Depuis quelques années, les études et les biographies se multiplient sur Jacques Maritain (1882-1973), philosophe catholique français qui a contribué, avec d’autres, à la redécouverte de la pensée de saint Thomas d’Aquin. Très controversé après la publication de son livre Humanisme intégral et pour son influence indirecte sur Vatican II, Maritain n’en apparaît pas moins aujourd’hui comme l’expression d’une troisième voie entre traditionalisme et progressisme. Les choses ne sont évidemment pas si simples.
Philosophe thomiste, Maritain a joué également un rôle énorme auprès des milieux littéraires de l’entre-deux guerres, aussi bien auprès des catholiques Julien Green que François Mauriac que de non catholiques (dont il espérait la conversion) comme Cocteau. Issu des milieux de gauche, proche de Péguy, avec lequel il se montra maladroit, un temps dans le cercle des intellectuels de la sphère de l’Action Française, Maritain se rapprocha après 1926 et la condamnation papale de l’A.F. des catholiques de gauche (Sept) et de Mounier. Homme de foi, vivant comme un moine dans le monde, il finira ses jours chez les Petits Frères de Jésus.
La particularité de la biographie écrite par Jean-Luc Barré (aujourd’hui directeur de la collection Bouquins) est qu’elle s’attache, non au seul Maritain, mais au couple Maritain, celui que Jacques formait avec son épouse Raïssa (1883-1960). Il s’agit d’un ouvrage grand public, réédité aujourd’hui en format de poche (Tempus, 646 pages, 12€). En s’attachant au couple Maritain, marié mais tenu par un vœu de chasteté, Jean-Luc Barré permet de mieux saisir ce que fut Maritain qui ne s’explique pas et ne se comprend pas sans sa femme, et, dans une moindre mesure, de sa belle-sœur, Véra, qui resta toute sa vie durant auprès du couple Maritain.