Mgr Mamberti, secrétaire pour les relations avec les Etats, est intervenu lundi devant l’assemblée générale d’Interpol qui avait lieu à Rome. Mgr Mamberti a notamment évoqué, de façon remarquablement équilibrée, les relations entre la lutte anti-criminelle et la défense des libertés publiques:
En même temps, le développement des institutions démocratiques a permis d’affiner les techniques de protection de la liberté des individus et les modalités d’un usage proportionné et responsable de la force publique. Malgré cela, il reste toujours une marge de vulnérabilité devant la criminalité la plus atroce dont les manifestations remettent en cause les bases mêmes de la cohabitation civile, en attaquant l’échelle des valeurs sur lesquelles les institutions de l’État moderne sont fondées.
La défense et la promotion de cette échelle des valeurs est la première et la plus importante action de prévention de la criminalité. Si les pouvoir publics n’étaient plus en mesure d’agir de façon préventive dans cette direction, ils verraient par là même s’affaiblir leur propre légitimité. Une telle dérive est un risque à éviter avec attention : l’autorité publique qui a le devoir de gérer l’administration de la justice et de la sécurité, tire nécessairement sa propre vitalité et son autorité d’une constante référence à un ordre éthique objectif. Quand l’autorité perd le crédit et la confiance des citoyens et s’appuie seulement sur le formalisme juridique, sur la simple application des règles, sans un regard de vérité sur l’homme, cette autorité devient un géant aux pieds d’argile.
En soi, l’État démocratique doit offrir à tous les citoyens les mêmes garanties de défense des droits fondamentaux. On constate toutefois que, même dans des pays où des formes de gouvernement démocratique sont en place, ces droits ne sont pas toujours complètement respectés (cf. Jean-Paul II, Lett. Enc. Centesimus annus, n. 47).
Mgr Mamberti, en diplomate aguerri, évite le double écueil dans lequel tombent trop souvent les politiciens occidentaux: soit l’angélisme face aux menaces du crime organisé, et notamment du terrorisme; soit l’abolition des droits fondamentaux de la personne (de toute personne et de tout citoyen) sous prétexte de lutte anti-terroriste.
Il est clair que la lutte anti-terroriste est un point obscur de la réflexion politique: l’Etat de droit est, dans ce cadre, obligé de réfléchir aux conditions de sa propre suspension pour protéger ses ressortissants du terrorisme.
Je note cependant un point qui ne me semble nullement aller de soi dans la réflexion de Mgr Mamberti: il affirme que “l’État démocratique doit offrir à tous les citoyens les mêmes garanties de défense des droits fondamentaux”. Je ne vois, pour ma part, pas de raison s’opposant à ce qu’un Etat démocratique (ce qui, manifestement, dans ce contexte, est compris comme un synoyme d’un Etat de droit – même si, là non plus, cette synonymie ne va nullement de soi, puisque j’affirme, pour ma part, que l’Etat français était davantage un Etat de droit sous saint Louis qu’il ne l’est aujourd’hui où les innocents à naître sont réduits à une sous-humanité par une décision illégitime du parlement) offre des privilèges à certaines catégories de citoyens (comme, par exemple, la possibilité de célébrer son culte en public pour la vraie religion).