Paix Liturgique, une association de laïcs catholiques français mais de rayonnement international, qui se consacre à la promotion de la liturgie traditionnelle et aux études sur l’application de Summorum Pontificum dans les paroisses, vient de faire paraître la dernière livraison de sa Lettre d’information (n° 362, 21 novembre 2012). Elle livre un bilan très intéressant du pèlerinage organisé par la Cœtus Internationalis Summorum Pontificum au début de ce mois. En voici l’essentiel.
1) Succès spontané : en rappelant que “cette Sainte Messe a été souhaité par le Cœtus Internationalis Summorum Pontificum”, le Préfet du Culte divin souligne que ce pèlerinage est à l’origine une initiative essentiellement laïque. Le succès en quelque sorte spontané du pèlerinage n’en est que plus méritoire.
Sans y insister, on peut évoquer la malsonnante campagne de dénigrement en Italie lors du lancement du pèlerinage sur quelques médias traditionalistes avec leurs petites guéguerres, hélas !, classiques. Broutilles : les pèlerins italiens ont été largement au rendez-vous.
2) Succès populaire : du coup, il est apparu que la plupart de ces fidèles de la Péninsule étaient distincts du milieu traditionaliste transalpin et, soit venaient de paroisses ” ordinaires ” ouvertes à la liturgie traditionnelle grâce au Motu Proprio, soit étaient des fidèles ne bénéficiant pas de la forme extraordinaire mais attirés par elle. En Italie, ces nombreux catholiques de sensibilité traditionnelle se qualifient eux-mêmes de « lefebvriens », au sens large bien entendu : le fait nouveau très remarquable est qu’ils se mettent à pratiquer selon la forme extraordinaire quand cela leur est possible – ce qui infirme une déclaration que l’on prête au Vicaire de Rome, le cardinal Vallini : « La messe extraordinaire n’intéresse que les Français et les Américains, pas les Italiens ».
D’ailleurs, un certain nombre de fidèles de la Fraternité Saint-Pie X étaient présents, pour témoigner, comme l’a confié l’un d’entre eux, “de leur plein accord avec les finalités spirituelles du pèlerinage” et, notamment, de leur foi una cum papa nostro. Si on lit avec attention le message que le Pape a demandé au cardinal Bertone d’adresser aux pèlerins, il est aisé de comprendre que cette intention unificatrice en direction de la Fraternité Saint-Pie X était aussi présente dans la bienveillance des autorités romaines à l’égard de ce pèlerinage Summorum Pontificum.
3) Cette initiative laïque appuyée par un certain nombre de prêtres et par l’extrême bienveillance du Préfet de la Congrégation du Culte divin et de la Commission Ecclesia Dei est parvenue à recouvrir une dimension internationale. Lors des messes à la Trinité-des-Pèlerins comme lors de la journée de clôture, on a pu croiser des pèlerins d’Amérique du Sud (Brésil, Argentine), du Nord (États-Unis : le fameux Father John Zuhlsdorf était là, Canada), d’Europe (Pologne, Croatie, Allemagne, Angleterre, Irlande, Espagne, France, Hongrie, Italie…) et même quelques asiatiques. Une délégation de religieux cisterciens sont venus de République tchèque en suivant, comme ils l’expliquaient à Saint-Pierre de Rome, non une étoile apparue en Orient, mais les indications qu’ils avaient trouvées sur Internet.
Parmi le clergé officiant tout au long du pèlerinage, on retrouvait aussi cette représentation internationale : un cardinal allemand (Mgr Brandmüller), un autre espagnol (Mgr Cañizares), un aumônier français (l’abbé Barthe), un cérémoniaire brésilien (don Almiro de Andrade), un évêque italien (Mgr Sciacca), un curé australien (le père Kramer de la Trinité des Pèlerins), etc.
4) Tout à fait remarquable, en outre, a été l’aspect « officiel » de l’appui ecclésiastique au pèlerinage : celui de la paroisse personnelle romaine dédiée à la liturgie traditionnelle et voulue par Benoît XVI – la Trinité des Pèlerins, fondée par saint Philippe Néri, et qui a parfaitement fait honneur à son nom tout au long du pèlerinage – ; celui de la Commission Ecclesia Dei, présente au chœur lors de la messe de clôture du cardinal Cañizares (Mgr Di Noia, son nouveau vice-président ; Mgr Pozzo, nommé le jour même archevêque ; Mgr Perl, ancien vice-président de la Commission pontificale ; don Almiro de Andrade, officiel pour le monde sud-américain et ibérique, cérémoniaire de la messe ; et essentiellement, la célébration par le Préfet du Culte divin, le cardinal Cañizares, le ‘ministre de la liturgie’ du pape.
5) Les observateurs ont été surpris, lors des messes pontificales à la Trinité-des-Pèlerins, lors de la procession portant à Saint-Pierre, puis bien sûr au cours de la messe elle-même à Saint-Pierre, par le nombre important de séminaristes et de prêtres diocésains. Citons-en un, inconnu en dehors de son diocèse mais ô combien symbolique : le père Rinaldo Bombardelli, en charge de la forme extraordinaire dans le diocèse de Trente. Les organisateurs du pèlerinage ont d’ailleurs tenu à saluer celui qui a ramené la messe « tridentine »… à Trente en en faisant l’un des familiers du cardinal Cañizares lors de la messe pontificale (l’un des membres de sa famille qui le servent selon les rites du Cérémonial des Évêques).
6) Le pèlerinage, comme nous l’avons dit dans une précédente lettre, a été béni par le pape. Par le Saint-Siège oserons-nous dire puisque le message adressé aux pèlerins par le cardinal Bertone au nom du Saint Père a été repris par les médias officiels du Vatican : L’Osservatore Romano, Radio Vatican, la Salle de presse vaticane ; sans oublier, comme il se devait, le mitraillage du photographe attitré du Vatican.
Le traitement relativement conséquent de L’Osservatore Romano (sans titre dans l’édition générale, avec titre (“Pour que les fidèles manifestent leur unité dans la foi”), sans doute une “fleur” faite au cardinal Cañizares dans son édition espagnole, est aussi un signe de progrès, quand on connaît les réserves que manifestait jusqu’à aujourd’hui ce journal vis-à-vis de la messe traditionnelle.
7) Mais ce que nous soulignerons surtout, pour notre part, c’est l’aspect « normal » pour reprendre le mot du cardinal Cañizares, que les autorités ont voulu reconnaître à la forme extraordinaire de la messe : procession accompagnée par la Questure de Rome, puis par la police vaticane au centre de la Place Saint-Pierre, ouverture des portes centrale de la Basilique : autant de petits signes dans une monde romain où chacune de ces choses a un prix symbolique fort.
8) Au total, donc : jeunesse du clergé (les nombreux séminaristes romains), son nombre et son caractère essentiellement diocésain ; fidèles (prédominance masculine et jeune, les trentenaires étant nombreux), mais aussi familles et enfants, le tout ayant un caractère frappant pour des cérémonies traditionnelles en Italie.
Bref, cela répondait au vœu émis par l’abbé Claude Barthe, aumônier du pèlerinage, en amont de l’événement : on peut dire que, lors de ce pèlerinage Una cum Papa nostro sur le Tombeau de l’Apôtre, le peuple Summorum Pontificum, clercs et fidèles, et ses plus élevés pasteurs se sont donnés la main. Ce dont Paix liturgique ne peut que se réjouir pour sa part.