Faut-il vraiment présenter Armand Jean Le Bouthillier de Rancé (1626-1700), célèbre abbé de l’abbaye de La Trappe ? On sait qu’après une vie dissipée – il eut pour maîtresse la duchesse de Montbazon – il entra dans une période de quasi-retraite, voire de méditation, qu’il mit à profit pour revoir sa vie et pour traduire plusieurs Pères de l’Église et maîtres spirituels du monachisme.
Abbé commendataire de La Trappe, il s’intéressa et s’impliqua dans son relèvement avant d’entreprendre lui-même son noviciat puis devenir abbé régulier de La Trappe. Il entra alors dans une période de réforme et devint l’un des grands artisans de la stricte observance. Son insistance sur l’ascèse le fit tomber dans un anti-intellectualisme qu’on lui reprocha d’ailleurs. Chateaubriand lui a consacré une biographie qui reste un classique.
Les éditions du Mercure de France viennent de rééditer un livre de Rancé, Vie et mort des moines de La Trappe (298 pages, 19,80€) qui connut à sa parution en 1678 un grand succès dans le monde. Rancé y retrace les agonies de treize moines, invitant ainsi à la méditation sur la mort et le jugement divin. Des agonies exemplaires qui doivent donc orienter la vie de ceux qui les découvrent par cette lecture, appropriée en cette période de la Passion.
Cette nouvelle édition a été établie Jean-Maurice de Montremy, auteur d’une vie de Rancé. Introduite par lui, elle est annotée et suivie d’un aperçu sur la mort de Rancé, d’une chronologie et d’un glossaire bien utile. Un très beau travail à se procurer.
J’ai lu qu’il s’était converti après la mort de son amie, lorsqu’il la vit dans son cercueil. Les gens chargés de l’enterrement n’ayant trouvé qu’un cercueil trop court avaient décapité le cadavre et mis la tête détachée dans le cercueil avec le corps décapité. Autre temps, autre mœurs !
Cette vision d’horreur l’avait converti.