Mercredi des Quatre-Temps de Printemps 20 février 2013,
anniversaire de l’exécution d’Andreas Hofer (cf. > www).
Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,
Il y a huit jours, dans ma publication du 12 février (cf. > www), je vous faisais part de quelques réflexions, consécutives à l’annonce faite par notre Saint-Père le Pape Benoît XVI de sa prochaine abdication.
Permettez-moi de revenir aujourd’hui sur le sujet et pour cela de recopier ici le passage le plus important de la déclaration prononcée en latin devant les Eminentissimes Cardinaux :
« Après avoir examiné ma conscience devant Dieu, à diverses reprises, je suis parvenu à la certitude que mes forces, en raison de l’avancement de mon âge, ne sont plus aptes à exercer adéquatement le ministère pétrinien. Je suis bien conscient que ce ministère, de par son essence spirituelle, doit être accompli non seulement par les œuvres et par la parole, mais aussi, et pas moins, par la souffrance et par la prière. Cependant, dans le monde d’aujourd’hui, sujet à de rapides changements et agité par des questions de grande importance pour la vie de la foi, pour gouverner la barque de saint Pierre et annoncer l’Évangile, la vigueur du corps et de l’esprit est aussi nécessaire, vigueur qui, ces derniers mois, s’est amoindrie en moi d’une telle manière que je dois reconnaître mon incapacité à bien administrer le ministère qui m’a été confié. »
11 février 2013 : Sa Sainteté le Pape Benoît XVI annonçant son abdication
Beaucoup ont cherché ou cherchent encore, à commenter, voire à expliquer la décision du Souverain Pontife.
Ce faisant, ils proposent bien souvent une interprétation de ses propos – leur interprétation – , plutôt que d’en rester à ses paroles elles-mêmes.
Et les voilà qui glosent…
– … qui glosent sur l’état de santé réel ou supposé du Pontife : « Oui, il est vraiment fatigué! » ou : « Non, il ne l’est pas tant que cela! » ; puis qui argument en comparant cet état de santé – réel ou supposé – de Benoît XVI à celui de Jean-Paul II à la fin de son pontificat, et qui en tirent des conclusions, quand ils ne donnent pas des leçons…
– … qui glosent sur ce que cette renonciation pourrait révéler des dispositions intimes du Pape en face de l’état – grave, nous le savons! – de l’Eglise en général et des difficultés à en tenir le gouvernail…
– … qui glosent sur les factions ou luttes intestines au sein de la Curie…
… etc. …etc.
Suppositions que tout cela!
Bien évidemment, selon que l’on est plutôt « progessiste » ou plutôt « conservateur », selon que l’on a apprécié le gouvernement de Benoît XVI ou que l’on est (plus ou moins secrètement) content de le voir s’en aller, la lecture de cette renonciation à sa charge revêt mille nuances, teintées par le prisme idéologique, intellectuel ou spirituel à travers lequel on regarde l’évènement.
Je ne veux pas trop m’étendre sur tout l’aspect émotionnel révélé par les formules emphatiques que l’on a entendues : « je suis bouleversé », « nous sommes atterrés », « je me sens orphelin », « j’ai l’impression d’être abandonné »… etc.
Emotion, subjectivité, sentiments, ressenti personnel, voire sentimentalité ou sensiblerie : en tout cela ce n’est finalement pas l’évènement qui est considéré tel qu’il doit l’être, de manière objective, mais c’est la pitoyable complaisance en soi qui est étalée par cette mise en avant d’échos totalement subjectifs.
Même lorsqu’il n’est pas clairement exprimé, le jugement est toujours très proche de tous ces commentaires et explications. Mais je ne m’étendrai pas non plus – sinon pour les réprouver de manière catégorique – sur tous ces jugement, spontanés ou argumentés, portés sur la décision du Pape.
Qui donc sont-ils tous ceux qui se croient autorisés à porter un jugement de valeur, qui louent, qui approuvent, ou bien qui émettent des réserves, qui critiquent, qui condamnent? Qui les a établis juges de la conduite et de la conscience du Souverain Pontife?
La réponse à cette question donne aussitôt la valeur de ces jugements, lors même qu’ils sont louangeurs.
Allons! Il faut savoir raison garder… et plus encore foi garder!
Car la vérité, c’est que nous n’avons qu’une seule certitude : celle, et celle seule, qui a été clairement et sobrement donnée par le Souverain Pontife lui-même. Tout le reste est sans valeur!
