Pape François doute des chances de L. A. Tagle à recueillir sa succession. En vérité, il n’a aucune envie de la laisser rapidement.
Je ne vois pas comment Tagle – cardinal en 2012 – aurait pu soutenir Bergoglio au conclave de 2005…
voici une vraie information ! En 2005 il fut de ceux qui, de l’extérieur, ont poussé au vote pro Bergoglio !
Sarah, Burke : les hommes des traditionalistes! C’est quand même aussi vrai, non?