Voici des extraits de l’homélie du cardinal Vingt-Trois lors de la veillée pour la vie du 21 mai dernier en la cathédrale Notre-Dame de Paris :
“Nous ne sommes pas les adorateurs d’une divinité étrange qui s’appellerait la vie. La vie que le Christ veut nous donner en plénitude a une valeur incomparable non pas en elle-même, mais parce qu’elle est le signe et la réalité d’une relation d’amour. C’est parce que Dieu nous aime qu’il nous appelle à la vie, c’est parce que le Christ nous aime qu’il nous appelle à la plénitude de la vie et si nous voulons aimer nos frères à la manière dont le Christ nous a aimés, nous sommes appelés à notre tour à donner notre vie pour nos frères. Nous ne sommes pas des gardiens de la vie, nous sommes les serviteurs de la vie parce que nous bénéficions de l’amour de Dieu et que nous sommes appelés à aimer Dieu et à aimer nos frères en mettant notre vie à leur service. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. C’est cela la valeur incomparable de la vie, elle est le langage de l’amour de Dieu pour l’humanité, elle est le langage de l’amour d’un homme pour une femme et d’une femme pour un homme. Elle est le langage de l’amour des parents à l’égard de leurs enfants, elle est le langage de l’amour des frères à l’égard de leurs frères, elle est le seul bien que nous possédions et qui est tellement identifié à nous, que nous donner nous-mêmes par amour, c’est donner notre vie.
Ainsi, dans une société et une culture où chacun est plus inquiet ou angoissé de préserver ce qu’il a -et il l’est d’autant plus qu’il a peu de choses à préserver, quelquefois même pas le nécessaire- dans une culture fondée sur la possession des biens, dans une culture qui se construit sur la consommation de la création pour la prospérité de notre vie, nous risquons de perdre de vue le sens de la vie elle-même, qui n’est pas sa propre subsistance, qui n’est même pas sa défense comme un bien sacré, mais qui est la seule monnaie que nous puissions donner par amour, pour l’amour, et pour être aimés. […]”