« Après avoir examiné ma conscience devant Dieu, à diverses reprises, je suis parvenu à la certitude que mes forces (…) ne sont plus aptes à exercer adéquatement le ministère pétrinien (…). La vigueur (…) s’est amoindrie en moi d’une telle manière que je dois reconnaître mon incapacité à bien administrer le ministère qui m’a été confié ». Point.
Si je désire connaître les véritables raisons de l’acte d’une personne, le meilleur n’est-il pas d’écouter les explications données par cette personne elle-même?
Si je n’ai pas de raison de penser que cette personne ment, ne dois-je donc pas, raisonnablement , tenir ses propos comme l’expression de la vérité?
Si mes fonctions, mes responsabilités ou mon état font que je suis tenu à l’intégralité des explications justifiant un acte, je suis bien en droit d’exiger que l’on me fournisse toutes ces explications et qu’on ne m’en cèle aucune ; mais, si je suis un subalterne, je ne possède pas un « droit » à ces explications : si l’on voulait bien m’en donner, je prendrais celles que l’on me fournirait, qu’elles soient partielles ou totales ; je devrais m’en contenter (verbe qui signifie « m’en trouver content, satisfait »), et il y aurait une grave indiscrétion de ma part de chercher à connaître ce dont la connaissance ne m’est pas due.
Que des païens, des incroyants, des journalistes qui n’ont ni la foi de l’Eglise, ni ordinairement le respect de ses dogmes, de sa morale et de ses institutions, veuillent, en conséquence de cette impiété, chercher à savoir, cela peut – à la limite – se comprendre.
Que des fidèles de la Sainte Eglise, des personnes prétendant avoir la foi et le respect du mystère révélé, des prêtres, cherchent à trouver à tout prix des explications ou des justifications autres que celles que le Souverain Pontife a voulu donner, cela n’est pas acceptable.
Car le Pape n’a, en définitive, pas de comptes à rendre de sa décision sinon à Dieu, et à Dieu seul!
Le Souverain Pontife n’a pas à se justifier de son abdication, ni devant l’Eglise, ni devant le monde… du moins en cette vie : lors du jugement dernier ce sera différent.
Ni les cardinaux, ni les évêques, ni les prêtres, ni les fidèles, ni un concile ne possèdent un « droit » à connaître toutes les raisons, explications ou justifications de sa renonciation… et les médias encore moins.
Le Vicaire de Notre-Seigneur Jésus-Christ n’a pas reçu délégation pour exercer une autorité au nom d’un peuple prétendument souverain : de la même manière que sa décision pour être valide n’a nul besoin d’être entérinée par un sénat, un concile, ou un référendum populaire, elle ne requiert la délivrance d’aucune autre explication que celle qu’il plaira à Sa Sainteté d’en donner.
Ainsi, ce que Benoît XVI a dit DOIT nous suffire.
Lorsque le Saint-Père nous assure qu’il a longuement examiné sa conscience devant Dieu et que, au terme de cet examen, il est parvenu à une certitude, nous devons être convaincus que, dans ce face à face avec Dieu, toutes choses étant mûrement et soigneusement pesées avec l’exacte conscience de sa charge et des comptes qu’il devra en rendre au Juge suprême, cette décision n’est le fruit ni d’un caprice, ni d’une crainte de vieillard, ni d’une coquetterie d’intellectuel, ni d’aucune considération humaine, mais qu’il s’agit bien d’un acte d’adhésion de sa propre volonté humaine – informée par les vertus théologales de foi, d’espérance et de charité, et par les vertus cardinales de force, de justice, de prudence et de tempérance – à la Volonté divine.
Toute autre explication est vaine et superflue ; toute autre explication est moralement téméraire.
L’abdication de Benoît XVI fait partie des choses dont nous devons accepter de ne pas connaître absolument toutes les raisons ici-bas, s’il en existe d’autres que celles qu’il a voulu exprimer.
Aussi, même si nous ne comprenons pas, nous n’avons rien d’autre à faire qu’à la recevoir dans la foi et dans la paix.
A maintenant quelques jours de l’accomplissement de cette déposition de charge, la responsabilité qui nous incombe est celle de la prière (et en complément de notre prière l’offrande de sacrifices) : prière pleine de reconnaissance à l’intention du Pontife qui nous quitte, prière ardente pour la Sainte Eglise, prière fervente pour que les cardinaux qui entreront en conclave soient à l’écoute des seules inspirations du Saint-Esprit pour le choix du successeur de Saint Pierre.
Lully.
Tiare du Bienheureux Pie IX