Une équipe de chercheurs de l’Université de Washington et de Seattle ont réussi à développer une technique qui leur permet de séquencer plus facilement et à moindre coût le génome complet d’un fœtus sans avoir recours à des gestes invasifs sur l’enfant à naître. Bonne nouvelle ? Pas sûr, car il s’agit en réalité de faciliter le dépistage in utero des désordres génétiques dits « mendéliens », aisés à repérer car liés à un défaut sur un seul gène. Il en a été repertorié plus de 3.000 à ce jour.
Jacob Kitzman et Matthew Snyder et leurs collègues viennent de rendre compte de leur nouvelle approche dans Science Translational Magazine.
Jacob Kitzman |
Compte tenu du fait que le plasma sanguin d’une femme enceinte contient de l’ADN sans cellule de son enfant à naître – environ 10 % du total de l’ADN sans cellule présent dans le sang – dès quelques semaines après le début de la gestation, les chercheurs ont prélevé du sang maternel sur des femmes enceintes à différentes étapes de la grosssesse : vers 18 semaines, puis plus tôt sur un autre couple. L’échantillon était analysé en le comparant avec l’ADN paternel recueilli dans la salive du père, et, en utilisant des données statistiques, en recherchant le distinguant de l’ADN maternel. La méthode permet alors de repérer les mutations nouvelles, qu’elles se soient produites dans les gamètes du père ou de la mère.
La méthode n’est pas nouvelle dans le principe mais l’équipe de Kitzman a réussi à l’affiner de manière à identifier d’infimes variations de l’ADN : une seule lettre du code. Ce qu’a permis de vérifier la comparaison du code obtenu avec celui effectivement constaté après la naissance en analysant le sang du cordon ombilical. La méthode aura permis d’établir les correspondances de l’ADN de l’enfant avec ceux de ses parents respectifs à 98,1 %.
Dans un des exemples étudiés par les chercheurs ceux-ci ont pu identifier 39 sur les 44 mutations de novo effectives de l’enfant alors qu’il était encore au stade fœtal.
L’idée est maintenant de standardiser et d’automatiser autant que possible la procédure pour permettre, à l’avenir, de dépister les quelque 3.000 désordres mendéliens de manière simple et rapide.
Ce qui posera fatalement le problème moral de l’utilisation de cette connaissance. Comment l’interpréter, comment évaluer la gravité des désordres génétiques constatés, comment en informer les parents – ou non ? Et sera-t-elle utiliser pour éliminer par l’avortement les malades de l’intelligence, les schizophrènes ou les autistes qu’on pensera avoir identifiés ?
Aujourd’hui, le dépistage de la trisomie 21 aboutit, on le sait, à 96 % d’avortements en cas de test positif, le test demeurant bien plus lourd et invasif, d’ailleurs non dénué de risques, qu’un simple examen de sang et de salive, puisqu’il faut prélever de l’ADN dans le liquide amniotique dans lequel baigne l’enfant à naître.
Demain les données dont disposeront les praticiens seront incroyablement plus nombreuses – et potentiellement plus dangereuses pour les tout-petits.
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